Cela faisait maintenant des semaines entières que l’homme pensait à cela. Un animal. Pourquoi pas ? Après tout n’était-il pas adorateur de la nature, de son jardin, alors pourquoi ne pas passer au niveau supérieur en allant chercher un animal ? Aurait-il le temps, l’énergie pour cela ? Oui. Bien sûr. Il en était convaincu, d’autant qu’il fallait s’avouer que Dougal se sentait souvent seul, le soir venu, lorsque toutes les personnes de sa communauté rentraient chez eux. Peut-être était-ce donc le moment. Et puis… Se rendre dans un refuge ne signifiait pas, pour autant, qu’il allait repartir immédiatement avec un animal. Cela pouvait être uniquement pour prendre quelques informations, visiter… Alors… Pourquoi pas ?
C’est ainsi que Dougal avait fait en sorte de n’avoir ni cours ni rendez-vous pour l’après-midi même. Cela lui permettrait, après tout, en plus, de profiter enfin d’un peu de repos bien mérité. D’ailleurs était-il d’abord décidé à passer chez le barbier. Après tout s’il n’avait plus de cheveux depuis bien des années, sa barbe, elle, ne cessait de croître, ainsi prenait-il grand soin de celle-ci. Après coup, sûrement passerait-il malgré tout à l’université récupérer quelques dossiers d’étudiants qui n’attendaient que sa correction et seulement après irait-il au refuge. Du moins là était son plan de départ. Un plan malheureusement est toujours fait pour être revu et revu encore et rien ne se passa comme prévu. Tout d’abord, s’il alla effectivement chez le barbier, il fut arrêté dès la sortie de celui-ci par deux de ses étudiants. Cela dura près d’une demi-heure, le mettant alors en retard pour retourner à l’université. Malheureusement, il était déjà quinze heure trente. Impossible donc, de se rendre à son bureau, l’empêchant, le soir même de corriger les copies. Pire ! Un appel à l’aide de l’un membre de sa communauté l’obligea à rebrousser chemin jusqu’à sa cabane pour le retrouver. Bref… autant dire que rien ne fut comme il l’avait décidé. Rien ? Ou presque. A seize heure trente, l’homme arriva au refuge, garant sa voiture devant l’entrée. Dans son coffre ? Il avait eu le temps d’acheter bon nombre d’objets pour chiens comme pour chats juste avant d’arriver. Des objets qui s’avèreraient peut-être inutiles, certes, mais savait-on jamais. S’il trouvait une ou deux boules de poils pour lui tenir compagnie…
D’un pas décidé, il entra alors dans le refuge, le sourire aux lèvres.
- Bonjour ! Lança-t-il à tue-tête en s’approchant d’une jeune femme. Je m’excuse de cette arrivée tardive mais… Il hésita. Au vue de l’heure, peut-être valait-il mieux revenir demain ? Non. Non il était là après tout… Auriez-vous des chiens ou des chats à adopter ?
Question rhétorique, évidemment, il était en refuge, et si c’était là le rêve de tout refuge de se voir vide d’occupant, il peinait à croire que cela soit un jour le cas.
- Enfin… Reprit-il. Si jamais il est trop tard, je reviendrais plus tard. Un sourire entendu, il hocha la tête. Cela ne me pose aucun problèmes !
Un jour de semaine comme un autre où Cassandra bossait avec acharnement au refuge. Elle adorait y passer ses journées à chouchouter les animaux, même si c'était un métier physique, il fallait bien l'avouer. Le matin, à peine arrivée, elle avait récupérée le matériel et s'était attelée au nettoyage des cages pour chiens. Après tout, ils avaient eux aussi droit au minimum...Un sol propre, sans crotte, de l'eau fraiche, des croquettes...Elle en profitait pour leur adresser quelques mots et quelques caresses, lui permettant ainsi de vérifier s'ils allaient bien.
La matinée passa plutôt vite et lorsqu'il fut treize heure passé, elle se dirigea vers les parties communes des employés. Elle se débarbouilla, se lava les mains, tout en réfléchissant à son programme de l'après-midi. Elle mangea en silence son repas, écoutant le bavardage de ses collègues. Elle les quitta avant la fin de sa pause qu'elle passait toujours en compagnie des chats ou d'un chien s'il était malade. Là, elle profita des boules de poils, se détendant parmi les ronronnements incessants et les câlins plutôt...envahissants.
Au bout d'un temps, elle devait les quitter bien malgré elle pour aller promener les chiens. Elle accueillait également parfois des bénévoles, leur confiant un chien à promener. Les plus faciles, les plus sociables...Pour ne pas les traumatiser. Un bénévole c'était précieux. Le chien encore plus, alors il ne fallait pas mettre n'importe lequel entre les mains de n'importe qui. Les heures défilèrent inlassablement à jouer avec les chiens, courir avec eux, les promenant...Elle faisait tout pour les défouler un maximum. Alors vers seize heure trente lorsqu'elle revint au refuge d'une promenade, elle était un peu transpirante, essoufflée aussi et son pantalon était plein de terre et de boue séchée. Et pourtant, elle arborait un sourire radieux. Le chien lui, semblait apaisé, la langue pendante. Elle le raccompagne jusqu'à son abri, le détacha et le gratifia d'une dernière caresse avant de le laisser aller boire.
Mais alors qu'elle refermait la porte, une voix masculine se fit entendre. Elle sursauta et se retourna alors vers l'inconnu. Oh, une adoption ! Elle lui adressa un large sourire.
- Bonjour, aucun soucis, nous avons encore largement le temps ! Et nous avons effectivement les deux, des chiens et des chats. Tout dépend au final de ce que vous souhaitez le plus...ainsi que de votre mode de vie. Mais également du temps que vous pourrez accorder à votre futur compagnon.
Elle observa l'homme, constatant qu'il était d'un certain âge. A la retraite peut-être ? Ce serait pratique pour s'occuper d'un animal à plein temps. Mais s'il était trop âgé, un chiot ou un chaton ne collerait pas, au risque que la boule de poil se retrouve abandonnée à la mort de son propriétaire.
- Suivez-moi, je vais ranger cette laisse et je suis tout à fait. Je vous écoute en même temps. Je pourrais vous conduire à la loge des chats, si vous le souhaitez.
Elle se dirigea vers le petit abri dont la porte était grande ouverte, un endroit regorgeant de matériels en tout genre mais les laisses étaient toujours suspendues...Une façon de les saisir plus facilement et plus rapidement. Elle rangea celle qu'elle tenait puis se lava les mains...histoire d'être un peu plus propre. Surtout pour aller voir les chats.
- Alors, dites-moi, vous vivez plutôt en appartement ou en maison ? Ne m'en voulez pas si je parais un peu intrusive, je veux juste m'assurer que l'endroit conviendra à l'animal choisi...Un chat s'adaptera plus facilement à n'importe quel espace. Certains chiens ont besoin de beaucoup d'espaces ou de promenades quotidiennes pour se dépenser...Ainsi que d'un jardin parfaitement sécurisé. Il serait dommage de ne retrouver qu'un trou sous une clôture parce que votre nouvel ami aurait creusé en dessous pour aller se balader...
Elle s'arrêta alors dans une petite maison avec de chaque côté une cours grillagée contenant arbre à chats et cachettes en tout genre. Elle ouvrit la première porte et l'invita à entrer, attendant qu'il soit à l’intérieur pour la refermer. Ce sas évitait des fuites malencontreuses.
- Allez-y, je vous laisse entrer et découvrir nos chats...Avez-vous une préférence pour l'âge ou la couleur ?
Elle se tut alors, lui laissant le temps de réfléchir à ses réponses et de découvrir cet endroit. Mais les chats, eux, étaient impatients et les plus sociables se précipitèrent vers lui en miaulant. Ils cherchaient à attirer son attention. L'un d'eux, plus efficace surement, sauta de son abri en hauteur pour atterrir sur les épaules de l'homme. Un beau matou tout roux, d'une taille et d'un poids plus que respectable. Cassandra eut un petit rire.
- Je vous présente Paprika. Il aime sauter sur le dos des gens...en oubliant qu'il n'est plus un chaton.
Elle le regarda frotter sa tête sur la joue de l'homme qui était désormais accaparé de toute part. Cass le laissait faire, observant ses réactions, prête à agir si le poids du chat devenait trop lourd pour lui.
Comme il était prévu, le refuge accueillait toujours les deux espèces les plus communes d’animaux de compagnie. Une chance pour le vieux Dougal, ou une malchance à vrai dire… Il était désormais confronté à un dilemme : que prendre ? Bientôt à la retraite, il aurait du temps pour s’occuper d’un chien, malgré sa place de meneur de la Communauté puisque le chien pourrait le suivre où qu’il aille. Il avait un jardin, qu’il pourrait clôturer sans trop d’ennuis, ainsi qu’une cabane accueillante. Pour ce qui était du chat… Tout chez lui était ouvert, il pourrait même installer une chatière pour le bienêtre de l’animal alors… L’homme grimaça un peu, visiblement incapable de se décider.
- Pour tout vous avouer je n’ai aucune idée de ce qui me plairait le plus, avoua-t-il. A m’écouter je prendrais certainement chacune de ses bêtes avec moi.
Un large sourire et il se mit à rire. Il était vrai qu’il n’aimait pas voir ses pauvres animaux enfermés de la sorte et cela, toujours, lui brisait le cœur de les voir sans famille aimante avec eux. Oh bien sûr avaient-ils sûrement des bénévoles à leur petit soin, tous aussi dévoués les uns que les autres, mais qu’était-ce par rapport à la chaleur d’un foyer, après tout ? La suivant sans discuter, il hocha la tête à l’idée de la loge des chats. C’était un bon commencement.
- A vrai dire, je suis bien tôt en retraite, je n’ai plus qu’un an à faire dans ma profession, dit-il, c’est donc certainement le meilleur moment d’avoir un animal. Et rassurez-vous, vous n’êtes absolument pas intrusive, je pense d’ailleurs qu’il est normal que vous désiriez connaître les futurs potentiels acquéreur, la rassura-t-il le sourire aux lèvres. Pour ce qui est de mon lieu de vie, j’ai une petite maison avec jardin, non clôturé pour le moment mais il m’est tout à fait possible de le clôturer.
Entrant dans le lieu réservé aux chats en tout genre, le Mawu réfléchit aux questions de la jeune bénévole. Une préférence pour l’âge et la couleur ? Mh. C’était une question tout à fait intéressante : il n’en savait encore une fois strictement rien. Elle allait d’ailleurs finir par croire qu’il n’avait réfléchit à rien et peut être était-ce un peu le cas mais… Dougal sursauta, interrompu dans ses pensées, un chat roux venant de sauter sur l’épaule et frottant sa tête contre sa joue.
- Eh bien, eh bien ! S’exclama Dougal en gratouillant l’animal qui ronronnait plus que de raison. Il me semble que vous avez des chats bien sociaux ! N’est-ce pas Paprika ?
Son regard se posa alors sur tous les animaux qui alors l’entouraient, miaulant et se frottant à ses jambes. Il ne savait plus où donner de la tête ! Non que cela lui déplaise, bien au contraire, c’était même parfaitement agréable d’avoir autant d’attention, il fallait bien l’avouer, même de la part d’animaux, mais entouré de la sorte, il semblait même craindre de faire un geste, de peur d’en blesser un. Tournant la tête vers la jeune fille il hocha la tête.
- Comment diable font tous les adoptants pour ne pas repartir avec tout le monde ? S’amusa-t-il en s’accroupissant précautionneusement. Pour répondre à vos questions, je dois avouer que là encore je ne sais pas vraiment. Peut-être un animal qui ne soit pas complètement indépendant, afin de pouvoir passer du temps avec. Dit-il, pensif. Mais je me contenterais de tout animal voulant d’un maître comme moi !
A nouveau l’homme se releva, droit sur ses jambes, sans cesser de caresser Paprika, pour observer la jeune femme attentivement. Une chose ne l’avait visiblement pas frappé jusque-là mais commençait à le rendre pensif à la voir sous un autre angle.
- Dites-moi, osa-t-il alors. Ne nous sommes-nous pas déjà rencontrés quelques part ?
Ce n’était là qu’une impression, il croisait, malheureusement, bien trop de personne pour pouvoir se souvenir de tous ceux qu’il pouvait voir mais, malgré tout… Cette impression lui semblait bien réelle pour n’en être qu’une.
L'homme n'avait visiblement aucune idée de ce qu'il désirait. Il était venu avec l'idée d'adopter, tout simplement. C'était louable mais jamais pratique pour trouver ce qui lui conviendrait...Néanmoins, Cassandra était sure de réussir ! - Oh, ce n'est pas moi qui vais vous empêcher d'adopter un chat et un chien...Même si du coup, ça vous permet de limiter un peu puisque chacun doit pouvoir accepter l'autre ou l'ignorer. Mais ne vous en faites pas, on va trouver ! Ce sera un challenge amusant !
Elle l'écouta alors parler de lui. Dans un an, il serait à la retraite, ce qui lui laissait malgré tout de belles années devant lui. Ainsi donc un bébé ou jeune animal ne devrait pas poser trop de soucis et se retrouver seul sans son propriétaire. - Pour la clôture, il faudra vite vous en occuper, surtout si vous repartez avec vos animaux. Nous aimerions pas recevoir de mauvaises nouvelles. Mais ce sera un coup supplémentaires car certains de nos chiens savent parfaitement creuser, il faudra donc une clôture solide et en profondeur.
Néanmoins, le fait qu'il ait un jardin était une excellente nouvelle. Le chien aurait de quoi se divertir en attendant une promenade. Et certains chats s'en contentaient très bien aussi. En attendant, une fois à l'intérieur de la loge des chats, Paprika montra aussitôt son intérêt en lui sentant dessus et l'homme ne s'en offusqua pas. Il semblait même amusé. - Oui, nous avons de tout en caractère. Paprika est extrêmement câlin et la compagnie humaine, il vous suivra partout. D'autres chats sont plus timides.
Elle indiqua un chat noir qui se planquait dans l'ombre d'un arbre à chat. D'autres s'étaient carrément enfuis dans la cours fermée où les humains en dehors du personnel n'était pas autorisés à entrer.
- Donc, tant que vous désirez un chat sociable, il suffit de choisir parmi ceux qui sont là, autour de vous. N'hésitez pas, parlez leur, caressez les et peut-être que vous flasherez sur l'un d'eux ?
Cass essayait d'ignorer les ondes de stress et de peur qui parvenaient des autres chats dans son dos. Certaines émotions étaient si fortes qu'elles l'assaillaient à travers le mur les séparant de la cours. Elle détestait ces sensations, tout en sachant qu'elle ne pourrait rien faire et que ça ne s'arrêterait pas tant que le futur adoptant était là. Elle finit par s'approcha de lui et chercha à récupérer Paprika qui continuait de ronronner tout en fixant l'homme. A ce moment là, il lui posa une question tout à fait inattendue. Elle se raidit et sa main lui frôla la nuque. Elle se recula aussitôt en tenant le chat dans ses bras, qui semblait ravi d'avoir un couloir pour lui tout seul.
- C'est bien possible...Je ne sais pas...Où aurait-on pu se rencontrer ?
Par pitié, faites que ce ne soit pas à la prison ! Ou pendant son procès. Mais elle avait aussi cette impression de le connaître. Elle baissa les yeux sur Paprika, le caressant au niveau de la tête. Ses puissantes émotions de contentement l'apaisait, prenant le pas sur les sensations négatives des plus craintifs. Elle finit par se reprendre et se racla la gorge. Elle avait des adoptions à mener à bien !
- Est-ce qu'il y a un chat dont vous aimeriez que je vous parle plus ? Oh, sachez qu'il est tout à fait possible de changer le prénom de l'animal que vous adopterez.
Le rouquin, dans ses bras, poussa un miaulement grave comme pour confirmer ses paroles alors qu'il était fermement agrippé à elle. Il ne la laisserait pas mettre fin à ce câlin si facilement mais ça ne la dérangeait pas et ça se voyait. Elle aimait les animaux et ceux comme Paprika lui faisait un bien fou.
J’hochai la tête avec un sourire. Un challenge. C’était une façon agréable de voir mon indécision totale au sujet de l’animal, ou soyons fou des animaux, que je désirais et j’approuvais cela tout à fait.
- Rassurez-vous, je peux faire installer une clôture profonde dès demain s’il le faut, je ne manque ni d’argent ni de temps. Et je crois que l’université sera heureuse de se débarrasser d’un vieillard râleur comme moi durant une journée.
J’exagérais peut-être un peu, et mon ton indiquait clairement qu’il ne s’agissait là que d’une plaisanterie. Ou presque, j’étais malgré tout sérieux quant à la possibilité d’installation rapide d’une clôture. S’il en allait de la vie d’une bête, je le ferais sans aucune hésitation. J’esquissai alors un sourire à ses propos concernant les bêtes. Peut-être me faudrait-il un chat sociable. Non que je n’eusse l’envie d’apprivoiser entièrement un animal mais comme premier chat… Peut-être était-ce beaucoup me demander, je risquai alors de faire des erreurs irréparables, choses dont je n’avais aucune envie, et cela plus pour l’animal que pour moi, d’ailleurs.
Le temps de longues minutes, peut être cinq ou un peu plus, accroupi dans leur antre, je tentai de m’occuper de chaque chat venant quémander quelques câlins. L’on pouvait, au moins, dire que je n’étais pas effrayé par les bêtes, c’était un fait, mais lequel choisir ? Si je devais attendre de flasher… Je les emporterais tous ! Sans aucune exception.
Ma question posée, je la vis alors se pencher vers moi pour récupérer le petit Paprika bien accaparant. Et concentrée sur elle, sa main ayant frôler ma nuque, il advint alors ce qu’il devait advenir. En un très court instant, je la vis distinctement dans trois situations différentes. Dans la première, je la voyais dans un restaurant, visiblement entourée d’amie et parfaitement heureuse. Dans la seconde, elle se trouvait entourée de personnes que je connaissais parfaitement bien ; de personnes appartenant à la communauté Mawu. Était-elle… A nouveau entourée d’animaux, elle semblait apaisée. Mais la troisième, elle, me fit frémir. Rapidement, je l’observai, l’air le plus neutre possible pour ne pas l’alerter. Morte. Voilà comme je l’avais vu. Vidée de son sang au vu de sa pâleur, entourée de vampires dont je n’avais pu voir le visage.
Doucement, je me redressai, tentant de me reprendre. Hum. Les chats… A nouveau, j’observai les chats, cette fois plus distraitement. C’était peut-être là le contre coup de mes visions. J’avais toujours désiré connaître les futurs les plus probables, notamment dans les cas comme celui-ci, mais comment… M’approchant d’un chat noir, je lui tendis simplement la main, de peur de le brusquer pour le laisser venir à moi.
- Renifleur. Ce pourrait être un nom… Intéressant ?
La communauté Mawu devant restée, par tous les moyens secrète, je ne pouvais décemment lui poser de questions directes. Néanmoins, je me devais de découvrir ce qu’il en était. Pourquoi se trouvait-elle au sein de ma communauté dans ma vision ? Qui était-elle ? Ainsi avais-je expressément utilisé le nom de notre renifleur de pouvoir, celui qui nous indiquait quel humain pouvait faire partie de notre communauté, pour une bonne raison. Si elle en faisait partie, elle connaîtrait obligatoirement ce nom, et j’espérais qu’à défaut de me le dire, son langage corporel me l’indiquerait. Si non, deux solutions s’offraient à moi : elle n’avait pas été encore approchée ou elle n’en faisait pas partie, et, dans ce cas, la question restée toute posée.
- Ce chat me semble particulièrement attentif. Dis-je en observant le chat noir, malgré tout, pour ne pas nous éloigner du sujet initial. Quel âge a-t-il ?
L'homme promettait d'installer dès demain une clôture solide pour le bien-être de ses futurs amis. Ce qui était une très bonne chose et prouvait à Cassandra qu'il était réellement motivé à adopter un chien...Et un chat vu qu'il la suivait dans leur loge et écoutait tout ce qu'elle avait à lui dire à leur propos.
- Oh, vous ne me semblez pas si vieillard et râleur que ça ! Vous avez encore de belles années devant vous ! Et puis, vous avez raison de préparer votre retraite, des animaux vous permettront de vous aider à continuer à sortir et ne pas rester enfermer chez vous. Il parait que le passage à la retraite est un moment difficile ?
Oui, c'était une véritable interrogation. Après tout, elle était jeune, la retraite ce n'était pas pour tout de suite. Mais surtout, avec sa situation actuelle, elle n'imaginait pas du tout atteindre un jour la retraite. Elle savait très bien, qu'elle avait plus de chance d'être tuée par les vampires chez qui elle vivait. Soit après en avoir énervé un, soit parce que l'un d'eux aurait trop faim pour se retenir. Mais elle refusait d'y penser, ne pouvant pas y faire grand chose de toute façon et préféra se concentrer sur l'adoption en cours. Tant qu'elle était vivante, elle s'assurerait de trouver de bonnes familles à ces pauvres animaux...ce serait toujours tant de vies sauvées !
Alors qu'elle tenait Paprika, le caressant machinalement, elle eut l'impression que l'homme eut une sorte d'absence ou alors, il réfléchissait à ses questions et propositions. Oui, c'était surement ça. Elle le regarda alors se redresser puis s'approcher d'un chat noir tout en douceur. Elle sentit la crainte émaner de cette boule de poils, pourtant, le chat ne bougea pas, faisant l'effort de renifler la main tendue. En entendant la possibilité de nom, elle se raidit instinctivement et Paprika lui échappa des mains. Surpris, le chat eut tout juste le temps de se rattraper et repartit, dignement, mais n'ayant visiblement pas apprécié la surprise. Était-ce un hasard si cet homme avait choisi ce nom, celui de la personne qui avait permis de confirmer qu'elle était une Mawu pendant ses années de prison ? Elle ne savait pas et ne voulait pas poser la question. Elle se reprit comme elle le put, se raclant la gorge.
- Euh...oui, en effet. C'est tout à fait possible.
Elle essaya de se concentrer sur le matou en question, ayant bien du mal à sortir de ses réflexions. Allez, elle devait se secouer surtout s'il s'intéressait à un plus timide, tout le monde n'adopterait pas un tel chat.
- Il a 2 ans environ...C'est encore un jeune chat. Il n'a pas beaucoup connu l'homme puisqu'il a été récupéré dans un appartement insalubre avec beaucoup de ses congénères. Mais il a fait énormément de progrès depuis qu'il est ici...Et je pense qu'avec un peu d'attention et de patience, il pourrait être un chat très câlin.
Elle resta où elle était, ne cherchant pas à s'approcher. Même si ce chat la connaissait un peu puisqu'elle venait tous les jours ou presque dans la loge des félins, elle savait aussi que trop d'humains autour de lui le stressait. Elle les laissait donc faire connaissance mais la situation était encourageante puisque le chat ne fuyait pas et prenait le temps de renifler les doigts de l'homme. Ce qui la ramenait inévitablement à ses réflexions sur le "Renifleur". Elle ne pouvait s'empêcher d'étudier le futur adoptant, comme si elle pouvait percer ses secrets ainsi.
- Attention jeune fille, les premières impression peuvent être trompeuse ! Dit-il alors en riant.
Bon, ce n’était certainement pas le cas ; il n’était ni râleur, ni vieillard, quoique ce dernier point puisse-t-être débattu au vu de son âge avançant. Néanmoins, il était d’accord sur le fait que les animaux l’aideraient à ne plus être seul, quoique cela restait tout relatif. Son rôle au village ne changerait pas malgré sa retraite, loin de là, même, car il pourrait, ainsi, prendre bien plus de choses à faire, et même commencer à former de nouveaux jeunes pour la relève suivante. Après tout n’était-il pas éternel. Ainsi secoua-t-il négativement la tête.
- La retraite est un moment difficile pour ceux qui n’ont que le travail, et heureusement, je n’ai pas que cela. Il leva néanmoins les mains. Rassurez-vous néanmoins, mon travail « associatif », se déroule souvent chez moi ou à quelques mètres à peine, les animaux y sont même admis !
Et c’était peu dire, la cabane dans laquelle il siégeait était, de toutes les manières, rarement fermées, alors même s’il ne le désirait pas, il ne pourrait pas empêcher les animaux d’y entrer et sortir. Il s’était d’ailleurs une fois retrouvé avec un serpent sur le dos à cause de cela. Et cela ne lui avait pas servi de leçon apparemment !
Et la réaction de la jeune fille ne tarda pas à arriver. Le chef sentit l’humaine se raidir au nom du Renifleur. Bonne touche ? Cela restait à confirmer, mais c’était encourageant. Peut être allait-elle donc bientôt rejoindre la communauté, ce qui expliquerait, de fait la vision. Masi comment en être sûr ? Il ne pouvait toujours décemment pas poser de questions directes. A moins d’imaginer un mensonge sans queue ni tête, ce qui n’était pas réellement à son goût, mais alors comment ? Distraitement, Dougal écouta malgré tout la réponse quant au chat. Un chat à éduquer vis-à-vis de l’homme. Esquissant un sourire il laissa doucement le chat frotter sa tête une fois sur la main avant de faire demi-tour.
- Hé bien toi mon bonhomme, souffla-t-il, on va peut-être pouvoir s’entendre tous les deux.
L’homme se releva alors pour faire face à l’employée du refuge, un sourire aux lèvres.
- Je pense avoir trouvé mon bonheur, dit-il simplement. Ce petit chat et moi… Je pense que nous pourrions nous entendre et j’ai largement assez de patience et d’attention pour lui, il n’y a pas de problèmes !
Ah cela… L’on pouvait dire que la vie et son rôle lui avaient appris à être patient ! D’autant que ce choix était mûrement réfléchi, il était donc tout à fait préparé à cela. Il n’imaginait d’ailleurs pas autre chose.
- Dites moi. Finit-il par dire. Que pensez-vous du nom « Mawu » ?
C’était peut-être risqué, ou pas cela dit. Qui pourrait imaginer qu’une communauté portait ce nom là sans le savoir à la base ? Et quand bien même, il s’agissait du nom d’une divinité, il le savait pertinemment, ainsi pourrait-il s’expliquer. A vrai dire, Dougal espérait fermement que cette jeune femme finisse par lui poser elle-même la question, cela lui éviterait bien des questionnement. Mais il savait aussi que cela ne risquait pas d’arriver, malheureusement. Il devrait donc trouver un moyen pour y aller directement, et… Sa réaction quant à ce nom signerait, ou non, l’arrêt de ses investigations quant à cela. Pour autant, le Mawu était convaincu qu’elle avait un lien avec sa communauté. Pourquoi l’aurait-il vu entouré des siens, si cela n’était pas le cas ? Ce n’était là qu’une explication logique à sa vision, après tout. Mais en attendant…
- Pourrions-nous aller voir les chiens ? Demanda-t-il. Je crois avoir craqué sur votre petit chat noir, mais je suis curieux de connaître les autres animaux malgré tout.
Ne pas oublier le pourquoi il se trouvait là, après tout. Il pouvait bien faire les deux choses à la fois, ce n’était pas un souci !
En tout cas, l'homme âgé ou non avait un bon humour et une belle joie de vivre, Cassandra regrettait presque de ne pas le connaître finalement. Sa famille devrait apprécier les repas en sa compagnie...Qu'est-ce que ça faisait d'avoir un grand-père comme lui ? Elle secoua la tête, inutile de penser à ce genre de choses.
- C'est une bonne chose, ainsi si vous adoptez un chien, il vous accompagnera partout et sera sociable à force de rencontrer du monde. Et un chat aura, grâce à ça, un moment de tranquillité que certains apprécient tout particulièrement. C'est un bon emploi du temps !
Il ferait un bon adoptant, Cassandra n'en doutait pas un seul instant. En tout cas, dans la loge des chats, l'homme s'intéressait de près à un beau chat noir, légèrement craintif mais intrigué par lui. C'était prometteur. Et tant mieux dans un sens, parce que Cass n'aurait su gérer un incident, troublée comme elle l'était à ce moment là.
- Parfait, je pense effectivement que vous pourrez nouer une belle relation tous les deux.
Elle allait se diriger vers la sortie lorsque l'homme prononça un autre mot. Encore plus inattendu que le précédent. Mawu. Elle se figea puis se tourna vers lui.
- Qui êtes-vous ?
Elle n'était pas du tout à l'aise, en cet instant. Qui était-il et que voulait-il, finalement ? Les Mawu cherchaient-ils à la retrouver ? Non, il la connaitrait dans ce cas-là. Elle était totalement perdue. Néanmoins, l'homme réclama à voir les chiens comme si la situation était parfaitement anodine. Elle hocha la tête, bien qu'un peu plus blanche que d'ordinaire.
- Oui...oui, bien sur. Allons-y !
Elle sortit du bâtiment et invita l'homme à la suivre même si elle le scrutait, cherchant à percer ses secrets. Elle récupéra la fiche concernant le chat élu sur le panneau à côté de la porte, chaque fiche concernait un chat, donnant son nom, son âge, ses pathologies éventuelles ou encore handicap et bien sur, son histoire si elle était connue. Elle croisa ensuite un collègue en se dirigeant vers les chiens.
- Peux-tu préparer ce chat et ses affaires, s'il te plait ? Ce monsieur va l'adopter.
Le jeune homme récupéra la fiche, en souriant puis remercia chaleureusement l'adoptant pour ce geste avant de se diriger vers le bureau. Cassandra amena son adoptant vers les cages où se trouvaient les chiens. - Je vais vous conduire vers des chiens acceptant les chats. Certains en ont trop peur ou se montre réellement agressif. Ça va vous permettre de réduire le choix possible. Avez-vous une préférence pour la taille ?
Elle attendit patiemment sa réponse alors qu'elle s'arrêtait devant la cage d'un chien de taille moyenne. La fiche indiquait qu'il s'agissait d'une femelle d'un an et demi.
- Je vous présente Pandora, elle ne grandira pas beaucoup plus. Est-ce que cette taille vous convient ou vous préférez plus petit ou plus grand peut-être ? Pandora est une chienne très sociale, un peu fofolle sur les bords. Elle a été adoptée chiot puis nous a été rendue car ses propriétaires n'arrivaient pas à la gérer...Il est vrai qu'elle a une passion pour les chaussures.
La chienne s'était précipitée sur la porte et jappait joyeusement, sa queue frétillant dans les airs. Entièrement blanche, elle présentait juste des tâches noires et marrons par endroit, notamment sur sa tête. Cassandra attendait de voir si l'homme était intéressé pour lui permettre d'entrer dans la cage et pourquoi pas de se promener avec la chienne.
Dougal hocha la tête dans un sourire franc. Oui. Sa vie serait presque idéale pour un animal. Et si elle ne l’était pas, il ferait en sorte qu’elle le soit. N’était-ce pas là, après tout, le but de tout adoptant ? Non ? En tout cas, pour lui, cela l’était. Et c’était là le plus important. Se relevant pour suivre la jeune femme jusqu’à la sortie, le Mawu ne put alors que constater l’effet qu’avait fait le mot même de « Mawu » sur la jeune femme. Il n’y avait donc aucun doute possible. Elle savait. Elle les connaissait. Dougal en était désormais convaincu. Ne restait plus qu’à lui parler. A savoir qui elle était, elle, car c’était là son unique questionnement. Qui elle était et si elle connaissait des vampires. Cette vision… L’homme fronça imperceptiblement des sourcils. Non. Il ne pouvait pas l’oublier. Une mort entourée de vampire n’était jamais rien de bon. Et la mort par privation de sang… Il n’osait même l’imaginer. Mais malgré ses doutes et ses questionnement, il répondit alors chaleureusement à l’employé chargé de préparer le chat dans un large sourire, continuant de suivre la jeune employée, sans un mot, ne faisant que l’observer attentivement.
- Je doute qu’un tout petit chien soit bien adapté, réfléchit-il quelque peu. A moins qu’il soit malgré tout assez sportif. Mais je n’ai pas forcément, à part cela, d’envie particulière. Tant que je peux le rendre heureux, cela m’ira !
L’homme s’accroupit alors près de la cage pour présenter sa main afin de la faire sentir, un sourire attendri aux lèvres à la façon de japper de la chienne.
- Cette taille pourrait parfaitement convenir ! Dit-il en observant la chienne. Quant au chaussures, je les cacherais dans des meubles. Tant qu’elle ne sait pas ouvrir les portes avec ses pattes, cela devrait aller.
Se redressant, l’homme soupira alors pour faire face à la jeune femme. Un coup d’œil à droite, puis à gauche pour s’assurer de l’absence de toute âme humaine qui pourrait le comprendre et il plongea ses yeux dans ceux de l’employée.
- Je suppose que je me dois de répondre à votre dernière question avant que nous ne fassions les présentations avec Pandora. Dit-il alors plus sérieusement malgré un visage des plus doux. Je m’excuse tout d’abord de ces insinuations et jeux avec les mots. Je ne pouvais décemment pas me permettre toute confrontation directe avec une non initiée. Mais je suis désormais convaincu que vous l’êtes. Hochant doucement la tête Dougal lui adressa un léger sourire. Dougal Heinworth. Se présenta-t-il. Je suis le chef de la Communauté Mawu. Et il me semble fortement que vous n’êtes pas étrangère à cette communauté.
Et maintenant ? Comment pouvait-il bien lui expliquer le pourquoi du comment ? Lui dire de but en blanc qu’il l’avait vu mourir ? Non. C’était bien trop violent. Mais il ne pouvait néanmoins pas laisser toutes ses questions en suspens alors… Il fronça légèrement les sourcils, se retournant vers la chienne.
- Êtes-vous déjà allée dans la communauté ? Si vous connaissez notre Renifleur, je suppose que tel est le cas. Ainsi… Je pense que ma question devrait être… N’y êtes-vous pas restée ? L’homme secoua la tête. Ne vous forcez pas à répondre si le cœur ne vous en dit pas, Miss. Et je me ferais de toutes les manières un plaisir de faire connaissance avec cette jeune chienne.
Cassandra n'obtint pas de réponse à sa question. Peut-être s'était-elle trompée ? Mais la situation était vraiment bizarre. Elle décida alors de se concentrer sur les adoptions pour permettre à un chien, en plus du chat, de faire partie de cette nouvelle famille. Cet homme semblait être un adoptant idéal, presque parfait pour les animaux, elle se devait de lui trouver ce qui lui correspondrait le mieux. Et éviter le retour d'un des adoptés. - Les petits chiens peuvent être très énergiques mais effectivement, si vous souhaitez partir en jogging par exemple, il vaut mieux un chien de taille moyenne voir un grand chien. Ils pourront vous suivre plus longtemps.
Malgré leur énergie et leur attitude un peu folle, les petits chiens ont souvent des pattes trop courtes pour suivre sur la durée. Elle le laissa s'approcher de la cage et faire connaissance avec Pandora qui frétillait d'impatience. La réponse vis à vis des chaussures lui tira un large sourire.
- Oh, elle peut apprendre énormément de choses, c'est une chienne plutôt intelligente mais ouvrir un placard, à moins que ce ne soit de votre volonté...Vos chaussures devraient être en sécurité !
Finalement, l'homme se releva et se montra tout à fait différent dans son attitude, plus sérieux dans un sens. Et visiblement, il allait répondre à sa question. Elle l'écouta avec attention. Ainsi, il était le chef de la communauté Mawu. On lui avait un peu parlé de lui, mais le strict minimum toujours dans l'idée de garder le secret. Pourtant, elle le laissa continuer, croisant les bras comme si elle pouvait se protéger de ses questions, de sa curiosité. Pourquoi n'était-elle pas restée dans la communauté ? Voila une question bien vaste. Elle baissa les yeux, son regard se perdant sur la chienne qui s'était assise, comme si elle comprenait qu'il se passait quelque chose.
- Je...C'est une longue histoire. J'ai rencontré votre Renifleur il y a quelques années...
Pouvait-elle parler de la prison où il était venu la rencontrer suite à un message d'un gardien lui-même Mawu ? Non, elle ne le ferait pas. Il finirait bien par l'apprendre s'il se renseignait sur elle.
- A vrai dire, je n'ai...pas vraiment eu le temps...de faire partie des vôtres...Je ne connais pas grand monde de votre communauté. Ils essayaient de m'aider...mais il s'est passé beaucoup de choses entre temps.
Elle regarda autour d'elle, soudainement, inquiète. Et si quelqu'un l'entendait ? Et si quelqu'un rapportait ses propos aux vampires ? Elle ne pouvait se le permettre, pas après tous les sacrifices qu'elle avait du faire pour reprendre ce travail.
- Les événements ont fait que...que je n'ai pas pu continuer...mais je ne peux en dire plus. Mais...je m'appelle Cassandra Lewis, peut-être que certains pourront...vous expliquer...certaines choses...
Elle avait murmuré sur la fin, vérifiant même où en était le soleil. Elle avait encore du temps avant qu'il ne se couche. Il n'y aurait donc pas de vampires dans les environs. Mais après tout, elle n'avait rien révélé. Même si elle ne fermait pas la porte à Dougal, il allait devoir chercher parmi les siens s'il voulait plus de réponses. Et peut-être qu'ils pourraient se revoir...peut-être que son apprentissage pourrait reprendre finalement ? Ils lui avaient dit que ça lui éviterait d'avoir de nouveaux des ennuis...même si elle avait encore beaucoup de mal à comprendre que ce qu'elle ressentait était bien lié à un don. Elle avait toujours cru que cela faisait parti d'elle, c'était tellement naturel ! Elle décida de s'approcher de la cage, comme pour clore la conversation. Elle avait peur du résultat si elle en disait trop. Elle ouvrit la porte, laissant la chienne sortir, lui faire un câlin rapide puis s'approcher de l'homme, sautillant tout autour et jappant joyeusement, attendant qu'il s'intéresse à elle. - Désirez-vous l'emmener se promener ? Ainsi, vous pourrez voir comment elle se comporte en dehors d'ici. Comme je vous le disais, elle a encore beaucoup à apprendre, elle tire un peu sur la laisse mais elle fait beaucoup de progrès tous les jours. Depuis peu, elle répond au rappel.
Raison pour laquelle elle ne l'avait pas bloqué dans la cage pour des présentations sans grillages. Pandora ne risquait pas de s'enfuir, même si Cass avait beaucoup de questions en tête et bien du mal à se concentrer sur l'adoption.
Voilà donc qu’elle confirmait les pensées du vieil homme : cette femme faisait partie de la communauté Mawu, au moins indirectement. Mais cela… Cela ne fit qu’accentuer le nombre de question que l’homme pouvait se poser. Il restait néanmoins tout à fait neutre, ne faisant qu’observer la jeune femme de manière douce et compréhensive, car c’était là ce dont elle semblait avoir besoin. Son prénom fut néanmoins noté de façon claire dans son esprit. Cassandra Lewis. Oui… Cela lui disait quelque chose. Une jeune femme qui avait disparue des radars bien rapidement sans que les siens ne puissent la retrouver. Une situation particulièrement rare, il était vrai, mais une situation dont l’issue était rarement, normalement, positive. Ainsi, Dougal voyait une chose importante à cet instant : la jeune Lewis était vivante et semblait en bonne santé. C’était là l’une des choses les plus importantes. Pour autant… Une chose le tracassait. Une chose n’était pas normale. Elle semblait inquiète, regardant autour d’elle. Les sourcils légèrement froncés, l’homme acquiesça néanmoins.
- Nous vous avons cherché, Miss. Dit-il alors. Je suis au moins heureux de savoir que vous êtes en bonne santé.
Pour le reste… Dougal savait une chose, il ne pourrait décemment pas la forcer à parler. Pour autant, ce quelque chose inconnu le taraudait. Quelque chose n’allait pas. Serait-ce quelque chose en rapport avec ses visions ? Un instant, les vampires lui vinrent en tête. Était-elle en affaire hasardeuse avec quelques créatures de la nuit ? C’était une possibilité. Mais impossible de le vérifier. Ce furent ses prochains mots qui sortirent l’homme de ses pensées. La promener ? Un instant de silence, et son regard se posa sur la chienne toute sautillante autour de lui. Il ne put s’empêcher d’avoir un léger sourire attendri et acquiesça.
- Ne vous en faites pas. J’ose espérer que je serais capable de donner un bon dressage à tout chien ! Et quoiqu’il en soit je prendrais des cours avant !
La laisse mise et dans sa main, l’homme caressa la tête de la jeune chienne pour se rendre, avec la bénévole, à l’extérieur du refuge.
- Depuis combien de temps travaillez-vous ici ? Demanda-t-il alors. Vous avez l’air particulièrement proche de chaque animal. C’est agréable à voir.
Non qu’il eût réellement l’habitude de voir des bénévoles dans des refuges, c’était à vrai dire la première fois qu’il se rendait dans un bâtiment de la sorte. Mais cela restait malgré tout agréable à voir, aussi bien pour lui que pour les animaux. Et surtout pour les animaux, d’ailleurs. La chienne, comme prévu, tirait un peu, mais elle semblait, malgré tout, tout à fait obéissante et prompte à courir et jouer, un fait que l’homme appréciait particulièrement.
- Pensez-vous qu’il soit possible de la libérer pour la faire courir ? Je dois avouer que je peine à voir tous ces animaux enfermés. Et… L’homme se mit à rire. J’aimerais pouvoir tous les adopter ! Il se tut alors quelque peu pour réfléchir. Ne vous forcez pas à répondre, bien sûr. Je n’ai malheureusement pas eu connaissance de votre pouvoir, mais quel est-il ? Et seriez-vous prête à reprendre votre apprentissage ?
Deux questions qui lui étaient nécessaires pour espérer de la revoir au sein du clan Mawu, une idée qui peinait à le quitter aux vues des visions qu’il avait pu avoir.
Alors que Cassandra tentait d'expliquer sa situation, enfin ce qu'elle pouvait en dire, Dougal finit par avouer qu'ils l'avaient cherché. Elle le regarda, surprise, ne s'attendant pas du tout à une telle révélation. Personne ne s'était ainsi inquiété pour elle, jamais. Elle en était émue, mais s'en voulait énormément. Elle baissa alors les yeux.
- Je...Merci et...désolée...je n'ai pas pu...vous prévenir...
Et elle ne pouvait pas signaler qu'elle était de retour quand elle avait pu reprendre son travail au refuge. Les vampires la surveillaient de près, et elle était persuadée qu'ils la surveillaient encore maintenant. Ils ne faisaient jamais totalement confiance à leurs esclaves. En tout cas, l'homme accepta de revenir à sa raison première pour sa présence ici, c'est à dire la petite chienne qui sautillait autour de lui, dans l'espoir d'attirer son attention. - C'est une très bonne idée les cours, ainsi vous aurez de bonne base quand elle arrivera et puis, vous pourrez continuer ensemble. C'est une bonne façon d'apprendre à vous connaître et à vous apprécier mutuellement, sans oublier que ce sera un espace sécurisé où elle pourra se défouler.
Cassandra encourageait toujours les adoptants qui souhaitaient prendre des cours. En attendant, elle prépara la petite chienne qui s'assit, la queue s'agitant dans tous les sens. Elle avait hâte, c'était évident et Cassandra n'arrivait pas à lutter contre ses émotions, sentant la joie et l'allégresse de l'animal devenir sienne. Résultat, un large sourire s'afficha sur son visage. Ils sortirent du refuge et Pandora se mit à tirer sur la laisse en quête de la moindre odeur. - Il n'y a que quelques mois que j'ai repris !
Et cette fois-ci, le bonheur qui transparaissait dans sa voix ne venait pas uniquement de la chienne. Elle était heureuse ici.
- Mais j'ai un avantage avec tous ces animaux. J'ai une certaine empathie pour eux, je ressens ce qu'ils ressentent et ainsi, ils me font plus facilement confiance !
Sauf qu'elle ne faisait pas la différence entre les émotions transmises par les animaux et donc son don et les siennes. Résultat, là tout de suite, elle avait beaucoup de mal à réfréner son comportement, un peu trop joyeux soudainement...ce qui faisait qu'elle parlait beaucoup plus librement. Même de son don. L'homme proposa alors de libérer Pandora pour la voir courir. Elle hocha la tête, l'incitant à le faire. Elle était présente pour la rappeler au cas où. Elle admira alors la chienne qui courait tout autour, ravie de pouvoir se défouler, renifler la moindre odeur intéressante, la queue en l'air et frétillante. Dougal reprit alors la parole. Elle se tourna vers lui.
- Je ressens les émotions des animaux m'entourant. Vos collègues ont appelé ça "empathie animale", mais j'avoue avoir du mal à voir ça comme un pouvoir quelconque...Pour moi, c'est naturel. Mon frère disait souvent que j'étais juste plus sensible que la moyenne...
Elle laissa le silence planer, ne répondant pas tout de suite à la question de l'apprentissage. Son regard se perdit à nouveau sur Pandora qui jappait joyeusement, passant entre eux deux, comme si elle avait sentit le malaise. Aussitôt, Cass retrouva son sourire. - Vos collègues disaient que ça m'éviteraient de nouveaux ennuis...J'avoue que ça me plairait bien. Je ne veux pas perdre mon emploi. Mais je...je ne sais pas si c'est vraiment une bonne idée...
Elle se mordit la lèvre inférieure. Pandora s'était éloignée, permettant ainsi à ses propres sentiments de reprendre le dessus. Et à cet instant, elle était partagée entre la joie et l'inquiétude. C'était dangereux, très dangereux. Elle était presque totalement sure que les vampires n'approuveraient pas. Ou alors, elle allait devoir être plus maligne qu'eux sans outrepasser leurs règles...Difficile mais possible. En tout cas, elle se perdait dans ses réflexions. Elle avait bien envie de faire partie de ce groupe, de cette famille qui semblait s'être inquiétée pour elle...bien plus que sa mère ou son frère.
L’homme secoua la tête, un air apaisé et un léger sourire aux lèvres.
- Allons, Miss. Ne vous excusez surtout pas. Il esquissa un large sourire. Nous avons tous des empêchements, n’est-ce pas ?
Revenant sur le but premier de la visite, Dougal hocha la tête aux dires de la jeune fille. Il ne prendrait certainement pas de chien sans cours, c’était un fait. La raison était simple. Il estimait que, comme pour les plantes, l’éducation et l’élevage des animaux était une chose qui n’était innée, une chose qu’il fallait apprendre et maîtriser pour devenir un bon maître. Qui plus est, le Mawu ne connaissait malheureusement pas tous les animaux des Mawu et si cet animal aurait bien des amis au village, élargir son cercle de connaissance serait tout aussi bien pour lui. L’homme arqua un sourcil à sa réponse en suivant la jeune femme jusqu’au dehors du refuge.
Une question bien loin d’être innocente, bien entendu. Le Mawu désirait connaître ce qui avait pu lui arriver. Rares étaient les apprentis qui disparaissaient de la sorte sans laisser de trace. Et plus rare était encore les fois où l’on pouvait les rattraper. Néanmoins, une chose était certaine. Elle était heureuse. Et c’était tant mieux. Et voilà une autre chose qui compléta son puzzle : son don. Ainsi cette jeune femme était-elle empathique envers les animaux. Un don qui pouvait aussi bien être un avantage qu’un inconvénient dans un endroit que celui-ci. Défaisant la laisse de la chienne, Dougal l’observa alors, heureuse à courir et à se défouler. Bonheur visiblement partagé par la jeune femme qui se prit alors à lui expliquer son don plus en détail.
- Vous savez, reprit-il le sourire aux lèvres à la vue de ces deux êtres heureux. Pour beaucoup de personnes de notre communauté, le don est vu comme quelque chose de naturel. Notre don fait partie intégrante de nous-même, rares sont les personnes qui le voit comme un parasite. Encore plus lorsque votre don est aussi enfoui, touchant au cœur même de ce qui fait de nous des êtres humains : les émotions.
Quant à la question de l’apprentissage… La jeune femme semblait alors troublée, sans que le vieil homme ne puisse mettre le doigt sur ce qui n’allait pas. Un trouble qui, alors, bien vite disparu alors que Pandora faisait de nouveau irruption entre eux. Hochant la tête, Dougal observa la chienne gambader plus loin dans la nature tandis que Cassandra semblait s’assombrir.
- L’apprentissage évite bien des ennuis, je peux vous le confirmer. Dit-il calmement. Mais pourquoi perdriez-vous votre emploi sans cela ? Avez-vous quelques problèmes avec votre don ?
Autre chose le déstabilisait alors. Pourquoi diable l’apprentissage ne serait-il pas une bonne idée ? Voilà bien une chose que jamais on ne lui avait encore dit, et cela le rendait quelque peu… Perplexe. Y avait-il eu des heurts ? Des soucis lors de ces apprentissages ? Jamais il n’avait été mis au courant… Cela l’étonnait donc… Bien des mystères entouraient cette jeune personne, des mystère qu’il lui faudrait visiblement percer pour pouvoir l’aider comme il convenait.
- Pourquoi ne serait-ce donc pas une bonne idée ? Demanda-t-il, ainsi. Avez-vous une quelques ennuis avec d’autres membres de la communauté ? Ou votre famille ?
L’homme savait que bien des familles n’ayant pas connaissance de la communauté, rechignait à y placer leurs enfants. Peut-être avait-ce été le cas ? Seule sa réponse pourrait ainsi l’éclairer, mais une chose était sûre, et la jeune femme, sûrement, pouvait-elle le sentir. Il n’abandonnerait jamais l’une des siennes sans réponse à ses questions.
L'homme se montrait très aimable, très rassurant même alors que Cassandra s'en voulait de leur avoir fait faux bond de cette manière. Mais après tout, peut-être était-il habitué à ce genre de situations ? Quoiqu'il en soit, elle ne répondit pas, pas verbalement en tout cas, se contentant de se mordre la lèvre inférieure. Elle ne pouvait en dire plus, ce serait trop risqué. La moindre information compromettante pouvait lui coûter la vie. Alors, elle préférait se taire.
Ils continuèrent la rencontre avec la petite chienne, même si Cass sentait bien que l'homme en profitait pour l'interroger. Elle soupira à sa question et choisit de répondre cette fois-ci, à voix un peu plus basse.
- Je n'ai pas...vraiment choisi de m'arrêter. Ou de ne plus voir les votre.
Elle leva les yeux et croisa alors ceux de Dougal, sachant très bien que son regard s'était fait...effrayé en cet instant. Comme un lapin pris au piège. Elle détourna finalement le regard et se concentra sur Pandora qui profitait de sa promenade inopinée, n'hésitant pas à revenir faire la belle devant le duo. Néanmoins, cette émotion la quitta bien vite, remplacée par celles du canidé, ce qui lui faisait un bien fou finalement. Un très bon échappatoire à ses peurs. - C'est justement ça le problème, comme il s'agit de mes émotions...ou des leurs, j'ai du mal à croire qu'il s'agit vraiment d'un don...Je ne remets pas en doute vos paroles, vous êtes bien plus experts que moi là-dedans mais j'avoue que...que j'ai du mal à y croire.
Aussi loin qu'elle s'en souvienne, elle ressentait les émotions des animaux aussi fortement que les siennes et ne s'était jamais posé de questions. Enfin, pas depuis que son aîné ait fini par lui dire qu'elle était simplement plus sensible que la moyenne et que ce n'était rien... En tout cas, elle appréciait grandement qu'il se montre ainsi à l'écoute et sans aucun jugement. Elle avait l'impression d'avoir enfin trouvé quelqu'un qui lu montrait un minimum de considération. A ses risques et périls. Mais comment pourrait-il savoir ? Il posa alors de nouvelles questions, tout à fait logiques dans cette situation mais qui mettait en difficulté Cassandra. Elle ne savait que répondre. Le silence risquerait de l'intriguer plus, voir de l'inciter à pousser plus loin ou à se mettre en danger pour obtenir ses réponses. Elle devait trouver une parade. Lui faire comprendre qu'il ne pouvait pas savoir. Mais d'abord, elle devait commencer par le rassurer...autant que possible.
- Votre communauté a toujours été adorable avec moi. Et ma famille...je n'ai pas de liens avec eux depuis...depuis quelques années maintenant. Je crois que je leur fais honte, tout simplement. Et je ne veux pas perdre mon emploi...Ce que vous appelez mon don m'a...poussé à faire des choses à une époque. Il y avait un laboratoire qui expérimentait sur les animaux...je n'ai pas supporté cette souffrance et j'ai...agi. Je me suis faite prendre.
Elle baissa les yeux, fixant alors le sol. Elle était consciente que son discours était un peu confus mais elle n'aimait pas vraiment parler de cette époque. Néanmoins, il devrait aisément comprendre que son empathie animale l'avait poussé à faire une énorme connerie qui avait très mal terminé pour elle.
- J'ai fais de la prison...
Elle avait prononcé ces quelques mots dans un souffle. Mais maintenant que c'était dit, elle était comme soulagée d'un poids bien qu'il en restait un autre. Comment allait-il réagir ? Allait-il garder sa communauté loin d'elle désormais ? Est-ce que ce ne serait pas mieux, finalement ? Elle ne savait pas. Elle désirait ardemment un endroit où elle se sentait bien mais avait peur avec les vampires qui lui rodaient autour. - Je crois que...votre communauté...ne peut rien pour moi...
Les mots étaient sortis tout seul et peut-être un peu brutalement mais Cass était persuadée que l'emprise des vampires était totale. Elle n'aurait aucune échappatoire. Elle leur appartiendrait jusqu'à ce que la mort l'accueille. Et elle ne pensait pas que ce moment soit si loin que cela. Elle sentit alors une larme couler sur sa joue et se rendit réellement compte à quel point cette situation la faisait souffrir. Jusque là, elle avait réussi à tout cacher au fond d'elle-même, à trouver des avantages à sa vie...mais là tout de suite, elle se prenait tous les désavantages en plein visage. Et cela faisait mal.
- Pandora !
Sa voix était brisée, signe qu'elle était sur le point de pleurer. Elle ne pouvait pas partir en courant alors elle n'avait plus qu'une seule solution : la chienne. Cette dernière vint aussitôt en entendant son prénom. Cass s'accroupit et la réceptionna dans ses bras, la serrant contre elle. Pandora était plus calme qu'auparavant, se laissant faire et cette sérénité fit un bien fou à la jeune femme. Elle laissait les sentiments de l'animal l'imprégner totalement. Ainsi, elle retrouvait son calme, son sang-froid apparent et refoulait au plus loin tout le reste. Tout ce qu'elle ne pouvait se permettre de montrer.
Dougal fronça quelque peu les sourcils. Quelque chose n’allait pas avec cette jeune femme. Bien au contraire. Son comportement, cette voix basse pour répondre aux questions… Ce regard effrayé. Quelque chose n’allait pas, et il n’arrivait pas à mettre le doigt dessus. Ou presque. L’on aurait dit…
- Quelqu’un vous a-t-il empêché sous la menace de continuer ? Demanda-t-il à voix tout aussi basse.
Au moins son don avait-il l’avantage de l’éloigner des mauvais sentiments dans des cas pareils. Le vieil homme laissa échapper un léger soupir en la sentant soudain plus calme et hocha la tête. Le sentiment du non don était une chose bien courante qu’il croisant très souvent au sein même de la communauté. Ainsi reprit-il des plus sérieusement.
- C’est tout à fait normal. Chez certains le don va être brutal, c’est une chose qui va s’imposer soudainement à eux, cela leur permet de comprendre la chose telle qu’elle. Mais chez d’autre, comme chez vous, cela est plus insidieux, vous ne le sentez pas réellement arriver et le voyez depuis toujours comme une aptitude naturelle. Et je ne dis pas que cela n’en est pas une, bien entendu. Mais c’est effectivement un don. Un don unique qui fait de vous quelqu’un d’unique.
Le Mawu esquissa un large sourire lorsque Cassandra complimenta la communauté. C’était, à vrai dire, une chose à laquelle il avait toujours veillé : l’intégration de chaque personne, quelle qu’elle soit. Bien sûr y avait-il eu des ratés, mais ce n’était pas là la grande majorité, fort heureusement. Le sourire se perdit quelque peu lorsqu’elle continua de parler. Elle avait « agi ». Il ne fallait pas être devin pour comprendre ce qu’elle avait fait. Esquissant un nouveau sourire désolé, l’homme hocha alors la tête. Il comprenait.
- Je ne vous jugerais pas sur le pourquoi et vos agissements, mais c’est une chose que je peux comprendre. Tant en tant que chef de la communauté qu’en tant que possesseur de don, moi-même. Mon propre don m’a souvent poussé à faire des choses inimaginable pour protéger les autres. Voyez-vous. Je suis capable de voir l’avenir, ou tout du moins les avenirs potentiels, des personnes que je touche. Vous comprendrez que je peux donc imaginer la souffrance que de connaître la douleur de l’autre, humain comme animal, ou que je sais imaginer ce qui peut les attendre.
En parlant de vision… L’homme doucement les sourcils tandis que la voix de la jeune fille se cassait. Sans un mot, il la laissa se calmer, enlaçant l’animal. Entourée d’amie, entourée de la communauté, entourée de vampire. Ses trois visions concernant cette jeune personne. Et une seule question.
- Êtes vous amie ou connaissez-vous des vampires ? M’enquis-je en me baissant à son niveau et à voix basse. Ecoutez, Cassandra. Nous pouvons vous protéger. Si quelqu’un vous empêche de vivre en tant que Mawu, nous pouvons tout faire pour vous aider. Mais pour cela il va me falloir des explications. Ma communauté est soudée, et jamais nous ne laissons l’un des nôtres sans aide. Mais il me faut votre coopération.
Rapidement, Dougal sortit une carte de sa poche et la tendit à la jeune femme. Téléphone professionnel, personnel et adresse de son bureau s’y trouvait alors. Pas l’adresse de la communauté, bien entendu, pour une question de sécurité.
- Appelez-moi, je viendrais immédiatement et accompagné s’il le faut. Esquissant un sourire encourageant, j’observai alors Pandora. Et je crois que la Miss pourrait être heureuse avec moi, qu’en pensez-vous ?
Cassandra tentait d'expliquer sa situation à Dougal sans trop en dire. Il semblait gentil et avoir une certaine importance pour son groupe...Elle ne voulait pas que les vampires s'en prennent à lui. Mais lui, semblait décider à vouloir l'aider. Tout en l'interrogeant. Elle leva les yeux vers lui et grimaça en entendant sa question.
- Oui...et non...C'est plus compliqué que ça...
En effet, les vampires ne lui avaient pas franchement interdit de revoir les Mawus mais ils contrôlaient toute sa vie...Et elle n'était pas sure qu'ils apprécieraient ce genre de visites. Non clairement, ce serait dangereux...pour tout le monde. Alors que la petite chienne passait à leurs côtés, Dougal expliqua alors de nouvelles choses à propos des dons, ce qui permit à Cass de comprendre un peu mieux la situation. Sa situation.
- Effectivement...Je comprends mieux...Mais...tout ce que je veux...c'est ne pas recommencer les mêmes erreurs...
Retourner en prison parce qu'elle n'avait pas su contrôler la souffrance que lui envoyaient tout un tas d'animaux enfermés dans un laboratoire. Elle avait payé sa dette, s'en était acquittée parce qu'elle n'avait pu supporter toute cette douleur. Mais contre toute attente, Dougal ne la jugea pas pour son passé de criminel, admettant même qu'il comprenait pourquoi elle avait agi ainsi. Elle le regarda, réellement surprise. Il était le seul à ne pas la juger, en dehors peut-être de ses employeurs qui ne jugeaient jamais les anciens prisonniers. Mais rapidement, elle s'était retrouvée au bord des larmes, à serrer Pandora pour tenter de s'apaiser. La chienne se laissa faire, ce n'était pas la première fois et elle adorait les câlins de toute façon. De façon totalement inattendue, l'homme lui demanda alors si elle connaissait des vampires. Elle se raidit aussitôt, ce qui fit couiner Pandora, la rappelant à l'ordre. Elle la serrait un peu fort. Elle enfouit son visage dans les poils de la chienne, tout en écoutant les propos de Dougal.
- Ne faites pas ça...Ils vont vous tuer...
Elle finit par relever les yeux, cherchant le regard de celui qui cherchait à l'aider. Malgré son don et la présence du canidé, sa peur était suffisamment forte pour se refléter au fond de ses yeux. Elle prit néanmoins la carte, preuve qu'elle n'était pas totalement fermée à son aide, mais elle ne voulait pas avoir sa mort sur la conscience.
- C'est beaucoup trop dangereux...mais je...merci. J'apprécie l'offre.
La conversation revint alors sur Pandora, qui désormais libre de son étreinte, revint voir Dougal. Elle les observa un moment, inspira longuement puis reprit son sourire...tout à fait commercial en cet instant. Il était factice mais elle ne devait pas paraitre déprimée. Elle hocha alors la tête. - Bien sur, retournons au refuge et nous allons nous occuper de l'adoption de vos deux nouveaux protégés ! Souhaitez-vous repartir de suite avec Pandora, ou la réserver le temps de protéger votre jardin ?
Elle le laissa rattacher la laisse au collier puis le guida jusqu'au refuge. Elle remit la chienne dans son box avant d'inviter le nouvel adoptant à la suivre jusqu'au bureau. Le chat qu'il avait choisi l'attendait, dans sa caisse de transport et ses papiers à lui étaient déjà prêt. Elle s'installa derrière l'ordinateur, l'invitant à prendre place en face puis s'attaqua à la procédure concernant la chienne. Elle remplit divers formulaire qu'elle présenta ensuite à Dougal, ainsi que la facture pour cette double adoption...ou une facture moins élevée s'il souhaitait d'abord réserver le canidé et la récupérer plus tard. Elle sortit alors les carnets de santé et les posa sur le bureau, le laissant vérifier s'il le souhaitait...mais elle n'avait pas menti, les tests et la stérilisation avait été effectué. Les animaux étaient en pleine santé.
- Et voila, merci à vous pour cette double adoption, vous avez fait deux heureux et je suis sure qu'ils seront vraiment bien avec vous, vous semblez être un homme bien.
Et cette remarque n'était pas adressée uniquement à cause des animaux. Mais aussi pour ce qu'il avait fait pour elle aujourd'hui. Le chat dans la caisse miaule en cet instant, pour exprimer son agacement, tout cela devenait long pour lui.
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