Sorti. Tu étais enfin sorti. Un poil plus tôt que prévu, de deux jours pour être précis. Tu savourais l'air frais de l'hiver qui avait un goût de liberté. Tu avais appelé un taxi qui normalement n'allait pas tarder à arriver. Tu regardes ton téléphone portable, de nombreux messages et appels en absence depuis la dernière fois que tu t'en étais servi. Des messages d'amis, de connaissances, de collègues. Pas de messages de Kat.. Tu demandais si elle t'en voulait et surtout si elle allait bien.. Peut-être qu'elle avait répondu au mot que tu avais laissé dans ton appartement ? Est-ce qu'elle avait croisé Jen ? Tu auras sans doute tes réponses en temps voulu. Tu les lisais rapidement tes sms, t'attardant sur ceux de Vika un instant. Tu allais reprendre le boulot d'ici peu et la jeune restauratrice t'avait fait une proposition plutôt intéressante. Mais tu y penserais plus tard. Pour le moment tout ce qui comptait, c'était rentrer chez toi, puis voir Jenny. Tu comptais lui faire une surprise en allant la voir dans la soirée.
Dans la taxi, tu restais les yeux rivés sur ton téléphone, ne parlant qu'au chauffeur pour lui donner ton adresse. Tu baillais, la nuit avait été courte, tu étais si impatient de pouvoir sortir que tu n'avais quasiment pas fermer les yeux de la nuit. Une petite sieste en rentrant.. Ca te fera pas de mal. Tu luttas pour ne pas t'endormir pendant le trajet. Arrivé dans ton quartier, ça te faisait bizarre de revenir ici après deux mois. C'était vraiment un quartier pourrit.. Déménager. Ouais. Faudrait y songer sérieusement. Tu payes le chauffeur et sort enfin de la voiture. Tes yeux parcourent l'immeuble qui se dresse devant toi. Toujours autant l'air délabré, mais toujours debout. Tu es à la fois content de rentrer et un peu stresser de te retrouver seul.. Ca va aller, t'en es capable. Tu hisses ton sac bandoulière sur ton épaule et pénètre dans le hall d'entrée. La porte est toujours cassé, l'ascenseur toujours en panne.. Y a des trucs qui changent pas. Tu montes alors les étages, t'appuyant sur la barre pour t'aider à monter. La porte de ton appartement.. Tu ouvres, t'attendant retrouver un appart poussiéreux et pas très en ordre, mais lorsque tu entres c'est tout l'inverse. Au point ou tu te demandes si tu ne t'es pas trompé d'étage. Tu regardes le chiffre sur la porte.. Non, c'est le bon, pas d'erreur. Tu fais quelques pas à l'intérieur, après avoir fermé la porte derrière toi. Tu poses ton sac dans un coin et redécouvre ton appartement. Il est.. Décoré. Il l'était déjà un peu avant que tu partes mais là.. Tu aimes plutôt bien l'ambiance zen qui y règne. De toute façon, ça sera toujours mieux qu'avant. Tu vois dans un coin la malle de ton saxophone et juste à côté ta basse. Ouaip, aucun doute, c'est bien chez toi.
Tu te poses dans ton canapé, avant de t'endormir tu décides d'envoyer quelques messages, notamment à Kat pour avoir de ses nouvelles. Tu n'as pas trouvé de réponses à ton message.. Tu n'as d'ailleurs pas trouver la feuille où était inscrite la note à son intention. Tu finis par t'endormir au milieu de l'écriture d'un mail, te réveillant deux petites heures plus tard. L'envie, le besoin même, d'un café se fait sentir alors tu te lèves pour aller t'en préparer un. Au passage tu vérifies ton frigo, vide. Normal. Faudrait que t'ailles faire quelques courses. Un café et en route. Tu prends ta voiture pour te rendre à l'endroit où tu fais tes courses habituellement. Tu prends de quoi préparer un repas pour ce soir et tu te surprends même à prendre de la nourriture qui te ferait plaisir. Ca aussi, ça été un gros problème lorsque tu étais interné. Manger. Heureusement, tu avais réussi à y reprendre goût, reprenant même quelques kilos. Bon t'avais toujours l'air d'un squelette, mais moins qu'avant.
De retour à la maison, tu commenças à préparer à manger. Des rouleaux de printemps en entrée et quelques raviolis aux crevettes. T'avais vraiment envie d'en manger. Puis en plat, du pad thaï, avec du bœuf pour toi et du poulet pour Jen. Elle aimait bien le poulet. Enfin t'espérais pas confondre tes souvenirs. Et pour le dessert.. T'avais acheter de la glace. Parce que flemme. Puis c'était bon la glace. Surtout la Ben & Jerry's. Tu empaquetas le tout dans divers contenants, puis tu nettoyas ta cuisine. Tu avais passé une bonne partie de l'après-midi à cuisiner, tout était prêt. Tu pouvais prendre une douche à présent. Devant le miroir, tu t'arrêtas un instant pour te regarder. Tes cheveux te tombaient sur la nuque.. Faudrait que t'ailles faire couper tout ça. Demain. Tu ne supportais plus de les avoir aussi longs et puis il faudrait tailler ta barbe aussi. Ca tu pouvais t'en occuper de suite.
Propre, bien rasé, des vêtements sentant bon la lessive. Tu regardais l'heure, légèrement stressé. Et si elle ne voulait pas te voir ce soir ? Si elle avait des trucs de prévu.. Raah. Tu commençais à douter. Ca pouvait être complètement foireux comme plan. Tu hésitas longuement puis finit par te décider. Tu irais la voir. Au pire, si elle n'avait pas le temps.. Bah tu pourras toujours lui laisser la bouffe et aller faire un tour à ton restaurant. Tu n'y bosserais pas, car Vika ne l'autoriserait pas, mais tu pourrais passer le bonsoir à ta brigade et aux serveurs. Bref. En route.
Sur le trajet, tu t'arrêtas une fois avec l'intention de faire demi-tour, avant de te raviser. T'allais pas te dégonfler après avoir fait plus de la moitié du chemin ! En bas de son immeuble, tu vis de la lumière chez elle. Bon au moins, elle était là. Sauf si elle avait oublié d'éteindre la lumière.. De toute façon, y a pas quinze mille moyen de le savoir. Par chance, un de ses voisins entra au moment où tu étais en bas, tu n'avais donc pas besoin de l'appeler à l'interphone. La surprise jusqu'au bout, heh. Devant sa porte, tu sentais ton cœur battre plus vite. C'est le moment de vérité, ton doigt appuya sur la sonnette et lorsque la porte s'ouvrit.. Tu souris.
Encore deux jours. J’avais, à vrai dire, presque compté les jours depuis qu’il était entré au centre. Etais-je fière de lui ? Bien entendu. Lui avais-je dit ? C’était autre chose. Je ne voyais pas vraiment l’intérêt de dire ce genre de choses, après tout faisait-il les choses pour lui avant de les faire pour moi, non ? Et puis je serais fière lorsqu’il en sortirait, après tout.
« Attends-moi ». Voilà tout ce qu’il m’avait dit. L’avais-je fait ? D’un côté, je n’avais pas franchement mieux à faire. D’autant que je lui avais promis de prendre soin de son appartement lors de son absence. Et je me devais de tenir mes promesses. Sinon… Sinon à quoi bon en faire, en fin de compte ? Et pour prendre soin de son appartement… J’en avais effectivement pris soin. Plus récuré que jamais, je l’avais même redécoré avec un esprit « zen ». J’avais en effet estimé que c’était la façon de pensée qui allait le plus lui être adaptée à sa sortie de cure. Il allait avoir besoin de calme et de relaxation, alors autant commencer par la décoration ! Bon. Je n’avais pas poussé le vice jusqu’à bouger les meubles pour en faire du feng-shui. Je n’y croyais d’ailleurs pas du tout, mais au moins l’appartement me semblait-il plus agréable maintenant.
Et maintenant qu’il allait rentrer, dans deux jours, je n’avais plus qu’à faire quelques finitions. Un peu de nouveau ménage pour supprimer les derniers soupçons de poussière, d’abord, et puis ses courses aussi, prévues pour le matin de son retour, afin qu’il n’ait plus rien à faire et qu’il puisse entièrement se reposer.
En attendant, je me trouvais chez moi, en pyjama. Je n’avais pas bougé de chez moi aujourd’hui, bien décidée à me reposer complètement pour être assez en forme lors de son retour. Bien sûr, je ne comptais certainement pas empiéter sur son espace vital en le collant comme toutes les petites amies dans les films… Petites amies… J’avais donc un… Petit ami ? Cela sonnait très étrange. Peut être d’avantage du fait que nous ne nous étions pas vus depuis quelques temps maintenant. Trop longtemps, d’ailleurs. Mais c’était bientôt fini alors… Là, assise sur mon canapé, un journal à la main, je me renseignais sur ma nouvelle passion des deux dernières semaines, la bourse, lorsque j’entendis sonner. Arquant un sourcil, n’attendant, comme d’habitude, aucune visite, je me dépêchai jusqu’à la porte. Peut-être était-ce ma sœur qui venait me rendre visite ? Elle devait m’appeler dans la journée alors… Peut être s’était-elle décidée à franchir le pas de la porte de la « caverne », comme elle appelait mon appartement. Doucement, j’ouvris la porte. Un silence, un long silence alors que j’observai l’homme qui me faisait face. J’suis sorti ? Il était sorti ? C’était… Mes joues s’empourprèrent rapidement. Oh non ! Lui claquant la porte au nez, je me ruai dans la chambre pour attraper une robe de chambre afin de couvrir ma trop petite tenue, avant de courir de nouveau vers la porte, lui attraper le bras, le faire rentrer et repartir dans la chambre, sans un mot. Impossible pour moi de me montrer de la sorte, mais impossible aussi de le laisser à la porte. Maman m’avait d’ailleurs toujours dit que l’on ne devait jamais laisser le moindre invité à la porte, d’où le fait que j’étais revenue, mais un peu plus habillée. Et maintenant… me restait à trouver une tenue convenable pour l’accueillir. Et jolie. Après tout venait-il de rentrer. Rentrer… Mais… Il devait rentrer dans deux jours, non ? Pourquoi… Pourquoi était-il là ? Pourquoi ne m’avait-il pas prévenu ? Pourquoi étais-je en train de paniquer pour une chose aussi idiote ?! Assise sur mon lit, je pris une longue inspiration. C’était idiot. Il fallait que je réussisse à m’adapter à cette situation imprévue et quelque peu gênante du fait de ma tenue trop peu conventionnelle. D’autant que… tout était prévu. Je n’avais qu’à m’habiller comme je l’avais prévu depuis une semaine pour l’accueillir. Et le maquillage alors… Un coup d’œil sur ma commode et je soupirai. J’avais eu la présence d’esprit de le laisser là. Parfait. Alors… Ni une ni deux, prenant sur mes angoisses de non prévision de mon emploi du temps, j’attrapai la robe blanche, les chaussettes et les bottines que j’enfilais bien rapidement. Un coup de mascara, d’eyeliner, et je me rendis de nouveau dans le salon, quelque peu honteuse de l’accueil que je lui avais réservé. Décidément… S’il avait dit que cela ne le dérangeait pas que je ne sois pas normale… Voilà qu’il en faisait les frais des à présents. En attendant… Je levai les yeux vers mon Zombiboy. Il était là. En face de moi. Que devais-je faire ? J’avais envie de me serrer contre lui, de sentir son odeur, cette odeur qui m’apaisait et qui m’avait bien trop manqué durant ces dernières semaines. Mais devais-je le faire ? Et l’embrasser ? Nous nous étions déjà embrassés, et c’était… enfin je n’allais pas le décrire, et j’en avais envie. Mais pouvais-je le faire ? N’allais-je pas trop entrer dans son cercle vital ? Devais-je rester à bonne distance ? Pour cette dernière question, c’était là ce que j’étais en train de faire, d’ailleurs.
- Tu es rentré… Soufflai-je doucement. Et tu… Vas bien ?
C’était une question un peu bateau, sûrement bancale, mais c’était une question qui me semblait importante.
- Est-ce que je peux ?...
Je ne terminai pas ma phrase. Mettant mes craintes de côté, j’avançai d’un pas vers lui pour venir entourer son torse de mes bras, posant ma tête contre celui-ci. Et enfin, je respirai, profondément. Il était rentré. Et c’était tout ce qui m’importait.
Alors... Tu t'attendais à toutes sortes de réactions, mais celle là tu ne l'avais vraiment pas vu venir. Elle venait de te claquer la porte au nez, sans rien te dire. Tu restais la, planter devant sa porte, complètement confus. Et puis, tu commençais à te sentir mal. Merde. Elle voulait vraiment pas te voir en faite. En même temps.. Tu secouas la tête, commence pas à être négatif. A travers le bois de la porte, tu l'entendais s'agiter et finalement, la porte s'ouvrit à nouveau. La mawu t'attira à l'intérieur, toujours sans t'adresser un mot. Elle avait enfilé un peignoir.. C'est vrai qu'elle était pas très habillée en ouvrant la porte lorsque tu y repensais. Disons que c'est pas vraiment le premier truc que t'as regardé. Et là voilà qui te replantait de plus belle.. A vrai dire, tu n'osais pas bouger, ni même enlever tes fringues. Un peu parce que tu ne savais pas si t'allais rester ici ou non vu son comportement. Elle pouvait encore te mettre à la porte.. Non?
Tu envoyas un message à Vika, un peu désespéré. "Elle agit bizarrement", que tu lui avais écrit. Bon, fais marcher tes neurones deux secondes. Ah bah non, pas le temps. Méduse était revenue, toute habillée, maquillée. T'en restais bouche bée. La regardant avec un air abruti. Elle avait surement prévu de mettre ça pour le jour de ta sortie. Elle avait certainement tout prévu. Et toi, tu te pointais comme un fleur chez elle sans la prévenir. Tes yeux bleus ne se détachaient pas d'elle, elle était si belle ta Méduse.
▬ Tu es rentré… Et tu… Vas bien ?
Tu hochas la tête dans un sourire.
▬ J'vais bien. Bien mieux.
Tout en te posant une question qu'elle ne termina pas, elle s'approcha de toi pour t'enlacer. Surpris au départ, tu plaças naturellement tes bras autour d'elle. Tu la serrais doucement contre toi. Elle était là. Tu étais là. Elle t'avait attendu. Ton sourire s'élargissait. Depuis combien de temps ne t'étais-tu pas senti aussi heureux ? Aussi vivant. Ta main passait sur son dos, le caressant lentement.
▬ Ca m'avait manqué.
Murmures-tu non loin de son oreille.
▬ Tu m'as manqué. T'es magnifique.
Ton étreinte se resserre et au fil des secondes, l'envie de plus que l'enlacer se fit sentir. Tu voulais l'embrasser, mais tu ne voulais pas non plus la brusquer. Tu n'étais pas vraiment de ce que tu pouvais faire ou non à vrai dire. Vous étiez ensemble non ? A vrai dire.. Ca n'avait jamais été vraiment dit clairement.. Hum. Tes doigts se posent sur sa joue, glissant sous son menton pour relever son visage. Tu hésites et un peu dans la panique, tu finis par embrasser son front.
Dire que tout cela était naturel était tout à fait faux. Je n’aimais pas le contact physique, ou tout du moins habituellement. Fuyant les embrassades, et même les poignées de main, je tentais en général de rentrer dans ma grotte pour ne plus avoir à faire aux autres. Mais Zombiboy, lui, était entré dans ma grotte, avec ses gros sabots de voleur de pouvoir. Et force avait, finalement, été de constater que j’avais fini par apprécier sa présence, et même plus. Car actuellement entre ses bras, je me sentais plus apaisée que jamais. Mieux, il allait bien. Du moins était-ce ce qu’il avait dit. Mais était-ce aussi la vérité ? Pourquoi ne dirait-il pas la vérité ? Il venait de sortir, c’est donc qu’il devait aller mieux… N’est-ce pas ? « Cerveau. Stop ». C’était à peu près ce à quoi je pensais tandis qu’un millier de question me venait en tête. Ce fut la voix de Samael qui me sortit de mes pensées. A moi aussi. Ça m’avait manqué. Plus que ma cervelle d’asociale ne voulait se l’avouer en tout cas.
- Merci… Soufflai-je en enfouissant mon nez dans sa chemise.
En parlant de chemise… Il fallait que j’avoue une chose, il semblait en forme, et même plus en forme qu’avant, et il avait changé de style vestimentaire, à moins que ça ne soit fait exprès ? Peut-être avait-il tout préparé, comme moi ? Enfin… Je n’avais pas été seule pour tout préparer, il allait sans dire, notamment en ce qui concernait ma tenue. C’était en effet Maryam qui m’avait aidé à les trouver. Comme beaucoup de choses d’ailleurs. D’ailleurs… Je crois quelle était encore plus heureuse que moi de savoir qu’un homme osait rentrer dans l’antre de solitude de sa sœur. Elle aurait pu être là qu’elle serait venue, cela, j’en étais certaine. Mais j’avais réussi à ne lui accorder qu’un résumé de ce qu’il se passerait au retour de Sam. Un retour qui avait été préparé, pour ma part. Et qui n’allait visiblement pas se passer comme prévu. Mais comment allait-i se passer alors ? Je voulais m’assurer qu’il serait au repos chez lui, je n’avais pas eu le temps de finir les dernières poussières, qu’avait-il pensé de son appartement en désordre, alors même que je lui avais dit que je prendrais soin de son appartement !
- Désolée… Pour l’appartement. Murmurai-je presque honteuse de la saleté que j’avais pu y laisser. Je n’ai pas eu le temps de finir de le nettoyer…
Le baiser reçu sur le front me fit arquer un sourcil. Donc je ne devais pas l’embrasser, c’était cela ? De toutes les manières est-ce que j’oserais le faire ? Je n’en étais pas vraiment certaine. Pourtant, là, contre lui, je n’aurais certainement pas refusé cela mais… Oui. Ce devait être normal. De toutes les manières j’étais une parfaite néophyte dans ce genre de chose, ou presque, j’avais, jusque-là, tellement été maladroite et j’avais eu si peu de petit ami et pour si peu de temps que je ne savais pas franchement comment agir. Surtout dans cette situation de retour tout à fait nouvelle pour moi.
Sa question me fit soudain arrêter. Faim ? Manger ? Je… Oh non ! M’écartant soudain de lui, je me ruai jusqu’à ma cuisine pour ouvrir le four. Voilà près de deux semaines que je m’entraînais à cuisiner pour lui. Aujourd’hui, je m’étais décidée à suivre une recette de poulet rôti. Et voilà plus de trois heures qu’il était au four… Je l’avais oublié à 200°C…
- Oh non non non non non… Répétais-je en sortant le poulet carbonisé du four l’air presque dépité. Je… Levant les yeux vers Sam, je soufflai. J’avais envie de savoir cuisiner un minimum pour ton retour mais… Je grimaçai en montrant le poulet. Ça fait deux semaines que je ne mange que des plats préparés ou du pain quand j’oublie d’en acheter parce que je suis incapable de faire autre chose que de la bouillie de pâtes infecte.
Alors autant dire que j’avais effectivement faim. Lui proposant de venir, comme à mon habitude, s’asseoir autour de la table basse pour manger, je sortis assiettes et couverts pour les installer sur celle-ci. Alors assise, j’observai mon assiette puis Sam, puis mon assiette, puis Sam. Oh, ce n’était pas la nourriture qui n’allait pas. Bien au contraire, j’étais plus que ravie qu’il ait cuisiné. J’adorais sa cuisine. Personne ne pouvait faire autrement qu’adorer sa cuisine, d’ailleurs, mais… Il y avait une chose avant…
- Sam, dis… Je toussotai quelque peu en baissant la tête.
Voilà une chose que je lui avais dit et que j’allais mettre en pratique. Il fallait que je sache, que je mette un mot, qu’il mette un mot sur les choses afin que tout soit clair pour moi.
- Je sais qu’on ne demande peut-être pas ça, du moins pas dans les films, qui rappelons-le étaient ma référence principale en termes de romance, mais… Nous deux… Est-ce qu’on est ensemble ou on est juste amis ?
Deux raisons avaient été à cette question. La première était que Maryam m’avait fait imaginer des retrouvailles des plus romantiques. Avec baiser. Et lui, il m’avait embrassé le front, comme on embrasse une petite sœur. Ensuite, on s’était déjà malgré tout embrassé, et je lui avais donné bien plus que je n’avais donné à n’importe qui, même à mes parents qui regrettaient que je refuse de leur faire plus de câlins. Alors… Je n’étais plus vraiment sûre de rien, et si j’espérais une réponse positive, je ne pouvais que lui demander directement, en mettant les pieds dans le plat. Juste pour que je comprenne les choses, qu’à défaut d’être plus facile, je sache comment agir – ou quel comportement de films copier, et jusqu’où je devais m’attendre à aller avec lui.
La mawu s'excuse pour ne pas avoir finit de nettoyer ton appartement. Tu hausses un sourcil. Pour toi il te semblerait toujours plus propre que la décharge que tu arrivais à en faire. Rien que de constater qu'il n'y avait plus de cendre partout.. C'était déjà beaucoup. D'ailleurs en parlant de cigarettes.. C'était le seul truc que t'avais pas arrêté. Tu fumais clairement moins qu'avant ton passage au centre, mais tu fumais toujours. D'ailleurs elle pouvait le sentir sur tes vêtements.. Mais ça ne serait plus totalement ton odeur s'il n'y avait pas cette l'effluve de tabac froid. Peut-être qu'un jour t'arrivera à t'en passer complètement. Peut-être.
▬ Sérieux ? Tu voulais enlever quoi ? Les trois grammes de poussières qui se battent en duel sur mon plancher ? T'as déjà fait beaucoup.. Et j'aime beaucoup c'que t'as fait de mon appartement. Merci.
Tu ne sais pas si la décoration avait fait son effet, mais tu t'étais senti serein à l'intérieur. Après un petit moment de tendresse conclu d'une maladresse, tu lui proposas de manger. C'était un peu ça ton "excuse" pour te pointer ici. Tu l'avais vu changer d'expression du tout au tout, t'abandonnant à nouveau pour aller dans sa cuisine. C'est vrai que ça sentait bizarre quand même.. Tu la rejoignais dans la pièce, constatant le décès du pauvre poulet rôti. Enfin, carbonisé à ce stade. Tu pouffas de rire malgré toi. Tu ne te moquais pas d'elle, au contraire, tu la trouvais même adorable d'avoir essayé d'apprendre à cuisiner pour toi. Mais cuire un poulet à 200°C, l'oublier, c'était juste.. Trop. Valait mieux en rire qu'en pleurer. Tu l'attrapas par la taille pour lui faire un nouveau câlin.
▬ Merci, c'est vraiment adorable de ta part. J'suis sur qu'avec un peu d'entrainement, tu finiras par y arriver. Je connais un chef qui peut t'aider si tu veux..
Taquin un peu, mais rien de méchant. Tu appréciais réellement les efforts qu'elle avait fait, même si elle semblait vraiment désespéré pour ce domaine. Chacun son truc, tu serais tout bonnement incapable d'écrire un article de presse, encore moins t'essayer à faire un roman. Tu la lâchais, sortant de ton sac les plats que tu avais préparé et mettant la glace dans le congélateur. Il fallait juste réchauffer un peu le tout et tu dévouais pour cette tâche, de toute manière vu le carnage avec le poulet, pas sur qu'elle veuille réitérer d'expériences culinaires pour la soirée. Une fois chauffé, tu venais t'assoir prêt de la table basse, là où vous aviez l'habitude manger quand tu venais chez elle. Tu lâchas un petit "bon ap" avant de commencer à bequeter dans ton assiette. Tu avais faim, tu te sentais bien, alors pourquoi tu sentais que quelque chose n'allait pas ? Jenny ne mangeait presque pas. C'était mauvais ? T'étais si rouillé que ça en cuisine ?
▬ Sam, dis…
Tu relevas la tête. Owh. Vu l'air sérieux qu'elle avait, ça n'annonçait pas une suite de conversation marrante. Tu posas tes couverts, finissant d'avaler ce que tu avais en bouche pour lui répondre.
▬ Oui ?
Tu restais calme, presque impassible. Pourtant à l'intérieur de ton cerveau, il y avait plein de mini toi qui courraient dans tous les sens en panique. Branche tes neurones et écoute la ! Est-ce que vous étiez plus que des amis ? Ah bah.. Toi qui te posait la question tout à l'heure.. T'allais être fixé. Enfin, ceci dit, tu ne savais pas vraiment quoi répondre. T'avais peur d'être trop franc ou même de te prendre un râteau monumental. Non mais t'es pas fou, t'as pas imaginé qu'il y avait un truc entre vous.. Ou si ?
▬ Euh. Je sais pas.
Mais putain. Tu veux pas réfléchir avant de parler ? Toi qui avait peur d'être trop direct, bah c'est pas raté abruti. Tu secouas légèrement la tête. Panique. Reprend ton calme. Respire.
▬ J'veux dire. On s'est jamais posé pour se dire clairement les choses..
La faute à qui ? C'est pas elle qui s'était barrée deux mois pour se faire soigner de ses addictions. Honteux, c'est ce que tu ressentais sur le moment. Tu ne devrais pas, tu l'as fait pour aller mieux.
▬ Pour moi, t'es pas qu'une amie.
Ca été dur de l'admettre et de l'accepter, parce que tu avais le sentiment de trahir ta défunte fiancé, parce que tu ne voulais pas aimer à nouveau, parce que tu avais peur.. Mais, forcé de constater que depuis qu'elle était entrée dans ta vie, cette petite blonde hantait tes pensées.
▬ Je t'aime Jenny.. Je.. J'sais juste pas comment me comporter avec toi. J'sais que t'es pas très tactile alors.. J'veux pas m'imposer. C'est pas un reproche hein, t'as le droit d'être comme ça et je respecte ça, j'te respecte toi. Mais je euh.. Aaaawh.. J'me perds. J'veux juste que tu sois à l'aise avec moi. J'attends pas à ce que tu sois comme dans les "films", parce qu'on est pas dans un film. C'est la vraie vie, t'es comme t'es, et je t'aime comme ça.
Sans vraiment t'en rendre compte, tu l'avais dit. Tu l'avais dit deux fois même. Tu venais de percuter, ça t'avait échappé de façon naturel, comme si après tout ce temps ça avait besoin d'être sorti. Tu l'avais dit.
Ce que je voulais nettoyer ? Oh hé bien… je fronçai très légèrement les sourcils. Il me remerciait ? En me disant que c’était déjà beaucoup ? Mais… Je secouai la tête, visiblement peu convaincue de cela, ou presque, car je devais avouer que mon esprit se rassura de lui-même lorsqu’il m’affirma apprécier ce que j’avais fait.
- C’était plus que trois grammes. Bougonnais-je quelque peu malgré moi.
Maniaque ? Peut-être très légèrement lorsque je voulais faire les choses bien. Et j’avais eu envie de faire les choses bien. Peut-être un peu trop, d’ailleurs. Je savais pertinemment que mes compétences en cuisine se résumaient à faire une sauce vinaigrette beaucoup trop salée et me couper en tentant de trancher du pain. Et pourtant, j’avais voulu essayer, pour lui faire plaisir, pour lui cuisiner des plats lorsqu’il rentrerait. Ou des plats, et non des bons petits plats, parce que si j’estimais que j’avais la capacité d’apprendre à faire des plats, mieux valait ne pas imaginer que ces derniers soient dignes d’une bonne ménagère, que je ne serais d’ailleurs jamais.
- Je ne suis pas vraiment convaincue que ce chef puisse faire quelque chose. Grimaçai-je. Mais si le chef en question à envie de passer du temps à cogner la tête contre un mur, je ne dirais pas non.
Un léger sourire éclaira mon visage tandis que l’homme me reprenait par la taille. C’était vraiment étrange cette aise que je ressentais lorsqu’il se trouvait près de moi. D’ailleurs, je crus comme ressentir un manque lorsqu’il me relâcha afin de préparer ce qu’il avait cuisiné. Secouant la tête, je soufflai contre moi-même. Vue de l’esprit, évidemment, comment le corps d’un autre pourrait-il rationnellement me manquer, j’avais déjà bien du mal à gérer le mien, mieux valait ne pas m’attarder sur celui d’un autre après tout. M’attarder, m’attacher, ce fut la prochaine question, posée en plein milieu du début de repas. Une question de but en blanc, comme j’en avais l’habitude, sans aucune pince, sans aucun warning ou que savais-je encore.
« Je sais pas ». Bien. Comme ça nous étions deux. Parfait. Mais nous n’étions pas plus avancés, et c’était d’avancée dont j’avais besoin afin de savoir comment – plus ou moins, voire moins que plus – agir et réagir. Mais il n’avait pas tort, nous ne nous étions jamais posés pour dire les choses, déjà parce que Zombiboy avait initialement été un idiot de voleur pouvoir, puis parce que tout s’était déroulé comme de manière insidieuse. L’invitation à sa soirée avait d’ailleurs fait beaucoup dans notre rapprochement amical ou… Ou plus ? Plus. C’était ce qu’il était en train de me dire ? Je n’étais pas qu’une amie, alors qu’étais-je ? Et plus que ça qu’était-il, lui ? Je n’avais jamais été très douée pour décrypter les sentiments des autres, et les miens non plus d’ailleurs. Alors il était vrai que cette histoire me perdait quelque peu. Comment un être aussi sensé que moi pouvait donc changer d’avis sur un Zombie comme lui ? Et pourtant, je n’avais pas à me chercher mille et une excuse, c’est exactement ce qu’il s’était passé, en témoignait le temps que je lui avais accordé rien qu’en prenant soin de son appartement, chose assez rare pour être notée. Je n’avais, en général que peu de temps pour les autres. Egoïste ? pas vraiment. Seulement, je n’étais que peu entourée, cela me laissait donc peu l’occasion de le faire, après t… Mon regard se posa sur l’homme assis en face de moi, visiblement surprise, ou paniquée, ou peut être un peu des deux. Personne n’avait jamais prononcé ces mots devant moi. A part ma famille tout du moins. Oui c’est cela. Aucun de mes nombreux – deux – petits copains ne l’avaient dit. Et d’ailleurs ils avaient fini par me dire tout deux que j’étais trop difficile à suivre et à comprendre. Et là, Samael, alors même qu’il ne m’avait jamais vraiment rien demandé à part de l’attendre, venait de le dire ? Clignant des yeux, je tentai, dans une panique intérieure la plus totale, de trier mes idées, mes pensées et d’éteindre légèrement mon cerveau pour cette fois. Pourquoi n’arrivais-je jamais à trouver ce bouton off ? Et il continuait de parler. Et je l’écoutais le plus attentivement que je le pouvais. Bien sûr n’étais-je pas tactile, cela avait dû se voir dès le début, mais n’était-ce pas ce qui était attendu des femmes dans un couple ? Un couple… Non mais… Je ne lui avais encore même pas répondu. Je n’étais pas en couple alors. Il fallait consentement mutuel pour être en couple alors peut-être devrais-je lui répondre avant toute chose, non ?
- Merci. Dis-je précipitamment.
Merci. Je n’avais rien de mieux à dire que cela ? Visiblement pas tout de suite. D’abord se calmer. Ensuite réfléchir. Puis parler. Se calmer. Je tentai de prendre une grande inspiration comme m’avait appris la psychologue à l’école. Une longue inspiration, on maintient, et on souffle doucement. Trois fois de suite. Cela avait toujours fonctionné lorsque je paniquais de manière modérée. Cela dit… Cela faisait peut-être trop vis-à-vis de Sam qui devait sûrement attendre que je dise quelque chose. Inquiète, je levai les yeux vers lui. Peut être allait-il se dire que j’étais définitivement trop bizarre, qu’il allait revenir sur ce qu’il avait dit puis qu’il allait partir… Se calmer. Jenny. A nouveau, je refis l’exercice. Bien. Et maintenant. Réfléchir. Impossible. Une erreur 404 se trouvait sur la page web de mon cerveau à la page « que dire ». Je n’avais rien à dire. Enfin si. Mais j’étais incapable de comprendre mes propres sentiments alors les exprimer… Cela allait être des plus compliqués.
- J’ai envie d’être avec toi. Dis-je alors précipitamment avant de grimacer face à tant d’élan.
Ne pas réfléchir, c’est le conseil que ma sœur m’avait donné lorsque je lui avais parlé de Sam. « Laisse toi porter par ce que tu veux » m’avait-elle dit. Mais comment agir de façon rationnelle sans avoir à peser le pour, le contre, à réfléchir aux tenants et aux aboutissants et surtout aux raisons de la terre de la lune et de je ne sais quoi encore ? Pour autant… Il y avait une chose d’intéressant dans ce que m’avait dit ma sœur. Me laisser porter par ce que je voulais. Ce que je voulais. Et je savais ce dont j’avais envie, sans même en comprendre le sens, ce qui avait une large tendance à m’agacer. Ce dont j’avais envie, je le faisais depuis qu’il était entré au centre, je l’avais attendu, j’avais pris soin de son appartement. Mais avant toute chose… Je ne voulais pas être blessée. Il parait que c’était un réflexe tout à fait humain, quoique je ressemble souvent plus à un robot qu’à un humain, mais un réflexe logique, normal. Alors… Doucement, je me levai pour me rasseoir près de lui, face à lui, les yeux rivés au sol.
- Sam…
Non, je ne devais pas le dire comme ça, on avait l’impression que j’allais lui dire que rien n’était réciproque. Lorsqu’un personnage de film le disait de la sorte, cela se terminait toujours mal.
- J’ai envie d’être avec toi. Mais je ne sais pas vraiment comment se passent les choses. Je fronçai les sourcils en relevant la tête. Je n’ai jamais eu de copain, enfin si, deux, mais ça n’a jamais duré plus de… Je me tus. Ce n’était peut-être pas bon à dire. Les hommes n’aiment pas les femmes sans expérience m’avait-on dit un jour. Surtout à 27 ans. Enfin… Ils étaient idiots toute façons. Je réfléchis tout le temps, et vu que j’ai du mal à comprendre les émotions des autres et les miennes on me reproche souvent mes réactions et mon manque de spontanéité ou de je ne sais pas quoi. On me reproche pleins de choses. Que je ne suis pas douce ou que je dis trop les choses et… Enfin ça tu sais tout ça. Il était vrai que je n’avais pas été des plus agréables avec lui lorsque nous nous étions rencontrés. Mais…
Je soupirai en me mettant à genoux. Mes deux mains sur ses joues je me penchai doucement vers lui avant de fermer les yeux pour l’embrasser. Un baiser qui n’avait rien de court comme nous avions pu le faire avant. Je me tentai à une toute nouvelle sorte de baiser, pour moi du moins. A la française diraient certains, j’appelais plutôt ça « ce que j’avais vu dans les films romantiques », mais sûrement cela revenait-il au même, après tout.
Merci. Bon, on va pas se mentir, tu t'attendais à autre chose qu'à un simple, trop simple, merci. Et avant que tout autre réponse ne soit prononcé, tu t'imaginais déjà que t'avais fait de la merde, que t'en avais trop dit, trop fait, que tu t'étais juste emballé tout seul, que même si ça se trouve tu l'avais forcé pour les câlins, les baiser et tout autre contact physique que tu avais pu avoir avec elle. La culpabilité plein les pupilles, tu osais à peine la regarder. Peut-être qu'elle se sentait obligé d'être sympa avec toi parce que tu lui vais juste fait trop de peine.. Ou quelque chose comme ça. Tu te repasses tes propres paroles.. Non mais quel con aussi. Je t'aime. Tu lui avais vraiment dit ça ? Tu te sentais encore plus mal maintenant, parce que tu l'avais dit. Tu l'avais dit à quelqu'un d'autre. Quelqu'un qui n'était pas Alana, quelqu'un qui comptait vraiment beaucoup à tes yeux, quelqu'un que tu aimais vraiment. Tu l'avais dit et tu te prenais un refus. T'essayais de te dire que c'était pas si grave, c'est qu'un râteau après tout.. Ca fait mal à l'égo, mais tu pourrais t'en remettre. Normalement.
Comme une réponse presque inespérée, tu l'entends dire ces mots. J'ai envie d'être avec toi. Un élan d'espoir et puis, tu essayes de garder la tête froide. T'emballes pas trop. Sa phrase était restée en suspend et ça sentait le "mais". Tu avais du mal réfléchir, à savoir à quoi tu devais t'attendre.. Au moins, elle a l'air aussi paumé que toi. Mouaiiis. C'est pas non plus hyper rassurant en soi. Elle se levait.. Pour partir ? Ah non, pour venir à côté de toi. L'angoisse te tordait le ventre et le "Sam" sans rien aucune putain d'explications derrière te mettait encore plus l'estomac à l'envers. Bon euh, à un moment il s'agirait d'causer.
Le supplice de l'attente ne se fait pas plus long, Méduse finit par enfin te dire les plus, plus ou moins. Il y a bien un mais et tu ne sais pas franchement comment le prendre. Bizarrement, tu te sens soulagé lorsqu'elle te dit qu'elle ne sait pas comment faire, parce qu'elle a peu a eut peu d'expérience. C'est juste ça ? Enfin, à tes yeux, c'était beaucoup moins grave que tout ce que tu pouvais t'imaginer. Elle avait peur de mal faire les choses, des reproches qu'elle avait déjà entendu mais toi.. Toi tu t'en foutais de tout ça. C'était juste elle, sa façon de fonctionner et t'étais prêt à faire avec. Un nouveau mais se pointe et la réponse au bout était plutôt plaisante cette fois. Un baiser. Langoureux. Les yeux arrondis de surprise sur le coup, ils s'étaient fermés la fraction d'après, profitant de ce qu'elle t'offrait. Même s'il était maladroit, c'était pour toi le meilleur baiser que tu avais reçu depuis bien longtemps. Parce qu'il venait d'elle, parce qu'il était sincère. Tu répondais à ses lèvres, amoureusement. Tes mains s'étaient posés sur les siennes puis avaient longés son corps, l'attirant dans une douce étreinte.
Elle était là contre toi, dans sa jolie robe blanche, échangeant des baisers avec passion. Tu avais du mal à te dire qu'elle avait choisi un mec comme toi. Un peu paumé, blessé, mais qui faisait vraiment de son mieux. Pour une fois, tu te disais que tu portais bien ton nom de famille. Tu sépares tes lèvres des siennes, reprenant tes esprits. Ta main vint caresser sa joue, tandis que tes yeux bleus plongeaient dans les siens.
▬ Je m'en cogne que t'aies pas eut beaucoup de copains, tout comme je m'en cogne que tu sois pas assez ceci ou trop cela. J'te reprocherais jamais d'être simplement toi même.
Tu l'embrassas à nouveau, un baiser plus court, mais infiniment tendre.
▬ J'peux difficilement être plus clair que c'que je t'ai déjà dit.. Mais..
Que se soit pour elle ou pour toi, tu avais besoin de le dire. Au moins comme ça, tout sera vraiment clair. Pas forcément très romantique, mais clair. Et puis, tu n'étais pas franchement fleur bleue dans l'âme non plus alors..
Est-ce que j’avais honte ? Oui et non. Oui car je savais ce que les hommes pensaient, ou tout du moins, je pensais le savoir pour m’y être frottée, rarement, certes, mais tout de même. Mais non car je savais, de toutes les manières, que je ne pourrais changer certaines choses malgré tous mes efforts. A moins de suivre une thérapie, mais les psychologues et moi… A cette idée, je secouais la tête. En attendant, il fallait que j’agisse… Et j’avais agis. De façons réfléchie, ou presque. Je m’étais laissée portée par ce que je savais devoir faire, par ce que j’avais vu, et en tout cas pas par mon expérience. Mais je l’avais fait. Je l’avais embrassé. Particulièrement maladroitement, sûrement, mais je l’avais fait. J’avais senti ses mains se poser sur moi, m’attirer contre lui. Cela faisait tout de même un certain temps que je ne m’étais pas retrouvée dans cette situation, jamais même devrais-je dire, n’ayant jamais fait le moindre « premier pas physique ». Un premier pas des plus agréables, je devais me l’avouer. Mais cela s’arrêta, presqu’à regret. Ou non.
Je l’observai, silencieuse, tandis qu’il m’assurait que rien ne le dérangeait. Rien. Il ne savait pas ce qu’il disait. Il imaginait que tout était facile, peut-être. Il ne savait pas le compliqué que cela pouvait devenir lorsque l’on avait une personne qui ne comprenait que rarement les choses. Ou peut-être le savait-il, lui ? Peut être pensait-il différemment des autres ? Pourquoi aurait-il pensé différemment ? Il avait été marié. Ou presque. C’était tout comme. Il savait ce que la vie à deux impliqué. C’était différent. Son baiser, lui aussi, était différent de ce qu’il y avait eu entre nous jusque-là. Plus tendre, bizarrement beaucoup plus agréable même. Doucement, mes mains s’étaient emparées de sa chemise, la serrant comme si je ne voulais plus le lâcher. Je ne voulais plus le lâcher. Ce n’était en fin de compte pas qu’une simple impression. Et vint la question. Une question qui me fit plus plaisir que n’importe quelle déclaration, quoiqu’il eût tout de même été particulièrement claire. Mais j’avais besoin, pour savoir comment agir, de choses factuelles, et l’on pouvait, après tout, aimer sans être avec quelqu’un, n’est-ce pas ? Alors… Cette façon de faire me plaisait. Tout particulièrement. D’ailleurs, un léger sourire éclaira mon visage alors que je venais hocher la tête.
Je ne savais pas vraiment ce que je ressentais, seulement que j’avais envie d’être avec lui, et cela me suffisait. Les mots viendraient peut-être un jour, plus tard. Ce n’était pas le plus important.
- Au fait. Soufflai-je. Merci pour le repas.
Cela me semblait important à préciser, après tout n’était-il pas venu m’apporter un repas fait maison ? Un nouveau sourire et je vins m’installer plus confortablement entre ses bras. Dire que tout cela était naturel était quelque peu faux. Rien n’était naturel pour moi et j’étais, malgré moi, gênée par cette situation. Agréablement installée, à mon aise, heureuse, oui, mais gênée. Je ne savais pas réellement quoi faire. Devais-je retourner à ma place et faire comme si rien ne s’était passé ? Ou rester là, dans ses bras, mon dos posé sur son torse ? Mais dans ce cas… Nous ne pourrions plus manger, et il était venu pour ça à la base, donc… Fronçant les sourcils, je me trouvais être bien embêtée, sans savoir quoi faire, ce qui n’était, à vrai dire, pas habituel. J’avais, normalement, réponse à tout, après tout.
- Du coup… Du coup, il y avait une chose que je voulais, malgré tout, éclaircir. Je sais que je suis pas tactile mais… Je fronçai les sourcils. J’aime ces moments là ou ce qu’on a fait avant alors ça ne me gêne pas. Va pas croire le contraire. Je crois… Enfin non, il y a plutôt. Il y a une différence entre toi et les autres.
Laquelle ? Je n’en savais trop rien. Je savais seulement que ses bras me rassuraient. J’avais encore en tête ma dernière crise de panique en date d’il y a quelques mois. Crise qu’il avait réussi à gérer avant que ça se termine en… En nœud de boudin, c’était le cas de le dire. Boudin bien rattrapé aujourd’hui, au moins.
En attendant, je me dégageai de ses bras pour revenir à ma place, ou presque. Moyen comme un autre de prouver ma bonne volonté, quoique cela ne puisse être visible de façon claire, je ne fis qu’attraper mon assiette pour me déplacer plus près de lui. Un acte anodin pour la plupart des gens, mais un acte fort pour moi qui ne changeait pour ainsi dire jamais mes habitudes. Alors changer ma place pour manger… He bien c’était un grand pas dirons-nous, et tant pis s’il ne le remarquait pas, moi, je le savais. Et enfin, je mangeai avec appétit. Je n’avais pas mangé quelque chose d’aussi bon depuis… Beaucoup trop longtemps. Les pâtes trop cuites et le riz cru avaient bercé ces dernières semaines alors j’appréciais particulièrement le repas qui m’avait été apporté.
- La prochaine fois, préviens quand même avant de venir, bougonnai-je alors malgré tout.
Oui, non alors parce que tout cela était bien beau, mais j’avais tout prévu, moi, à la base. Et plus ! J’avais été forcée de m’adapter : chose dans laquelle j’étais bien loin d’exceller. Alors je pouvais effectivement faire des efforts de changement de place, mais il allait certainement falloir du temps avec que j’apprécie les surprises. D’ailleurs, en parlant de surprise… Le repas terminé, sans un mot, je débarrassai la tête avant de disparaître quelques instants dans ma chambre, juste le temps de récupérer un paquet que j’apportai dans le salon. Me rasseyant auprès de celui qui était devenu mon petit ami, je lui tendis son cadeau. Une chance que j’étais prévoyante, il avait été emballé la veille au moins…
La raison de ce choix de cadeau, une chevalière portant le portrait de Médusa était particulier, mais il venait d’une profonde réflexion sur le sujet. La drogue de Sam était rangée dans un tiroir, or, un tiroir s’ouvrait par la main. J’espérais donc qu’en usant de sa main pour ouvrir ce genre de tiroir, pour allumer rouler ou je n’en savais rien du tout, il puisse penser à moi, et surtout à tout le chemin qu’il avait parcouru pour en arriver là. Cela, peut-être, l’empêcherais de faire une bêtise… Cela dit, maintenant qu’il avait la chevalière, la bague, en main… Je me disais que cela allait peut-être faire mauvais effet, lui qui avait toujours ses alliances contre lui…
- Désolée. Soufflai-je. Je ne suis pas très douée en cadeaux…
Un hochement de tête, ça parait être un maigre réponse, mais au moins, c'est une réponse positive. Et puis à sa tête, tu le vois qu'elle est heureuse. Tu ne demandes pas plus, un pas à la fois comme on dit. Tu ne désespères pas qu'un jour elle arrive à s'exprimer sur ses sentiments et autres. La mawu te remercia pour le repas, tu souris simplement. Tu t'attendais à ce qu'elle reprenne sa place plus rapidement mais elle n'en fit rien, la bonde restait dans tes bras. Baaah. Si elle avait envie, ce n'était certainement pas toi qui allait l'en empêcher, mais ça risquait d'être compliqué pour continuer à manger.
▬ Du coup… Je sais que je suis pas tactile mais… J’aime ces moments là ou ce qu’on a fait avant alors ça ne me gêne pas. Va pas croire le contraire. Je crois… Enfin non, il y a plutôt. Il y a une différence entre toi et les autres.
Tu souris à nouveau. Tu aimais bien l'entendre dire que tu étais différent des autres à ses yeux. Ca comptait beaucoup, énormément même. Et puis, tu étais rassuré d'un autre côté, parce qu'en te disant ça, tu n'avais plus ce doute atroce d'avoir forcé les choses d'une façon ou d'une autre. Tu déposas un léger baiser dans son cou.
▬ D'accord. Tant que tu m'dis que t'es okay, ça me va.
Surtout que tu pouvais parfois te montrer un peu pot de colle. Tiens encore quelque chose qui vous différencie, ou qui vous complète l'un et l'autre, ça dépend du point de vu dirons nous. Jen finit par quitter tes bras pour reprendre sa place initiale. A un moment fallait bien finir de manger tout de même. Surtout que maintenant que tu étais sorti, vous aviez tout le temps que vous vouliez pour vous coller l'un à l'autre. Enfin plus ou moins.
▬ La prochaine fois, préviens quand même avant de venir.
Awh, la revoilà la méduse que tu connais bien. Râleuse. Sa bougonnerie, même si elle était justifiée, ne t'empêcha pas de lui lancer une petite taquinerie.
▬ J'repars si tu veux. Un léger rire sortit de tes lèvres avant de reprendre. Blague à part, promis, j'le ferais. J'me suis un peu emballé, j'avais hâte de revoir ma râleuse préférée.
Vous terminiez de manger dans la bonne humeur. C'était agréable, d'être là avec elle, parler de tout de rien, rire, la regarder avec un air d'abruti amoureux. Ouais. C'était vraiment agréable. Tu t'étirais un instant, content de constater que même à l'extérieur, tu réussissais à t'alimenter. Bon, ça faisait qu'un jour que t'étais sorti, mais y avait pas de raisons pour que tu ne le fasses plus. Jenny se leva pour aller..? Ce n'était pas très important puisqu'elle revenait aussi tôt avec un petit paquet en main. Elle te le donna et tu le regardais un peu perplexe. Un cadeau ? Avant de ne dire quoique se soit, tu l'ouvris avec précaution. C'était plutôt petit et tu te demandais bien ce que ça pouvait être, enfin, jusqu'à ce que tu vois la boîte. C'était vraisemblablement un bijou vu la tête que ça avait. C'était une chevalière pour être précis. Tu regardas la bague en or, elle était ornée d'une tête de gorgone, référence au surnom que tu avais donné à Jen. Tu ne doutais pas vraiment de toute la réflexion derrière ce cadeau et tu restas sans voix sur le moment. Une nouvelle bague à ton doigt ? Tu sentis ton cœur se serrer, mais ce n'était plus aussi douloureux qu'avant. Silencieux, tes yeux restaient rivés sur le bijou.. Puis après quelques secondes d'hésitation, tu finis par enfiler l'anneau à ton auriculaire. Là, elle était bien.
▬ Merci Jen.. C'est vraiment un très beau cadeau. Je.. J'sais pas quoi dire.
Tu la pris dans tes bras, la serrant un moment contre toi. Tu étais fier de ne pas avoir eu un sentiment de rejet et tu te rappelais de ces mots qui t'avaient donné un sentiment de liberté. Tu as le droit. Tu ne remplaçais, ni oubliais pas Alana et sans doute que tu porterais toujours vos anneaux à ton cou, mais tu avais fait de la place pour Jenny.
▬ Awh.. J'ai même pas pensé à venir avec quelque chose.
Enfin si, t'étais quand même venu avec de la bouffe, mais ce n'était pas vraiment un cadeau en soit.
▬ Enfin, j'ai pas de cadeaux mais j'ai une proposition à te faire. Et te sens pas obligé de dire oui hein. J'suis censé partir en France pour le boulot, j'ai pas encore accepté ou quoi.. Parce que j'avoue avoir un peu peur d'partir tout seul. J'ai le droit d'emmener quelqu'un alors.. Euh. Si tu veux réfléchir à la proposition..
Tu lui expliquas alors un peu plus en détails que vous seriez logés dans un hôtel de luxe, que c'était tout frais payé et que tu prendrais les dépenses en plus en charge. Tu y allais apprendre et perfectionner des techniques auprès de chefs français, avec d'autres collègues. Et puis la date surtout, c'était la semaine de noël, alors tu pouvais comprendre qu'elle ne puisse pas que se soit à cause de son travail ou de sa famille. Tu ne t'offusquerais pas d'un refus, mais tu espérais qu'elle dise oui dans le fond. Ca pourrait être sympa non ?
Les quelques instants de silence, alors que Sam restait fixé sur la chevalière me firent quelque peu grimacer. Bien sûr, une bague… Je n’y avais pensé sur le coup, mais seulement en lui offrant. Je n’aurais pas pu lui trouver pire cadeau, alors même que j’avais touché ses alliances. Et encore une fois j’avais fait preuve d’une indélicatesse certaine. Indélicatesse que Sam sembla soudain balayer. Mais disait-il cela pour me faire plaisir et ne pas me faire paraître pour idiote ? C’était possible. Après tout, Sam, lui, était-il généralement plus prévenant que moi. Sauf quand il faisait sa mauvaise tête. Mais ce n’était actuellement pas le cas, loin de là. Et puis… peut-être pensait-il réellement ce qu’il venait de dire ? Je grimaçai légèrement. Il était extrêmement pénible de ne pouvoir compter sur mon décryptage des gens afin de me décider sur une façon de voir les choses. Pire. Même si je lui faisais confiance, je craignais toujours que cela soit faux. Une sorte de grande méfiance vis-à-vis de tous. Mais pourquoi ferait-il autant d’efforts alors ? Mmh. Bon. Soit. Mieux valait que je ne réfléchisse pas vraiment pour le moment. Impossible. C’était tout bonnement impossible. Mon cerveau refusait simplement d’arrêter de réfléchir, me faisant penser à tout et n’importe quoi en quelques instants seulement. Secouant la tête, je revins dans le présent, observant Samael sans trop savoir si je devais sourire ou paraître triste, ne faisant indiquer qu’une neutralité parfaite sur le visage.
- Je n’ai pas besoin de cadeaux. Répondis-je en secouant la tête. Toi tu viens de revenir, ce ne serait donc pas logique que tu m’offres quelque chose. Ou tout du moins cela sortait de ma logique. Je n’ai pas réussi à quantifier la valeur de ton retour mais… enfin voilà. J’ai pensé que ça pourrait te faire plaisir. Et au cas où, tu penseras toujours à moi comme ça, et à tout ce que tu as fait depuis qu’on s’est rencontré.
Et cela faisait beaucoup de choses, c’était certain. Enfin… Nous n’allions pas revenir sur ce qui avait été fait. L’on m’avait d’ailleurs déconseillé de le faire : le passé devait appartenir au passé et je ne devais que le supporter, le soutenir dans le présent et le futur pour que le passé ne revienne pas à la charge. Le souci était, en un sens, que je vivais beaucoup dans le passé, de par mon pouvoir. De fait… J’allais moi aussi devoir apprendre à faire confiance en l’avenir, pour lui. Et cela était beaucoup plus difficile à faire qu’à penser, car l’avenir était l’inconnu, une chose que je ne pouvais pas maîtriser, une chose qui me faisait particulièrement peur tout comme… Silencieuse, j’écoutai la proposition de l’homme qui me faisait face. Partir ? En France ? Plus loin que Bâton Rouge ? Et surtout sans mes parents ou ma sœur... A cette pensée, je grimaçai de nouveau. Je n’étais jamais partie très loin de chez moi, par peur de me retrouver seule avec mon pouvoir, de toucher une chose sans pouvoir maîtriser les visions. Alors en France…
- Je… Heu…
Mais Sam serait là, lui. Et la journée ? Lorsqu’il serait au travail ? Mmh… Je n’aurais qu’à ne pas sortir de l’hôtel après tout. Nous demanderions si certains objets de la chambre avaient une histoire, nous les enlèverions, et je ne risquerais plus rien. Et avec son pouvoir, je ne risquerais que moins de chose encore. Alors pourquoi pas ?... Mais à plus de dix heures de vol d’ici…
Les yeux fixés sur le sol, je me trouvais être en pleine réflexion. Il fallait que je mette un mot sur ce que je pensais, je ne pouvais décemment pas rester silencieuse. « Perturbant » m’avait-on dit une fois, sur cette façon de ne pas dire les choses.
- Je ne suis jamais partie aussi loin. Avouais-je alors à mi-mot. Est-ce que… Est-ce que tu peux me laisser quelques jours pour y réfléchir ? Je… Je soufflai. Je ne me sens pas à l’aise dans les endroits inconnus, et même si je me force pour le faire, dix heures de vol… C’est beaucoup… Mais… la date me conviendrait enfin… Ma famille est juive, on ne fête pas Noël, seulement Hanouka alors… Mais… J’ai pas non plus envie d’être un poids et… Enfin te faire perdre du temps je veux dire…
Mes pensées étaient bien peu ordonnées, mais au moins avait-il les quelques tenants et aboutissants qui me faisaient douter. D’ailleurs, il pouvait apercevoir la panique monter en moi car plus les mots étaient prononcés, plus mon visage se fermait et ma tête se baissées. La respiration accélérée, je n’étais pas vraiment loin de la crise de panique tant les choses me paraissaient énormes. Un trop plein d’émotion, aussi bien positive que négative que je ne savais gérer avait pris place dans mon cerveau, encore quelques courtes minutes, et la crise de panique serait installée.
Tu regardais la bague à ton doigt tout en écoutant la mawu parler. "Et au cas où, tu penseras toujours à moi comme ça, et à tout ce que tu as fait depuis qu’on s’est rencontré." Même si tu es assez confiant pour ton avenir, il y aura sans doute des moments où tu te sentiras un peu perdu, de tentations, d'obscurité. Tu n'auras qu'à regardé cette bague pour te rappeler pourquoi tu as fait tout ça. Une sorte d'ancre constante. Tu la relâchas peu après ta proposition de venir avec toi en France. Elle restait silencieuse, surement entrain de réfléchir. En même temps, tu ne t'attendais pas à ce qu'elle te donne une réponse immédiatement, qu'elle soit positive ou négative. Et vu sa façon de répondre tu commençais sérieusement à regretter ne serait-ce que lui avoir proposé. Tu la pressas contre toi
▬ Calme toi. Je ne t'oblige à quoique se soit, d'accord ? Tu peux prendre ton temps pour répondre, tout comme tu as le droit de me dire simplement non.
Tu passais une main dans son dos le frottant avec douceur. Awwh. Faudrait que tu réfléchisses un peu plus à comment annoncer les choses à l'avenir.
▬ T'angoisses pas plus pour ce soir.. Tu y penseras à tête reposée ? Ca fait beaucoup d'un coup, j'ai pas réfléchis, désolé.
Un baiser sur la joue en guise d'excuse. T'avais un peu de mal à t'empêcher de montrer ton affection à travers tes gestes, bon en même temps, ça faisait un moment que vous vous n'étiez pas vu alors.. Juste pour ce soir, tu serais un peu collant. D'ailleurs jusque quand tu pouvais rester ici ? Ta présence avait déjà chambouler sa soirée, tu ne voulais pas trop abuser en t'imposant d'avantage.
▬ Hum.. Tu préfères que j'rentre chez moi ce soir ? Ou..
Tu secouas légèrement la tête.
▬ Enfin j'peux rester encore un peu.. J'veux dire, si t'as envie. J'veux pas t'embêter, j'suis déjà passé à l'improviste et tout.. T'avais peut-être des trucs de prévu ou du taff.. Je.. Aaawh p'tain. Désolé.
T'aurais peut-être du écouter ta petite voix interne qui te criait que c'était pas une bonne idée. T'avais juste réussi à la faire angoisser. Bon y avait eut du bon aussi.. Mais on retient toujours mieux le négatif.
Ma respiration s’accélérait très franchement. Trop de choses me venaient en tête, trop d’interrogations, d’incertitudes, trop de choses à penser en même temps pour un cerveau déjà en ébullition constante. J’étais en train de passer du mauvais côté, celui que j’évitais toujours, la panique, là où je ne contrôlais plus rien, pas même ma propre pensée. Et à vrai dire, cela aurait été acté si les bras de Samael ne m’avaient pas enserré à ce moment-là. Et puis, contre lui, l’écoutant parler, sentant sa main passer dans mon dos, je me calmai. Doucement. Tout doucement. Ma respiration se faisait lentement plus profonde, plus régulière, ma main vint attraper sa chemise et je soufflai enfin un soupire. Je n’étais certainement pas sereine, mais le pire était passé, du moins tant que je ne recommençais pas à trop penser. Difficile à faire, au vu du sujet, évidemment, mais la proximité du Mawu semblait me donner une raison de résister à cette tentation de panique.
- Il faut… Je secouai la tête.
Non, je n’allais certainement pas en parler à ma sœur. Je savais pertinemment ce qu’elle me dirait. « Ne sois pas idiote Jen, fonce avec lui passer des nuits torrides ! Et t’en fais pas, je dis rien à papa, comme ça, il risque pas de se faire tuer une nuit s’il est pas circoncit. ». Grimaçant, je secouai la tête. Non décidément, ce n’était pas un bonne idée que de lui demander son avis. Il allait falloir que je trouve la réponse toute seule. J’en étais capable après tout. J’avais vingt-sept ans ! J’étais une adulte responsable ! et visiblement tout à fait nulle en relation humaine. Il s’était excusé, alors même que c’était moi qui avais paniqué. Secouant de nouveau la tête, après son baiser, je me reculai doucement, une légère moue au visage, me sentant tout à fait… Honteuse ? Oui, c’était cela, honteuse. J’étais honteuse de la crise que je venais de faire et qui n’avait rien de normale. D’ailleurs, à bien y réfléchir, je me sentais rarement honteuse, et je n’avais jamais vraiment réfléchi au fait que cela pourrait me poser problème de ne pas réagir comme tout à chacun. Alors… Pourquoi me retrouvais-je à avoir honte de mon intelligence surement supérieure aux autres mais qui avait entraîné, logiquement, une faiblesse dans mes émotions ?
- Je… Je te promets de te donner une réponse vite. Dis-je alors en secouant encore et toujours la tête. Mais… Est-ce que tu peux me promettre une chose ? Je soupirai. Si je dis oui, et j’ai pas dit oui, ne me force pas à trop sortir si je te dis que je ne peux pas. Je secouai la tête. Je me connais, et même si j’en ai peut-être envie, j’ai peur que… Que tu vois là-bas ce que tu vois pas ici parce que je serais plus stressée. Peut-être. Sûrement en fait alors…
Je secouai la tête. J’étais en train de m’enfoncer et même moi je le voyais. Mais c’était un fait. Sûrement, si nous partions ensemble, tout le charme disparaîtrait, parce qu’ici, je pouvais toujours me cacher chez moi en cas de problème, je pouvais me raccrocher à ma famille et surtout à ma sœur si quelque chose de mal se passait, si j’étais stressée. Là-bas, il serait seul avec moi alors… Est-ce qu’il le supporterait ? Je n’en savais rien. Je savais que ça pouvait être difficile.
En attendant, Sam venait de reprendre sur un sujet bien plus actuel et je clignai quelque peu des yeux en l’écoutant. Rentrer ? Mais… Il venait d’arriver… Pourquoi voulait-il rentrer ? Peut-être que je l’avais déjà dégouté ? Non ? Était-ce possible de dégouter quelqu’un aussi vite ? Peut-être était-ce déjà fini ? Il ne voulait pas m’embêter ? Alors que c’est moi qui étais impossible ? Clignant de nouveau des yeux, je baissai la tête, quelque peu silencieuse. Mais si je lui disais de rester, cela ne faisait-il pas trop « accroché » ? Nous venions de nous mettre ensemble non ? Alors, ce n’était socialement pas acceptable que de faire cela. D’ailleurs, nous n’aurions pas dû nous embrasser avant le troisième rendez-vous. Vrai rendez-vous je veux dire. D’un autre côté… Nous avions déjà dormi ensemble donc… Je ne relevai la tête qu’en entendant son « désolé. Pourquoi est-ce qu’il s’excusait encore ?
- Arrête de t’excuser. C'est moi. Dis-je alors. Et… Tu peux rester. Enfin si tu en as envie. Je peux même dormir sur le canapé. Je secouai la tête. Ah non du coup. On est ensemble.
Oui, donc, cela signifiait dormir ensemble. Mais un couple qui dormait ensemble, ne faisait-il pas… Instantanément, je relevai les yeux vers lui l’air quelque peu hagard et les joues rosissantes.
- Je… Heu… C’est juste que… Je n’ai jamais dormi… Avec un homme. Enfin si. Mais avec un copain… Mais… Enfin… Si. Aussi… Mais en… Je secouai la tête. Enfin tu sais quoi…
Non, il n’allait certainement pas savoir, ou alors il allait falloir que je m’incline bien bas face à la résolution de cette devinette dans laquelle je me perdais moi-même.
