Un cours de piano. Après lui avoir bourré le crâne pour qu’il ait le niveau bachelor avec des tonnes de cours, fallait qu’elle lui demande aussi de pouvoir faire le pianiste. Le téléphone de Jay le lui avait rappelé en vibrant. Il fallait qu’il tire son cul de son lit, le recouvre avec des vêtements corrects sous peine de se reprendre une claque pédagogique derrière la tête, et qu’il le traîne jusqu’au salon. Parce qu’il était dans un bon mood, avec un rap tranquille et reposant, à regarder le plafond vautré dans son matelas. Mais il se leva, comme un bon garçon. Déjà parce que depuis qu’il était arrivé, même en faisant sa tête de con, on l’avait pas lâché. Et c’était assez étrange, parce qu’il essayait toujours de repousser l’échéance et de ne se rapprocher de personne. Il faisait ses trucs dans son coin, et ne se mêlait pas trop aux autres. Mais personne ne le rejetait pour autant. Même, on le mettait bien. Ce truc bizarre qu’il n’arrivait pas à comprendre. Amelia surtout. Elle s’occupait de lui. Ça il comprenait pas. Parce que personne l’avait fait avant. Obligé de grandir seul sans le moindre repère, si ce n’est qu’une bonne tarte dans la gueule te fait te taire. Ou que le crack ça te pourrit la gueule. Mais quand elle lui tirait l’oreille, ça avait plus de poids qu’une mandale de son père, même si ça faisait moins mal. Il avait caché sa joie quand elle était revenue au manoir après avoir disparu. Il avait étouffé sa honte de pas avoir capté ce qu’il se passait ou d’avoir été aussi utile qu’un portemanteau dans un congrès d’exhibitionnistes.
Pour une fois Jay s’était correctement habillé. Un pantalon bien ajusté, une chemise propre. C’est que le piano c’est classe, alors faut un minimum d’allure. Il n’était pas non plus fringué comme un concertiste, mais au moins il avait pas l’air d’être entré dans un placard et d’être sorti avec ce qui était resté accroché sur lui comme un rappeur en quête d’identité visuelle. Pas trop mal, pas non plus paré à monter sur scène dans un opéra. On joue du piano dans les opéras ? Il haussa les épaules, et se dirigea dans le salon en chantonnant les paroles d’une vieille chanson de Roddy Rich. Il appréhendait le moment où il allait se retrouver devant le clavier avec toutes ses touches blanches et noires. Quand il composait dans son ancienne vie, il utilisait sa guitare pour dicter les notes des mélodies. Et la maquette sortait assez proprement pour que la boîte de production en fasse un truc plus concret. Il poussa enfin la porte pour arriver devant Amelia. En regardant sa montre il se rendit compte qu’il n’était pas tout à fait à l’heure, mais c’était loin du drame. Genre trois minutes à tout casser.
« Yooo, j’suis pas trop en retard ou tu vas encore me tirer l’oreille, demanda-t-il en prenant place sur la petite banquette devant le piano et croisant les jambes. Je me vois mal utiliser ce truc, ça fait trop distingué pour moi. Mais ça va m’aider à choper au moins ? »
Jay ricana doucement en croisant les bras avant de regarder Amelia sans perdre son sourire d’imbécile heureux. Mais au fond il savait qu’il aurait beaucoup de mal à rester aussi calme. Pour avoir gratté une guitare presque toute sa vie, il avait du mal à se voir faire de la musique avec un objet aussi étrange que celui-là. Ça ne lui semblait absolument pas naturel, de la posture à la position des mains.
« Aïe. Du coup j’sais quand même lire une partition, mais pas comment la jouer avec ce truc là. C’est quoi le Do la dessus, hein ? »
S’il y avait bien une chose à laquelle je faisais attention depuis que j’étais devenue la meneuse du clan à Londres, c’était à chacun des vampires dont j’avais la charge. L’on m’avait présenté le clan comme une famille, et jamais je n’avais dérogé à cette règle depuis. Chaque vampire était important pour la famille, chaque recrue qu’Aedan pouvait m’amener aussi. Je ne le comprenais pas toujours immédiatement, certains me laissant quelque peu perplexe, mais je ne faisais, malgré tout, aucune différence entre les membres. Du moins la plupart du temps. Les rôles, au sein de la famille, avaient été clairement définis entre Aedan et moi. Il s’occupait des missions et des entraînement à ceux-ci, je m’occupais du reste et donc du manoir et de ses occupants, un bien pour eux, à vrai dire, leur second chef n’ayant certainement pas la patience dont je faisais preuve au quotidien. Jeremiah, lui, n’était pas arrivé depuis très longtemps, il était, pour ainsi dire, le dernier à avoir intégré le clan. Choix de mon époux, il allait sans dire. Et je devais avouer que ce choix avait fait partie des choix que je ne comprenais pas. Mais comme pour tous les autres, je l’avais accepté et aidé dans sa vie au manoir, autant que je le pouvais tout du moins. Pour tout avouer, son comportement m’avait sûrement demandé bien plus de patience que bien des membres de cette famille. Nonchalant, l’air abruti et plutôt provocateur, je ne comptais plus le nombre de fois où l’envie de le faire passer par la fenêtre m’avait traversé l’esprit. Une chance pour lui, je n’en avais rien fait. Et aucun de ses nouveaux frères et sœurs non plus. Dans mon cas, j’avais trouvé un certain angle d’attaque pour l’atteindre : la connaissance. Il était vrai que cette dernière était une chose très importante pour moi, au premier plan, pour ainsi dire, alors si Aedan s’occupait de leurs muscles, je m’occupais de préférence de leur cerveau, ainsi avais-je commencé à donner quelques cours à Jeremiah, de mathématiques, d’histoire, de littérature… Tout, à vrai dire, y était passé. Sûrement étais-je d’ailleurs particulièrement dure avec lui lors de ces séances, n’appréciant pas l’imperfection, mais il s’était accroché. C’est d’ailleurs peut être à ce moment là que je revis mon jugement quant à sa personne. Jay était intelligent, il allait sans dire, abruti, certes, mais intelligent et il était d’ailleurs aujourd’hui prêt à obtenir un bachelor en littérature américaine, ce sur quoi je m’étais d’avantage concentré, s’il le désirait, bien entendu. Il n’aurait, après tout, qu’à revenir me voir s’il souhaiter passer un bachelor en particulier. Enfin. Cette fin de matinée, ce n’était pas un cours de géographie ou de langue qui l’attendait mais bien un autre type de leçon bien particulier. J’avais pu entendre Jay jouer une fois de la guitare, et force avait été de constaté que le garçon se débrouillait particulièrement bien sur cet instrument, c’était donc avec un certain enthousiasme, quoique tout à fait retenu par mon caractère, que j’étais allé lui proposer d’apprendre un nouvel instrument, le seul instrument, d’ailleurs, que je maîtrisais entièrement : le piano.
Et comme à son habitude, Jeremiah était en retard. De deux minutes trente précisément. Je plissai les yeux en le voyant arriver prendre place sur la banquette du piano, sans un mot. Ou presque car je ne pus me taire indéfiniment.
- Apprend déjà à te taire et arriver à l’heure précise, grondai-je en lui assénant un coup derrière la tête. Tu seras plus agréable.
Soupirant, j’attrapai une chaise pour me positionner à ses côtés, lui laissant entièrement la banquette pour observer son comportement. Bien… Très bien… Il y avait tout à revoir, cela ne faisait aucun doute, et cela, d’ailleurs, ne m’étonnait même pas.
- Ce « truc-là » s’appelle un piano. Rappelai-je en fronçant les sourcils. Et nous verrons les touches plus tard. D’abord fais moi le plaisir de te tenir droit et décroiser tes jambes. Un « léger » coup bien placé dans son dos, et je l’obligeai à se redresser. Est-ce que tu joues avachi sur ta guitare ? Non. Alors c’est exactement la même chose. Les deux pieds posés par terre, le dos droit et les mains sur le clavier. J’esquissai néanmoins un très léger sourire. Et je pense donc que tu seras capable de me trouver le do tout seul, n’est-ce pas ? Mais avant…
Je me levai pour ouvrir le piano. J’avais fait installer un piano à queue dans la bibliothèque et il allait pouvoir nous servir dans son entièreté.
- Regarde.
Je lui fis signe de se pencher au-dessus de l’instrument afin d’en observer les organes.
- Le piano ne diffère pas énormément de la guitare, en un sens. Repris-je. Les note sont frappées, comme tu grattes tes cordes. J’appuyai sur une touche au hasard pour voir le marteau frapper la corde. La sensation est différente, mais c’est exactement le même principe. L’invitant à se rasseoir, je repris place sur la chaise. Le piano que nous avons au manoir est dit à queue, tu auras toute les notes possibles sur un clavier, c’est ce qu’on appelle la tessiture. Comme pour la guitare, tu joueras aussi bien avec la main gauche que la main droite. Je plissai quelque peu les yeux. Tu sais lire une partition… Certes, mais quelle clé exactement ? La guitare n’utilisant que la clé de sol, connais-tu la clé de fa ? Et avant de toucher au piano, j’aimerais aussi connaître tes connaissances en solfège pur. Pourrais-tu me citer au moins quatre figures de notes et leur valeur par rapport à une noire ? Ainsi que deux figures de silence et leur valeur par rapport au soupir ?
Sa tête recula un peu, et son visage portait une petite expression indignée. Il était toujours agréable, enfin presque. Au moins pendant les cours du soir. Ou peut-être pas. Il ne savait plus, mais il gardait sa petite tête d’élève grondé à tort par son professeur mais qui n’osait pas faire d’objection de peur de prendre plus cher. D’ailleurs, le professeur était sévère ce soir aussi. Au fond il avait en avait besoin, sinon il ne se plierait pas au cours. Et puis Amelia était sévère, pas injuste. Jeremiah poussa sur le banc avec les mains en décroisant les jambes et redressa son dos. Le corps en équerre bien droit, bien propre. Comme un bon élève.Il ne serait pas là si le piano ne l’intéressait pas non plus. Ses mains se tinrent au dessus du clavier, pour venir s’y poser avec délicatesse, sans y mettre assez de poids pour enfoncer les touches. Il ne faisait que les effleurer. Il les regardait avec une certaine appréhension quand même. Ça lui semblait particulièrement vaste, il y en avait beaucoup. Sur sa guitare, y en avait peut-être autant mais ça lui paraissait beaucoup plus accessible. Beaucoup, beaucoup plus.
Jay suivit Amelia tout naturellement pour observer les entrailles de la bête. Le nombre de cordes et l’apparente complexité du machin le rebutait presque. Il y en avait partout, et même bien rangé, ça lui semblait être un fouillis monstre. Et tous ces petits marteaux là, qui vont taper à chaque fois qu’on touche au clavier. Presque trop complexe dans sa simplicité.
Le vampire haussa un sourcil interrogateur. Il fallait qu’il réfléchisse pour une fois. Sauf que la leçon était vieille de presque quinze ans.
« La clé de sol. Je lis une partition si c’est transcrit pour la guitare, autrement j’y arrive pas. On m’a juste appris à jouer de la gratte. »
Sans courber le dos, il ramena le dos d’une main dans la paume de l’autre, essayant simplement de se souvenir de ce qu’il aurait éventuellement pu apprendre quand ils avaient survolé le solfège avec son mentor. Il aimait le côté simpliste de la guitare, tu peux facilement en jouer sans être guidé par des gribouillis sur une feuille posée sous ton nez. Il commençait même à douter de sa capacité à aimer jouer de cet instrument.
« Euh… Les figures de notes ? Les rondes, blanches, noires, et les croches c’est ça ? Et genre, une blanche c’est trois noires. Non, la ronde c’est quatre noires. La blanche c’est deux noires. »
En pestant, il croisa les bras et prit une grande inspiration. Il avait l’impression que ça lui mangeait le cerveau. Des cours il en avait trop pris dans la tête ces derniers mois, pour pouvoir se souvenir d’une information assimilée il y a trop longtemps et jamais rafraîchie. Elle partait de trop loin. Et plus il réfléchissait plus la question d’Amelia devenait vague dans son crâne. Il était bien parti.
« La pause, quatre soupirs. La demi-pause, deux soupirs. Pu- mince alors, j’espère que j’ai bon parce que c’est dur. »
En parlant de soupir, Jay en laissa un fendre l’air devant lui, alors que ses épaules retombaient un peu sous la pression qu’il se mettait tout seul. Il hocha la tête, et reprit une posture plus propre. Ça allait être difficile, il s’en doutait et maintenant il s’en rendait vraiment compte.
« Avec la guitare c’est plus… simple. Même les tablatures je les trouve plus lisibles. J’m’en sors à merveille alors que je comprends à peine le solfège pour le piano. J’trouve ça beaucoup moins clair. » Sa tête se leva au plafond, et ses mains se mirent à bouger comme sur une guitare. « Je me sens plus libre en jouant avec la guitare. Quand j’ai un doute, je copie un autre qui le fait, et ça passe. »
Attentivement, je l’écoutai, observant le moindre de ses faits et gestes. Bien, la clé de fa allait devoir être alors apprise. Plus tard. Lorsqu’il serait plus à l’aise que ce qu’il semblait être. A moins que je me fasse là de fausse idée. Enfin. Nous pourrions rapidement le voir. La lecture d’une partition par contre… C’est une chose qu’il allait falloir rapidement voir. Il me semblait d’ailleurs, après tout ce temps passé derrière un piano que la partition était d’une grande aide pour l’apprentissage et la maîtrise du clavier. Les notes se suivaient, il était ainsi presque impossible de se tromper. J’esquissai alors un léger sourire satisfait. Il connaissait les bases du solfège, je n’aurais donc pas besoin de l’ennuyer avec tout cela. Un bien, à vrai dire, je savais cette matière des plus assommante, et je supposai donc que mon élève serait bien heureux de s’en passer. Il me semblait que ce dernier commençait à peiner de devoir rester assis sur une chaise à ne faire que m’écouter.
- Bien… Ponctuai-je à mi-voix
Je l’observai alors de nouveau, les sourcils froncés quoiqu’un léger sourire aux lèvres. Hé bien. Entre le soupir et ses mots… Nul doute que Jay n’était pas des plus à l’aise.
- Jay. Soufflai-je alors. Le piano sera difficile si tu te convaincs qu’il l’est. Ce n’est pas parce que l’instrument est différent de ce dont tu as l’habitude que tu vas peiner à l’apprendre. A nouveau je lui offris un sourire rassurant. Je ne dis pas que ce sera immédiatement évident, mais si tu as appris la guitare, quelle que soit ta méthode, je ne doute pas que tu réussiras à dompter les claviers de piano. Quant à copier… Je réfléchis un instant. A vrai dire, en apprenant le son des notes et leur emplacement, tu pourras facilement copier certaines musiques en t’entraînant.
Installant une partition des plus simples en face de lui, je pris place juste à côté de lui sur le banc, posant mes mains sur le clavier.
- Tu vois… Je commençai à jouer doucement de ma main droite. Une note sur le papier correspond à une touche sur le clavier. Une fois que tu auras appris à lire une partition comme celle-ci, tes doigts ne feront que suivre ta lecture, comme tes tablatures. Je cessai la musique en tournant le visage vers lui. Maintenant trouve moi un do sur ce clavier. Une fois que ce sera fait… Mmh. Tu dois connaître la chanson populaire Vive le Vent, non ? Essaie de me la jouer de la main droite. Teste toutes les notes que tu veux, mais essaie de me jouer le refrain.
C’était là l’une des musiques les plus faciles que je pouvais connaître et je me tenais, bien entendu, prête à l’aider dans sa recherche de note si jamais mon élève du soir, et des mois précédents, venait à le demander. En attendant, j’avais pris une partition vierge et notai la mélodie à la main, lisiblement, sans, pour autant, inscrire le nom des notes sous chaque figure. Et lorsque ce fut chose faite, je me levai afin de me positionner derrière lui et déposai la partition sur le piano, gardant mon stylo en main.
- Maintenant rejoue la même mélodie, doucement.
Et à mesure que Jeremiah appuyait sur les touches, je pointais la note en question sur la partition, penchée au-dessus de lui.
- Tu vois, repris-je en posant une main sur son épaule avant de reprendre place sur la chaise que j’avais installé là. La partition n’est que le reflet de ce que tu joues. Alors maintenant que tu as trouvé le do, et que tu as joué deux fois la mélodie. Peux-tu me donner le nom de chacune des notes et les noter sous les figures ? J’esquissai un sourire en me penchant doucement vers lui, l’air légèrement amusé. Et respire. Tu n’es pas à l’opéra, tu ne passes pas d’examen et je suis là pour t’aider et t'apprendre les choses, pas pour te juger. C’est inutile de te mettre une pression inconsidérée, Jay. Respire.
Un souffle court pour s’encourager, et il fit passer sa main de gauche à droite le long du clavier. En réfléchissant un peu, il imagina que toutes les notes étaient présentes sur le clavier pour chaque octave. Et ça expliquait pourquoi il y avait autant de touches. Ça encore, c’était pas trop compliqué à se représenter. Puis il avait suivi les doigts de sa professeure, en tendant l’oreille. Cette touche donnait ça, celle-ci donnait ceci. Donc, théoriquement, le do était là. Sauf que non. Il sentit comme une petite boule de honte ou d’embarras dans la gorge. Puis il en essaya une deuxième, mais c’était un ré. Il siffla silencieusement en pressant le do, la troisième fois. L’échec l’énervait toujours. Même pour une tâche des plus simples, comme trouver un do sur un clavier. Et c’était souvent la raison pour laquelle il ne s’essayait que rarement aux choses qu’il ne maîtrisait pas déjà.
Un souffle court pour s’encourager. Et se concentrer aussi. Parce qu’il commençait à être distrait dans sa petite tête. Donc, ça, c’était le do. Au moins à l’oreille il ne se trompait pas. Et aussi parce qu’Amelia ne le reprenait pas. D’ailleurs il avait jeté un petit regard interrogateur dans celui de sa tutrice, pour la validation. Du coup il hocha la tête, et logiquement toute l’octave était trouvée à partir de là. Et toutes les notes de « Vive le vent ». Il réécouta mentalement la mélodie, avant d’essayer de la retrouver sur le clavier. Les notes venaient, mais sans le moindre tempo. Elle s’enchaînaient sans rythme, marquant quelques petits silences le temps de la trouver sur le clavier. Et c’était… simple. Il regardait les sept touches, et pouvait superposer le nom de chaque note par dessus avec son imagination.
Il plissa les yeux en fronçant les sourcils. Donc, cette ligne là correspond à cette touche là. Et donc, appuyer sur la touche quand une note apparaît sur sa ligne. Il était tellement concentré sur sa feuille et ses doigts qu’il manqua une occasion de faire l’imbécile avec une remarque déplacée sur la proximité du corps d’Amelia. Grand bien lui en fit, de s’éviter une mandale plus sérieuse qu’à l’accoutumée. Jay apprenait sans baffes, et c’était très bien. Son sourcil se leva, et son visage portait une petite expression paumée. Encore un exercice. En même temps il était en cours, donc c’était normal, mais il avait l’impression d’être pris de court à chaque fois. La machine dans son cerveau se mit en route trop vite, et pas dans le bon sens.
« D’accord, d’accord. Pas d’pression. J’suis pas du genre à ressentir la pression quoi, j’ai l’habitude de jouer devant un public. Et le jugement des autres, j’en ai pas grand-chose à faire quoi, hein. Mais… ouais nan, aucun rapport. J’me tais. », dit-il en baissant le nez vers le clavier.
Et il prit un petit moment pour retrouver les touches qu’il avait utilisées pour jouer. Il avait réussi à les segmenter du reste du clavier et à se concentrer uniquement sur celles-là, mais changer la cible de sa concentration l’avait fait perdre ses repères. Il voyait une grande vague blanche sous ses yeux, bien trop vaste. Il repassa sa main sur le clavier et retrouva rapidement sa position en soufflant presque de soulagement. Donc, il reprit la chanson, mais cette fois en posant le stylo sous chaque touche sans la jouer. Et il commença à écrire sur la feuille. La première était un mi.
Mi mi mi, mi mi mi, mi sol do ré mi...
Ça commençait à avoir un peu de sens. Amelia avait raison, il sentait qu s’il prenait le temps d’apprendre et de pratiquer, il y arriverait finalement. Il oubliait déjà le fossé qu’il y avait entre jouer « Vive le vent » et Maurice Ravel. Du moins, il ne pensait pas encore à jouer ça. Il était juste content de comprendre et de passer outre l’appréhension qu’il avait pour l’instrument. Il leva les yeux vers sa tutrice avec un petit sourire fier, cherchant son approbation sur l’exercice.
« Du coup, si je comprends bien, ça c’est une octave », dit-il en couvrant sept touches entre son pouce et son auriculaire. « Donc là c’en est une autre, et la aussi… Les touches noires, c’est quoi ? Et pourquoi on a des touches qui sont… toutes seules ? ».
Attentivement, sans même cligner les yeux, je l’observai faire l’exercice, approuvant lorsqu’il semblait demander validation d’un seul hochement de tête. Jay était un élève tout à fait surprenant. Bien sûr, ce n’était là que les balbutiement d’un pianiste, une comptine à peine reconnue par le rythme, des notes appuyées sans réelle conviction autre que le désir de réussir un exercice. Pourtant, je reconnaissais en lui le désir d’aller au bout de ce que je venais de lui demander. Et… Il fallait m’avouer que cela me plaisait. Lui donner des cours me plaisait, c’était, même, à vrai dire gratifiant de le voir réussir ce qu’il entreprenait. Oh je ne me jetai pas de fleurs, il était le seul responsable de sa réussite, mais j’appréciais, justement, le voir réussir. Je ne pus, d’ailleurs, m’empêcher d’esquisser un sourire à sa remarque. Jay restait malgré tout… Jay. Avec ses réflexions, son regard perdu et son comportement bien trop souvent à la limite du raisonnable. Attentive aux moindres détails, je l’observai alors compléter la partition du nom des notes. Bien. C’était même particulièrement bien, et je devenais persuadée que l’apprentissage de cet instrument ne lui poserait que peu de difficultés. A vrai dire, la seule que je pouvais imaginer était sa façon de se tenir. Un léger appui de mes doigts dans son dos, et je le redressai parfaitement sans un mot, seulement un sourire amusé.
J’hochai alors la tête.
- C’est cela. Tu as sept octaves et quart sur le piano, soit quatre vingt huit touches. En utilisant des termes techniques, les cinquante deux notes blanches correspondent aux sept notes de la gamme diatonique de do majeur. Ce qui signifie donc sept tons, des notes, se suivant du plus grave au plus aigu en commençant par le do et qui se répète de façon cyclique. J’appuyai sur les notes de deux octaves. Comme ici. Pour ce qui est des touches noirs, ce sont des demi-tons, des notes intermédiaires si tu préfères qui sont obtenues par altération. Je réfléchis quelques instants afin de simplifier ces mots. Elles sont en fait obtenues en modifiant la hauteur de la note, pour la rendre plus aiguë, avec les dièse, que je dessinai sur le papier, ou plus grave, avec les bémols, je fis de même avec le signe.
Doucement, une à une, je passai l’échelle chromatique en revue, appuyant sur chacune des touches.
- Si j’appuie sur le do, et que je veux aller dans les aigus de cette note d’un demi ton, j’appuierais donc sur le do dièse. Mais si j’appuie sur le ré et que je veux aller d’un demi ton plus grave, ce sera un ré bémol. Les deux notes sont les mêmes. On utilisera seulement l’une ou l’autre en fonction de l’écriture de la partition, de la position des mains et de la suite de note. Une façon comme une autre de faire « jolie », somme toute. Est-ce que tu comprends ?
Les explications que je venais de lui fournir étaient précises, il allait sans dire, et sûrement très complexes pour un pianiste débutant. Pour autant, elles répondaient expressément à la question posée et ne laissait aucun doute, ce qui, ainsi, me semblait parfait.
- Note seulement que le dièse et le bémol se placent avant la note sur une partition. Rajoutai-je alors avant de réfléchir à sa dernière question. A vrai dire… Il n’y a pas réellement de raison musicale. Enfin. Oui et non. Les quatre vingt huit touches sont devenues une norme, elles correspondent aux notes qu’utilisent la plus grande majorité des musiciens. Et, outre cela, elles correspondent à ce que l’oreille humaine peut entendre. Des notes supplémentaires ne seraient donc pas vraiment utiles puisque la différence dans les aigus ou les grave ne se ferait que peu entendre. Je réfléchis quelques instants. Mais il me semble qu’il existe des pianos allant même jusqu’à 102 touches, et certains compositeurs comme Brahms les ont déjà utilisés. J’haussai les épaules. Une excentricité, dirons-nous.
Esquissant un sourire, j’attrapai alors une partition un peu plus complète mais où seule la clé de sol apparaissait.
- Bien. Repris-je. Pourrais-tu donc m’écrire le nom des notes et me jouer les notes des quatre premières mesures. Je l’observai un instant. Sais-tu juste ce qu’est une mesure exactement ?
Pour une fois il était pleinement concentré. À croire que la musique est un bon médium pour essayer de capter son attention dissolue. Chaque mot d’Amelia, il se le représentait sur le clavier. Son œil segmentait encore une fois les sept octaves et le quart de la dernière. Les fameuses « touches toutes seules », et ça sonnait moins bête dit comme ça. Même l’explication des demi-tons lui paraissait claire. L’altération, c’était un langage qu’il connaissait, bien qu’il l’appliquait différemment sur sa guitare. Y compris lorsqu’elle lui décrivit comment le tout était représenté sur une partition, en fonction de la position des mains sur le clavier, ou de l’enchaînement des mouvements de celles-ci. D’ordinaire, une envolée verbale comme ça quand elle concerne l’histoire des Amériques lui passe au dessus du crâne. Mais là, il apprend quelque chose qui le passionne un peu plus déjà. S’il se voyait comme le meilleur guitariste du coin, le piano était un instrument nouveau et bien plus fascinant qu’il l’aurait cru. Il se contenta de hocher la tête positivement, pour seule réponse à la question d’Amelia. Oui, il comprenait tout, et du premier coup.
« Mmmh, ouais 102 touches, ça fait branleur m’sieur Brahms. Mais j’aurai certainement le temps de lui montrer qu’il fait que faire le malin en faisant mieux tiens. »
Il attrapa la partition et commença à la lire tout en écoutant Amelia lui donner une nouvelle consigne. Il parcouru la feuille des yeux, et souffla un instant en prenant le temps de réfléchir. Pas à la question, mais afin d’être sûr de ne rien manquer des notes inscrites sur le papier.
« C’est une… j’vais avoir du mal à l’expliquer clairement ça. C’est une durée qui sépare les temps d’une chanson. Chaque mesure fait la même durée. »
Il haussa un sourcil en attendant la réponse, en commençant à visualiser mentalement le nom de chaque note dans la partition qu’il avait dans les mains. En partant de la clé de sol, en plus. Son écriture un peu brute et peu soignée faisait presque tache sur la partition. En général il n’aimait pas mettre d’annotation sur les tablatures qu’il avait sous la main, il avait toujours l’impression de gâcher le document. Comme si un catholique fervent écrivait sur les pages de la bible. Mais il espérait au moins ne pas faire de fautes, pour ne pas avoir à raturer en plus. Et il posa le carnet sur le piano en essayant de rejouer les notes qu’il avait lui même déchiffrées sur le clavier. Si ses doigts étaient plus habitués à se mouvoir sur le manche d’une guitare, ils s’en sortaient finalement plutôt bien sur le piano. Il arrivait à traduire la coordination qu’il avait imprimé dans ses mains d’un instrument à l’autre, bien que le second lui semble massif et démesuré. En jouant, Jay ne marqua qu’un temps de pause pour trouver sa note après avoir malencontreusement laissé son doigt glisser sur la mauvaise touche. La note qui en sortit à la place de celle de la partition manqua de lui faire perdre ses moyens. Jouer une note à côté avait ce don de faire grincer des dents tant elle semble ruiner une mélodie entière. Alors il reprit le morceau depuis le début, puis une troisième fois en se ratant encore. Juste par pur orgueil, lui qui insiste jusqu’à devenir parfait quand il joue de la guitare.
« Rah, ça va me prendre du temps pour apprendre. J’suis pas trop mal à l’aise mais j’suis pas non plus 100 % confort là. J’crois que je vais me choper un synthé pour ma chambre pour bosser là dessus. »
J’esquissai un sourire alors que Jay hochait la tête. Il comprenait. Et c’était parfait. Oh bien sûr j’aurais pu lui expliquer cela de nouveau, et d’une nouvelle façon, afin qu’il saisisse toutes les nuances, mais j’étais heureuse de voir que je n’en avais pas besoin. Mieux. J’étais bien contente de voir que ce cours, contrairement à d’autre, l’inspirait. Un musicien. C’était appréciable. Mieux, je laissai échapper un léger rire alors qu’il indiquait vouloir faire mieux que Brahms. Au moins était-il décidé à apprendre et cela sérieusement. Pour le reste… Le temps confirmerait ou infirmerait l’idée qu’il puisse devenir un artiste accomplis dans ce domaine.
- Chaque chose en son temps. Dis-je malgré tout. Ne va pas trop vite au risque d’être déçu tout aussi rapidement. Le piano est un instrument qui s’apprivoise, pas quelque chose qui se maîtrise en deux mois.
Ma consigne suivante donnée, j’écoutai attentivement sa réponse, hochant la tête. C’était juste. Expliqué avec des termes peu orthodoxe dans le domaine musical, mais une réponse tout à fait bonne et acceptable. Je ne le rattrapai d’ailleurs aucunement sur les termes. Mieux valait ne pas lui bourrer la tête de vocabulaire dont il ne se servirait jamais. La compréhension seule était la clé d’un bon pianiste, et j’en étais convaincue. Le reste ? Jeremiah pourrait toujours l’apprendre s’il le désirait en temps voulu. C’est alors en silence que j’observai le jeune homme faire ce que je lui avais demandé. Un léger sourire aux lèvres, force m’était de constater qu’il s’appliquait, même plus que de raison, en témoignait son envie de faire un « sans faute » alors même que je ne lui en demandais pas tant. Oh bien sûr n’allais-je certainement pas râler. Au contraire. J’aimais la perfection. J’aimais voir que l’on puisse chercher à l’atteindre. Et j’étais fière de voir Jay tentait de reproduire cette perfection. Me penchant quelque peu au-dessus de lui, j’attrapai délicatement son poignet droit pour le maintenir en place.
- Garde ton poignet souple mais droit quand tu appuies sur les touches. Cela te donnera une meilleure amplitude et un mouvement plus naturel.
Doucement, après quelques secondes à suivre son mouvement, je relâchai alors son poignet, me réinstallant à ma place pour l’observer de nouveau. A sa réflexion, je me mis alors à réfléchir quelque peu. Un synthé… Mmh…
- Jeremiah. Dis-je alors. Quand est-ce qu’à lieu ton anniversaire, dis-moi ? J’esquissai un léger sourire. A défaut d’un synthé qui ne reproduira pas le son ni les sensations d’un piano, peut être pourrais-je t’offrir un piano droit… Je me tus alors, plissant les yeux. Si tant est que tu désires réellement et sérieusement apprendre à jouer de cet instrument. Un temps de silence et je l’observai. Qu’en dis-tu ?
Un air légèrement amusé au visage, je secouai la tête quelque peu.
- Oh. J’oubliais une deuxième petite condition à ce cadeau. Relevant les yeux vers lui, je soufflai. Pourrais-tu… Je toussai quelque peu gênée de devoir demander cela à l’un des vampires de la famille. Mais après tout, avais-je le choix ? Pourrais-tu m’apprendre à faire de la moto ?
Another day, another lesson Jay Saint-Brams Il y avait de la nervosité, sans mentir. Plus parce que le cours était en aparté, juste que ça devenait gonflant de se rater encore et encore comme ça. De tout reprendre, et de tout recommencer à chaque fois parce que son cerveau peut pas se satisfaire du « ça passe » quand il joue. C’est mort. Pour n’importe quoi d’autre c’est tranquille, aucun souci. La musique c’est sacré, ça mérite pas d’être bafoué parce qu’on a des gros doigts pas agile. On joue bien ou on joue pas, point. Et Liz dut le prendre de pitié puisqu’elle attrapa doucement son poignet pour l’aider un peu mieux à jouer. Pour le conseiller en tout cas. C’était pas mal venu, mais Jay dut se retenir de pas retirer sa main de là. Il aimait pas qu’on le traite comme un incapable. Mais il avait rapidement fini par comprendre que Liz faisait de son mieux, pour le rendre mieux. Parce qu’elle était comme ça avec les siens. Pas pour les forcer à entrer dans ses cases mais pour être meilleurs tout court. À partir du moment où on le voulait bien, quoi. Alors il la laissa le guider un moment et le rassurer avec sa voix de gentille prof attentionnée.
« Euh.. ouais ? C’est mi-juin. J’avais pensé à un synthé pour pouvoir jouer avec un casque. Et parce que ça prend moins d’place aussi, mais le piano droit genre, c’est cool. J’aimerais bien ouais. »
Jay hocha la tête en reprenant la mélodie, en gardant les conseils d’Elizabeth en tête. Poignet souple, mais droit, mouvement plus naturel. Et c’était effectivement plus facile. Fallait juste s’appliquer à pas taper à côté, tout en essayant de respecter le tempo. Ça venait petit à petit, jusqu’à ce que la suite de la pensée de Liz lui fasse fracasser ses doigts sur trois touches en même temps comme un motard bourré dans un abri bus.
« Genre, faire de la moto, toi ? »
Il eut un petit rictus en coin de l’imaginer à cheval sur une bécane, mais c’était pas parce que c’était drôle. Enfin si ça l’était, mais disons que le côté nerveux étirait sa face plus fort. Il hoche négativement la tête, avant de s’attraper le menton pour réfléchir. Forcément le piano c’était intéressant comme idée ouais. Par contre lui apprendre la moto c’était pas une mince affaire. C’était même complètement con : Jay se ramassait trop souvent pour être un bon prof. Sauf si il lui apprend pas à conduire défoncé. Ou à pas brûler les feux rouges. Elle pourrait certainement se débrouiller avec tout ce qui concerne le code de la route, alors pourquoi pas ?
« Ben euh, ouais c’est faisable. Mais faudra tester avec une petite bécane pour commencer, sinon tu vas te ramasser. Et si tu touches à une bécane d’Aedan on est foutus tous les deux j’pense. »
Ah, oui, Aedan. En fait, si Liz esquinte une de ses motos, ils prendront cher tous les deux. Par contre si Liz s’esquinte toute seule, Jay prendra cher aussi, mais tout seul. Même si Liz prend pas trop cher en tombant. Jay se frotta le visage avec les mains avant de se tirer les joues vers le bas en soupirant.
« Mais genre, Aedan est au courant ? J’veux pas d’embrouilles avec lui, il fait peur un peu t’sais. » :copyright: CRIMSON DAY
Le cadeau était donc tout vu. Et mi-juin. Une date très imprécise pour une personne qui aimait la précision mais j’allais m’en contenter. Après tout était-ce suffisant pour ce que je comptais faire de cette date. Attentivement, j’écoutai et observai le moindre mouvement du vampire tout en reprenant parole. La condition. Bien sûr, je n’avais que trop peu rarement d’idée sans arrière-pensée. Et le plus souvent, toute finissait par me rapporter. Cela n’allait donc certainement pas être quelque chose de différent aujourd’hui. La demande, néanmoins, sembla surprendre Jay, en témoigna le son désagréable qui sortit du piano.
- En quoi est-ce si étrange ? Soufflai-je en plissant les yeux. Je sais que je ne suis pas la plus adroite de cette famille mais ne me sous-estime pas, Jeremiah.
Une chose était, le vampire n’avait pas tout à fait tort. Outre le fait qu’Aedan tenait à ses motos comme à la prunelle de ses yeux et que, par conséquent, je ne me risquerais pas à y poser la main ; le fait était que toutes les siennes étaient puissantes. Et j’étais bien placée pour le savoir, lui en ayant offert, ce qui me convainquait d’autant quant au fait de ne certainement pas toucher l’une de ses motos.
- S’il faut acheter une moto pour ça, je le ferais. Dis-je en m’installant au fond de la chaise. Ce n’est pas un problème. Et je ne compte certainement pas emprunter de moto à Aedan.
J’arquai néanmoins un sourcil, un air soudain plus amusé au visage.
- Peur ? Répétai-je en retenant un léger rire. Aedan te fait peur ?
En soi… Il était vrai que je pouvais le comprendre. Du moins, je pouvais imaginer cela. Bien sûr n’avais-je pas, et heureusement, le même point de vue sur mon mari, mais j’étais la première à savoir qu’Aedan pouvait avoir une particulièrement mauvaise tête lorsqu’il était furieux, n’hésitant alors à rien pour le faire comprendre. Il ne mâchait ni ses mots ni ses actes. Si je n’avais jamais vraiment essuyé de colère, je savais qu’il n’était que rarement – pour ainsi dire jamais – tendre avec les membres de cette famille.
- Je ne vais pas mentir en te disant qu’il est au courant. Ce n’est pas le cas. Et je pense même qu’il désapprouvera tout à fait cette idée. Je soufflai alors, secouant la tête. Ecoute. Je ne te forcerais pas à m’apprendre quoique ce soit, notamment si Aedan t’effraie. Et tu auras le piano quoiqu’il en soit. Le fait étant que j’éviterais de cacher cela à Ae.
La décision de ne plus rien lui cacher avait été compliqué à prendre pour moi qui n’avait jamais parlé réellement ouvertement des choses. Mais depuis mon dernier petit « séjour » chez Dimitri… Je devais avouer que ma façon de penser avait quelque peu changé. Tout du moins… J’avais pu comprendre l’intérêt de dire les choses, même si cela n’était qu’à une personne. Une personne qui sûrement était le mieux placé, quoique le moins attentif, à ce que je pouvais dire.
- Je ne t’oblige à rien. Alors… J’haussai les épaules. Tu n’auras qu’à me donner une réponse quand tu seras décidé. Ou non d’ailleurs. Cela te va-t-il ? Je secouai la tête. En attendant, réessaie de jouer un peu. L’entraînement doit être régulier pour progresser.