“Make no mistake, the beast inside is sleeping, not dead.”
Le marché de St. Roch, au coin des rues St. Roch et St. Claude. Est-ce que l’endroit méritait que l’on fasse un détour? Non. Il était loin d’être du calibre du marché de Camden à Londres, ou du marché de Marrakech, sans parlé du grand souk du Caire. Non, aucun détour. Néanmoins, les onze restaurateurs locaux et le bar de cocktails artisanaux méritaient qu’Evelyn arrêtât ses pas lorsqu’elle passait devant le marché – ce qui se produisait une fois tous les six mois. Elle pouvait aussi leur accorder un point supplémentaire : aucun écriteau interdisant les surnaturels n’ornait leur façade. De toute façon, avec toutes les allées et venues, ce serait difficile à gérer. Le décor ne changeait jamais. Les murs et les grandes colonnes s’affichaient toujours d’un blanc immaculé. De la couleur aurait égayé l’endroit, selon Evelyn. Mais bon… elle n’était pas designer intérieur, alors, qu’est-ce qu’elle en savait?
En ce jour, le marché était bondé, comme à son habitude; un véritable brouhaha. La louve traça sa route jusqu’à un stand bien précis, car elle avait une envie bien précise : manger les meilleurs boulettes de viande de toute la Nouvelle-Orléans. …Non. Non. Un peu exagéré comme affirmation… Les meilleures boulettes de viande de tout Bywater. Voilà.
Elle tapa du pied dans la file d’attente, seul signe visible de son impatience. Il faut dire qu’elle commençait à avoir faim et que l’idiot à l’avant de la file semblait avoir commandé tout le menu. La faute à Evelyn, peut-être, aussi, car elle aurait dû commencer par aller se chercher une bière – ça pouvait aider, pour l’attente. Elle passa les doigts sur la pierre à son cou, distraitement. Enleva une mousse sur son t-shirt ample à carreaux. Rentra les mains dans les poches de ses jeans bleus foncés.
Dehors, un ressentit de 12 degrés Celsius avec du soleil; Evelyn avait l’intention d’aller manger à l’une des tables extérieurs. …C’est-à-dire, si on la servait un jour; et elle commençait à avoir des doutes. Elle tourna vivement la tête lorsqu’on percuta son épaule, pour offrir un regard noir à l’imbécile qui s’excusa à peine. Mais Evelyn s’en moquait, une crinière blanche venait de capter son attention.
Elle quitta la file d’attente, avança lentement comme sous le coup d’un envoutement. Et envoutée, elle l’était quand même un peu : par la vision d’une louve qui aurait dû être morte, qui aurait dû être un tas d’os. Il y avait plus de trente ans, en Angleterre, cette crinière blanche l’avait sournoisement attaqué… et à son réveil, on lui avait affirmé qu’on l’avait vengé. Un mensonge, ou bien ils n’avaient pas eu la même définition du mot vengeance. Voir cette femme… ce petit bout de femme, la ramenait à cette époque révolue, quand son mari et ses enfants vivaient encore.
Un grognement, elle traça son chemin, bousculant sur son passage, se rapprocha de cette louve dont elle ignorait le nom. C’est qu’en réalité, leur dernière rencontre avait été assez expéditive. Cependant, Evelyn n’oubliait jamais – jamais – un visage. Surtout un visage traître. Elle se rappela soudainement les derniers mots qu’elle lui avait dit : "Va jouer ailleurs, petite, ce territoire n’est pas le tiens." Arrivée tout près de la louve, Evelyn attendit d’avoir attiré son attention pour lui dire, ses yeux s’illuminant d’ambre une courte seconde :
- De tous les lieux… C’est ici que nos chemins se croisent à nouveau. J’espère que tu te souviens de moi? J’aurais moins de plaisir à frapper une amnésique.
La ruche humaine bourdonnait autour d’eux. Deux personnes passèrent entre les quatre pas s’éparant les deux louves, puis Evelyn reprit la parole :
- J’aurai besoin d’un nom cette fois, à graver sur ta tombe.
Dernière édition par Evelyn Jacobs le Ven 10 Juil - 19:42, édité 2 fois
Une belle matinée s'annonçait. Fraiche mais avec un très beau soleil. Kaia comptait bien en profiter pour aller se promener. Par ce temps là, il y aurait du monde dehors et surement des chasseurs aussi ! Ou peut-être qu'elle se prendrait une petite journée de repos ? C'était bien mérité après tous les bouleversements dans sa vie ces derniers temps... Mouais. Elle n'aimait pas ne rien faire. Et comme d'habitude, elle n'avait presque pas dormi de la nuit, une petite heure tout au plus. Mais au moins, marcher, prendre l'air, lui permettrait de s'aérer l'esprit et de réfléchir plus sereinement, et tranquillement, à sa nouvelle fonction au sein de la meute. Elle n'avait pas réfléchi sur l'instant, elle avait agi, tout simplement.
Les mains dans les poches, elle leva les yeux vers le ciel puis les ferma, profitant un court moment de la douce chaleur du soleil. Jusqu'à ce qu'une douce odeur arrive à ses narines. Elle inspira profondément puis tourna la tête dans la direction que son nez lui indiquait. Mmh. De la viande. Naturellement, elle commença à s'y diriger, elle avait une petite faim. Son estomac gargouilla en réponse à ses pensées. D'accord, une grosse faim alors !
Son odorat la mena jusqu'à un marché assez bondé. Elle observa la foule et s'y inséra pour trouver la source de la bonne odeur. Elle repéra vite de très belles colonnes blanches. L'ambiance avait un côté ancien mais propre. C'était joli dans l'idée quoiqu'un peu blanc...mais au moins, ce n'était pas rose ! Elle s'inséra dans la bonne file et compta ses petites pièces. Grâce à la taxe imposée à la meute, elle avait un peu d'argent mais faisait toujours en sorte de ne jamais trop en dépenser...A part le strict minimum, elle n'achetait que très rarement pour son plaisir personnel. Elle prit alors la décision d'acheter la plus petite barquette de boulettes et s'éloigna en les savourant. Elle aurait encore faim après mais elle rentrerait pour se faire un bon repas bien copieux !
Appuyée contre un pilier, elle se mit à observer autour d'elle, regarder chaque passant, les étudiant d'un air tranquille. Combien étaient des créatures surnaturelles ? Combien étaient de simples humains vivant une petite vie paisible ? Et surtout, combien de chasseurs ? Au bout d'un moment, elle sentit une présence insistante. Elle tourna la tête vers la femme qui la fixait sans détour. Tiens tiens tiens. Une revenante. Elle afficha un sourire laconique, comme si elle se moquait littéralement d'elle. Ce qui n'était pas tout à fait faux.
- Bien sur que je me souviens de toi. Une faible louve. Je ne risque pas d'oublier la raclée que je t'ai mis la dernière fois...
Elle croisa son regard, se montrant moqueuse...même si elle devait lever la tête pour bien la voir. Elle avait encore plus horreur de rencontrer des loups plus grands qu'elle...Résultat, elle prenait un malin plaisir à lui rappeler qu'elle l'avait vaincu. Et à en rajouter une couche, à améliorer la réalité pour son égo personnel. A la remarque suivante, elle haussa un sourcil puis secoua la tête.
- Tu n'arriveras à rien, comme la dernière fois. N'oublies pas que tu n'es qu'une pathétique louve...
Des insultes ? Oui mais c'était elle qui avait commencé en la traitant de petite à leur dernière rencontre ! Kaia ne faisait que continuer une vieille dispute.
- Mais je vais te faire une fleur. Je m'appelle Kaia. Kaia Steinn, retiens bien ça. Et toi, comment t'appelles-tu ? Que je puisse mieux raconter qui j'ai vaincu.
Elle continuait de sourire, d'un air moqueur qui ne la quittait toujours pas en cet instant. Pourtant, elle restait parfaitement calme, ne voulant pas attirer l'attention des badauds autour d'eux. Ce n'était pas l'endroit pour se battre, physiquement parlant en tout cas. Verbalement par contre, c'était tout à fait possible ! Et en attendant, elle goba une nouvelle boulette, la savourant sans quitter des yeux son adversaire du passé...et désormais du présent également.
“Make no mistake, the beast inside is sleeping, not dead.”
- Bien sur que je me souviens de toi. Une faible louve. Je ne risque pas d'oublier la raclée que je t'ai mis la dernière fois...
La bouche d’Evelyn s’étira en un léger sourire en coin devant ce qui était une insulte facile et une provocation évidente. À une autre époque, la louve aurait réagi au quart de tour. Elle s’était assagit; un peu. Elle était devenue réfléchit; la plupart du temps. Alors, elle se contenta de demander son nom à la louve blanche, pour savoir quoi graver sur sa tombe. Mais, bien franchement… elle avait surtout dans l’idée de balancer son corps sans vie aux crocodiles, pour qu’ils se régalent. Une façon bien efficace de se débarrasser d’un cadavre encombrant. Et, comme on dit, pas de corps, pas de mort, pas de crime.
- Tu n'arriveras à rien, comme la dernière fois. N'oublies pas que tu n'es qu'une pathétique louve...
Evelyn allait lui faire ravaler son sourire et ces insultes à coup de poings. D’ailleurs, elle était étonnée; que la petite louve ait survécu au passage du temps avec une telle arrogance. Oui, Evelyn se serait imaginée le contraire; que quelqu’un lui aurait fait la peau pour avoir parlé à tort et à travers.
- Mais je vais te faire une fleur. Je m'appelle Kaia. Kaia Steinn, retiens bien ça. Et toi, comment t'appelles-tu ? Que je puisse mieux raconter qui j'ai vaincu.
Sa réponse ne se fit pas attendre, d’un ton calme mais tranchant :
- Tu n’es qu’une petite poupée fourbe et insolente.
L’insulte avait été mûrement choisit; car c’était peut-être là véritablement le talon d’Achille de la louve. Car le temps avait passé et, malgré tout, la petite louve avait peu changé. Et elle ne grandirait pas davantage. Certaine personne était petite et voilà tout; le temps ne changeait pas ce fait. Et Evelyn avait également bien choisit ses mots; fourbe et insolente, cela semblait être les principales qualités de la crinière blanche.
- Mon nom ne te servira à rien, tu n’auras pas l’occasion de vivre au-delà de cette journée.
C’était un peu présomptueux, oui. Evelyn l’était, quelques fois. Mais elle était certaine d’une chose, une certitude un peu dangereuse : elle pouvait battre la louve. Elle avait compris l’erreur qu’elle avait commise; elle avait tendu la joue, tourner le dos, il ne fallait pas s’étonner qu’une louve fourbe saisisse l’occasion qui se présentait. Une erreur, et elle avait appris la leçon. Nos ennemis nous rendent plus fort. Et Evelyn était forte; elle avait gagné des combats, en avait perdus, avait léché ses plaies, elles avaient cicatrisés et elle avait appris à se battre. Elle aimait un combat noble, mais elle comprenait qu’avec Kaia il ne pouvait pas y avoir de combat noble. Il n’y avait aucune noblesse dans cette louve.
- Tu attaques sournoisement les gens, tu parles beaucoup, mais, Kaia Steinn, comment te débrouilles-tu dans un vrai combat?
Une question bien simple mais qui pouvait mener à un affrontement. Pas ici, pas maintenant… mais la ruelle n’était pas bien loin. Et avec tout ça, Evelyn avait perdu sa place dans la file d’attente; pour la peine, elle aurait bien eut envie d’étouffer Kaia avec ses appétissantes boulettes de viande.
Kaia ne quittait pas des yeux la louve qu'elle pensait ne plus jamais revoir...Ce qui l'aurait parfaitement arrangé d'ailleurs. Ce n'était pas vraiment un plaisir de croiser de vieilles connaissances...Surtout quand il n'y avait que rancune entre elles deux. Mais elle n'en montrait rien. Elle savourait ses boulettes en lui répondant et en l'envoyant clairement voir ailleurs...même si elle ne refuserait pas un combat. Histoire de lui montrer sa place à cette louve misérable. Lorsque cette dernière reprit la parole, ce fut pour se montrer aussitôt insultante...et taper droit dans le mille ! Figée, Kaia fronça les sourcils avant de la saisir par le col.
- Je ne suis pas une poupée !
Elle avait prononcé chaque mot distinctement comme si la femme en face d'elle ne comprenait rien.
- Et je te le prouve quand tu veux, où tu veux ! Après tout, il faut bien laisser une petite chance aux faiblardes comme toi, n'est-ce pas ?
Son ton était mauvais, venimeux même. Sa congénère avait prononcé les mots qu'il fallait pour la faire sortir de ses gonds et Kaia ne se retenait de lui en mettre une, uniquement parce qu'elles étaient entourées par beaucoup de monde. Si elles avaient été seules, elle n'aurait pas hésité un seul instant à lui sauter à la gorge ! D'ailleurs, un léger grognement s'échappait de la sienne, trop discret pour de pauvres oreilles humaines mais certainement parfaitement audible pour la louve en face d'elle.
- Très bien, si tu veux crever comme un animal errant sans nom, c'est dans ton droit. Il ne faudra pas venir se plaindre après...même si je m'en fous royalement après tout. Tu n'as aucune valeur à mes yeux.
Son regard brillait alors qu'elle continuait sur un ton pas du tout aimable. Autour d'elles, les passants leur jetaient des regards intrigués mais personne n'osaient intervenir. En même temps, rien ne leur prouvait qu'elles étaient humaines et c'était donc risqué d'agir lors d'une querelle entre deux inconnus. La demoiselle lança une nouvelle pique et Kaia répondit par un nouveau grondement avant d'ajouter :
- Des combats j'en ai mené plus d'un dans ma vie. Et ils n'ont rarement été aussi court et pitoyable que celui que nous avons partagé à l'époque. Tu ne connais pas ma vie, je me suis largement assez battu pour te mettre la dérouillée que tu mérites ! Surtout que je suis sure qu'en tant que pathétique louve, tu n'as presque rien fait de la tienne...Tu es faible, tu l'as toujours été et tu le restera jusqu'à la fin. Ta fin. Qui est de plus en plus proche.
Elle la regardait droit dans les yeux dans un affrontement sans coups...pour l'instant. A pars lui attraper le col, elle ne l'avait pas touché. Mais ce n'était que le début, cette discussion allait s'envenimer, c'était une certitude. Elle le sentait, au plus profond de son être. Et elle avait hâte ! La fureur faisait bouillir chaque cellule de son corps, elle avait besoin de la remettre à sa place cette pauvre louve !
“Make no mistake, the beast inside is sleeping, not dead.”
Poupée. Comme elle le pensait, elle avait misé juste en affublant l’autre louve cinglée de ce joli sobriquet. Et elle ne devait pas être la seule à avoir pensé à cette insulte; c’était facile, poupée, le mot qui venait facilement à l’esprit quand on regardait Kaia. Les yeux d’Evelyn se plissèrent de contrariété quand l’autre osa froisser ses vêtements, pour ensuite affirmer qu’elle n’était pas une poupée. Kaia pourrait le crier, l’écrire sur les murs, se le faire tatouer, ça ne changerait pas grand-chose. Peut-être même que dans une centaine d’année, elle aurait l’air d’une poupée fripée.
- Je te conseille de virer tes sales pattes.
Un combat, où elle voulait, quand elle voulait? Maintenant allait faire l’affaire, pas besoin de céduler un rendez-vous. Evelyn laissa également aller un grognement, à l’instar de l’autre. Si l'autre croyait impressionner Evelyn, ce n’était pas gagné. En attendant, la petite louve avait encore une main sur le col d’Evelyn, et ça allait barder si elle ne lâchait pas bien vite.
- Très bien, si tu veux crever comme un animal errant sans nom, c'est dans ton droit. Il ne faudra pas venir se plaindre après...même si je m'en fous royalement après tout. Tu n'as aucune valeur à mes yeux.
Se plaindre après? Si elle mourrait, Evelyn ne pourrait certainement pas se plaindre. Mais ce n’était pas dans ses intentions. Et si l’autre louve croyait qu’Evelyn allait se laisser mourir sans combattre, elle allait avoir une surprise. Une grande surprise. Aucune valeur? Un sourire sardonique apparut aux lèvres de Jacobs; l’autre n’avait aucune valeur non plus à ses yeux, et d’ailleurs elle répliqua avec amusement :
- Tu n’auras de la valeur qu’aux yeux des crocodiles, quand je leur aurai balancé ton cadavre pour m’en débarrasser. Comme petit encas. Très petit encas.
Parce qu’elle était une petite poupée, évidemment. Evelyn posa sa main sur le poignet de Kaia, qu’elle serra avec force pour l'obliger à lâcher sa prise. Et son autre main fit voler le plat de boulettes au sol. Ah, si Evelyn ne pouvait pas en profiter, y’avait aucune raison pour que Kaia puisse en profiter. Ce qui attira tout de même quelques regards supplémentaires. Puis l’autre commença un monologue, sur les nombreux combats qu’elle avait supposément eus, sur le fait qu'elle pouvait lui mettre une dérouillée, et quelques insultes au passage, avant de conclure sur la mort prochaine et très hypothétique d’Evelyn.
Le ton de la louve était glacial lorsqu’elle répliqua:
- Faible, pathétique? Tu n’as que ces mots à la bouche? Tu devrais revoir ton registre d’insultes. Et si tu crois que ça m’atteint… Tu es bien idiote. Et elle gronda : - Toi et moi, dans la ruelle, maintenant.
Face à l'autre louve, Kaia ne lâchait pas de terrain. Elle la tenait fermement tout en la fixant droit dans les yeux, bronchant à peine à sa demande.
- Tes conseils, tu peux te les garder, ils ne m'intéressent pas. C'est bien plus amusant de te rendre complètement chèvre ! Quoique, tu es déjà une proie n'est-ce pas ? Ça ne te change pas beaucoup...
Kaia s'amusait bien à la provoquer mais ce n'était qu'un juste retour des choses à ses yeux. Sa congénère avait dit les mots qu'il ne fallait pas. Elle allait le payer ! Néanmoins, son adversaire ne mâchait pas ses mots non plus et appuyait là où ça faisait mal, rajoutant une couche sur sa taille. Elle émit un nouveau grognement, plus fort que les précédents cette fois. Le message était clair, elle allait lui faire la peau ! Et sa colère ne s'arrangea pas quand la louve fit voler son plat, tout en serrant fortement son poignet.
- Parfait ! Tu vas le regretter idiote !
Elle se dirigea alors vers la ruelle la plus proche tout en la surveillant du regard. Il ne fallait jamais montrer son dos à un ennemi, n'est-ce pas ? Une fois la destination atteinte, elle lança à peine un regard aux fenêtres et passages, se concentrant sur la louve.
- Bien, tu es prête ? Je ne vais pas te faire de cadeaux. Tu vas me supplier d'abréger tes souffrances !
Elle grognait presque en continu maintenant, signe que la lutte allait commencer. Ses mains avaient commencé à se transformer également, des griffes et des poils apparaissant. Mais tout son corps suivait le mouvement, des poils blancs poussaient par touffe sur sa peau, son museau s'allongeait lentement mais surement...Sa fureur était elle, qu'elle n'arrivait pas à maîtriser sa transformation. Et puis, de toute façon, ce serait bien plus simple ainsi ! Son adversaire aurait la correction qu'elle méritait ! Sans même avoir fini de se transformer, elle s'élança, cherchant à lui donner un bon coup de griffes de sa patte droite pendant que sa patte gauche encore plus ou moins humaine, se ferma dans l'idée de lui donner un coup de poing dans le ventre.
Ses grognements étaient toujours présents, forts, et continu. Une façon de menacer, de lui imposer une idée de supériorité. Elle était une Alpha, elle ne pouvait pas se laisser vaincre par elle ! Même si dans sa fureur, elle ne réfléchissait plus. Elle frappait et cherchait juste à la mettre à terre. On verrait plus tard pour le reste, ne se souciant pas de faire du bruit...
“Make no mistake, the beast inside is sleeping, not dead.”
Une proie, hein? Evelyn allait lui montrer qui des deux étaient la proie. Kaia allait amèrement regretter ses paroles, allait amèrement regretter d’avoir mis les pieds dans ce marché, dans cette ville, sur ce continent. Les deux louves allaient terminer ce qu’elles avaient commencé plus de trente ans plus tôt. Et Evelyn allait s’amuser.
Non, il ne fallait jamais tourner le dos à un ennemi. Kaia lui avait au moins appris ça; elle lui aura au moins appris une chose avant de mourir. Car Evelyn avait bien l’intention d’en arriver là; ce serait elle, ou ce serait la louve blanche. Après tout, cette situation ne pouvait pas se régler autrement. Et Evelyn se sentait fébrile.
Elle ne quitta pas des yeux l’autre, son visage était fermé, une flamme guerrière, une flamme d'hostilité brûlait dans ses yeux bruns. Si elle était prête? C’était quoi, cette question idiote? I was born ready!, aurait-elle pu répliquer, ou encore Ta gueule!, mais elle se contenta d’un grondement menaçant. Et Evelyn se sentait bouillir de colère.
Doucement, son visage commençait à prendre des allures canines et ses grognements s’intensifièrent. Puis, ses deux mains furent des griffes, et son gilet commença à craquer sous la pression. Elle aimait bien son gilet à carreaux, c’était quand même dommage. À l’instar de Kaia, sa transformation n’était pas complète.
Evelyn évita le coup de griffes qui aurait pu l’éviscérer, mangea le coup de poing dans le ventre, mais ne se laissa pas déstabiliser par la louve blanche. Et elle répliqua aussitôt avec une rage égale à celle de son adversaire : donna un premier coup de griffes, visant le cou, donna un second coup de griffes, visant la poitrine, puis tenta de bousculer Kaia et, à l’aide de ses jambes, tenta de la faire tomber au sol.
La, dans cette ruelle et face à l'autre louve, Kaia se sentait pleine de rage incontrôlée. Elle n'avait qu'une envie : se débarrasser de son adversaire. Définitivement. Elle n'avait donc pas attendu d'être entièrement transformée pour l'agresser et tant pis si elle était louve par endroit, humaine à d'autre. Par contre, les grondements qui lui échappaient étaient clairement animal et risquaient d'être entendus assez loin...Mais elle s'en fichait royalement. Sur le coup, elle ne se préoccupait pas des humains et de quoi que ce soit les concernant. Il n'y avait que ce tête à tête qui avait de l'importance.
Son ennemi évita le coup de griffes mais se prit le coup de poing, parfait ! Un genre de ricanement ressemblant plus à un aboiement lui échappa. C'était un début, la suite suivrait bien rapidement. Mais évidemment, la demoiselle répliqua, elle aussi partiellement transformée. Kaia bondit en arrière pour éviter les coups de griffes, grognant en réponse à son attaque. Heureusement, les griffes ne l'avaient pas touché mais elle ne put esquiver le reste, se retrouvant au sol. Néanmoins, elle se redressa aussitôt, fonçant sur sa cible en cherchant à planter ses griffes dans les cuisses de l'autre louve. Quitte à être au sol, autant chercher à ce que tout le monde soit à égalité ! Elle en profita pour avancer ses crocs du corps adverse, claquant ses mâchoires à plusieurs reprises en signe de menace...Si la jeune femme n'arrivait pas à se dégager ou se défendre, elle allait mordre. Et elle ne comptait pas le faire à moitié. Oh non ! Elle avait dans l'idée de lui arracher un morceau de la cuisse, histoire de l'handicaper un bon coup ! Un loup avec une jambe en moins, c'était un loup proche de la mort !
Les oreilles en arrières, les crocs et les griffes en avant, Kaia ne ressemblait presque plus à l'humaine qu'elle était, mais bien plus à un lycan, certes un peu plus petit que la moyenne mais qui profitait de chacun de ses atouts. Et chacun de ses gestes, de ses grognements indiquaient clairement ses intentions : je vais te tuer. Ta lacérer. Te déchiqueter. Jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien à part des lambeaux !
Premier jour de repos depuis un temps certain. Entre la meute et mon emploi en tant que médecin, je devais avouer que je n’avais réellement plus le temps de profiter de journées de congé. Enfin. C’était aujourd’hui chose faire, et pour fêter l’occasion, je m’étais même décidé à faire le marché. Oh ce n’était pas réellement pour acheter de quoi faire la cuisine, quoique cela puisse m’arriver, mais seulement pour profiter du lieu, de son effervescence, de son ambiance. Ainsi que pour profiter des super corn dog que faisait le marchand au coin de la rue. Je les avais découvert en arrivant à la Nouvelle-Orléans, et je ne m’en passais réellement plus. Ainsi flânai-je dans les rues, observant les étals, les vendeurs et les acheteurs sans discontinuer. Il faisait bon, beau, alors autant en profiter, après tout. D’autant qu’il me semblait que j’avais particulièrement bien choisi mon jour. Une animation semblait être en cours, au vu du regroupement qui se formait non loin de là. Une animation bien bestiale d’ailleurs. Fronçant les sourcils de curiosité, je m’approchai du groupe déjà formé. Etaient-ils en train de faire des combats de chiens ? Je croyais cela interdit depuis de très nombreuses années…
Le spectacle qui me fut donné fut bien mois réjouissant. Deux louves se battant sans, visiblement avoir l’intention de prendre de gants. Je tentai de me concentrer sur l’identité des deux louves, les avais-je déjà vu ? Peut-être pouvais-je faire quelque chose… La vérité me frappa lorsque je fis face à la première. Impossible. Je fronçai d’autant plus les sourcils, espérant réellement me tromper quant à son identité. A vrai dire, j’avais toujours plaidé pour la paix entre tous. Je n’appréciais nullement la violence et encore moins lorsqu’on en faisait l’étalage face à d’autres, en plein milieu de la rue qui plus est. Depuis ma prise de rôle d’alpha au sein de la meute, les ordres avaient été clairs, du moins l’estimai-je : nul recours à la violence en public ou sans motif de défense. Masi après tout… Je soupirai. Je devais faire confiance à celle que je pensais être ma soigneuse. Oui. Sûrement se défendait-elle. Mais dans ce cas… Pourquoi ne pas avoir composé le numéro d’urgence ? Peut-être n’en avait-elle pas eu le temps ou la capacité, quoiqu’elle me semblât particulièrement enragée pour être en position seule de défense… Enfin. Rapidement, je me reculai pour me rendre dans une ruelle adjacente. Me transformer, c’était là ma seule solution pour les arrêter. Retirant mes vêtements, seuls exemplaires sur moi, je me hâtai de les cacher quelque peu derrière des poubelles, ainsi que mes quelques achats. Il n’y avait qu’à espérer que personne ne les trouve avant mon retour. Et me dirigeai rapidement à côté, forçant la foule à s’écarter sur mon passage. Peut-être était-ce d’ailleurs l’un des avantages de la forme lycane. Nous n’avions aucun problème pour séparer un regroupement, les humains semblaient trop effrayés pour nous faire face.
Arrivé à hauteur de combat je grondai furieusement un coup pour tenter de me faire entendre. Inutile, bien sûr, elles étaient visiblement trop aux prises avec leur propre fureur. C’est pourquoi je me jetai dans la mêlée, me positionnant entre elles, quitte à prendre un coup. Il fallait que cette imbécilité flagrante cesse immédiatement. Tant pour leur bien, que celui des humains qui pouvaient devenir victime collatérale que pour le bien de la race lycane entière. A nouveau, les observant une à une, je me mis à gronder, menaçant. Je ne cherchais certes pas le combat, mais il était pour autant hors de question que je me laisse faire si l’une d’entre elle cherchait à m’attaquer.
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Evelyn n’avait pas conscience de l’attroupement d’humains. C’était, et de loin, sa dernière préoccupation. La rage commençait à prendre le dessus sur son bon sens. Elle n’avait qu’une idée, qu’une seule envie, tâcher de rouge le pelage blanc de son adversaire. Son pelage à elle était principalement noir, ses blessures seraient moins apparentes.
Nul recours à la violence en public ou sans motif de défense. Un ordre clair. Un ordre qu’Evelyn avait rapidement oublié. Et au diable Victor. Au diable les spectateurs. Il n’y avait ici, dans cette ruelle, qu’elle et Kaia. La louve noire et la louve blanche, et rien d’autre n’avait d’importance.
Ses griffes lacérèrent l’air, mais elle réussit à mettre Kaia au sol. Une petite victoire à ne pas célébrer trop rapidement. Elle recula face à l’assaut violent, sentit les griffes toucher sa cuisse droite, le sang couler sur sa jambe. Elle évita cependant les crocs. Et elle tenta elle aussi de mordre son adversaire, visa les bras et le cou. Une danse mortelle; elle était maintenant complètement transformée, et plus imposante que son adversaire ne le serait jamais. Et les grognements d’Evelyn était clair, eux aussi : Tu es morte! Je vais t’arracher la tête. Tu ne seras plus qu’un amas de chair sanguinolente quand j’en aurai terminé avec toi. Ce qu’il restera de ton corps ne sera pas identifiable.
Un élément extérieur vint perturber le combat, un autre lycan s’immisçant entre Evelyn et Kaia. Aveuglée par sa rage, prise dans le feu du combat, la louve ne prit pas le temps d’analyser cette nouvelle information. Elle vit aussitôt le loup comme un ennemi. Brusquement, elle chargea le lycan, le poussa contre un mur, gronda férocement. …Puis réalisa son erreur. Victor. …Bordel. De. Merde.
Evelyn libéra sa prise sur son Alpha, recula d’un pas surpris; et laissa, de ce fait, le champ libre à Kaia pour une attaque traître - et Kaia était certainement la Reine de la traîtrise.
A force, Kaia s'était entièrement transformée et la lutte était assez inégale...Son adversaire était bien plus grande qu'elle et elle était obligée de compenser par de la ruse, de la force ou même avec son expérience. Et jamais, elle ne laisserait sa taille être source de faiblesse ! Jamais ! Et son ennemie était visiblement dans le même état d'esprit car les crocs claquaient, signe de morsures ratées de peu, Kaia sentait les griffes frôler son épiderme. Elle adorait le sang mais refusait que son pelage soit couvert du sien, il serait couvert de celui de la louve noire !
Le concert de grognements continuaient de s'élever, inlassablement alors que Kaia tentait de planter ses griffes pour l'affaiblir. Elle profita que les crocs se plantent en surface dans son bras, rien de grave, il n'y aurait que de légères coupures du aux crocs bien affutés...En attendant, elle chercha à planter ses griffes dans la hanche de la louve. Mais non, elle ne put l'atteindre. Quelque chose la repoussa. Un lycan. Grand. Menaçant. Qui cherchait à les séparer. Elle grogna furieusement à son encontre. De quel droit se permettait-il d'intervenir dans cette histoire ?
Mais ce fut son adversaire la plus rapide. Elle plaqua l'intrus contre le mur, menaçante puis la seconde d'après se recula. La situation était étrange mais Kaia ne prit pas le temps de réfléchir. Peut-être que les deux se connaissaient et dans ce cas-là, elle ne pouvait se permettre d'en avoir deux sur le dos ! Elle devait agir, et vite.
Elle lança un rugissement furieux, bestial, parfaitement évocateur de ce qui allait suivre. Elle allait attaquer et ne ferait pas dans la dentelle ! Elle allait mordre, griffer, dans l'objectif de tuer ! Et l'autre n'avait pas intérêt à intervenir s'il ne voulait pas subir la même chose ! En vraie, elle était parfaitement consciente de ne pas vraiment faire le poids face à deux lycans, c'est donc pour ça qu'elle décida d'agir aussitôt.
Elle fonça droit sur la louve noire, tout crocs dehors, grognant en continu. Elle plongea sur elle, l'entrainant au sol, quitte à rouler avec elle. Le reste ne fut qu'un méli-mélo de crocs et de griffes. Elle cherchait à empoigner, à planter, à mordre...Bref, elle cherchait à la blesser, qu'importe la façon. Le soucis ? C'est que dans l'action, elles s'étaient approchés près, très près, trop près même des humains qui risquaient de prendre un coup au passage...
En attendant, concentrée sur sa tâche et perdue dans sa rage, Kaia avait totalement oublié le lieu, les alentours, les spectateurs et surtout...l'autre lycan. Ce qui était probablement sa plus grosse erreur en cet instant !
Le couperet tomba bien rapidement alors que la louve noire me fonçait allègrement dessus. Mon dos heurta le mur alors que je grondai furieusement. Elle ? Elle réalisa visiblement son erreur, reculant d’un pas alors que je me rétablissais sur mes pattes, l’air plus que furieux. Je n’étais pas furieux de mettre fait plaqué contre un mur. Non. J’étais surtout furieux de son comportement. Evelyn. La propre soigneuse du groupe en train de se donner en spectacle dans un combat des plus grotesques. Je n’eus seulement pas le temps de réagir que l’autre louve revint à la charge, envoyant ma soigneuse dans les roses. Sous forme humaine, sûrement, aurais-je poussé un immense soupir, mais sous forme lycane, seul un grondement sourd et particulièrement furieux se fit entendre. Mais d’abord…
Accourant vers les deux louves, je pris soin de faire déplacer les foules pour ne pas risquer une quelconque victime collatérale. Un large cercle reformé, ne pouvant décemment disperser la foule, je me retournai vers l’amas de poils enragé qui se battait toujours. Bien. Je n’avais plus réellement la possibilité de réfléchir. Sans attendre, je fondis sur les deux louves, attrapant la nuque de la blanche entre mes crocs pour l’envoyer violemment plus loin. Je fis alors de même avec Evelyn. Les deux louves plus loin dans la ruelle, je m’approchai d’elle, grondant de colère. Je n’allais certainement pas jouer les gentils loups avec ces deux inconséquentes qui se donnaient en spectacle. Approchant pas à pas d’elles, je me stoppai devant en grondant et usant tant de mon âge avancé que de ma position d’alpha leur intimai l’ordre de se soumettre. Ce n’était pas tant une envie de ma part qu’une nécessité pour leur faire comprendre qu’il ne servait à rien de tenter de se battre contre moi. Non. Bien au contraire. Elles ne feraient que perdre leur temps. Un coup de patte au sol, et je leur donnais l’ordre de s’allonger. Preuve de leur faculté de réflexion mais surtout de leur désir d’obéissance pour mettre fin au combat ridicule. Droit, fier devant elles, je les observai une à une. Pourquoi ? Il n’était pas très difficile de me faire comprendre cette fois-ci. Mais pour avoir une réponse, fallait-il encore qu’elles me suivent, et donc qu’elles se soumettent avant cela, sans quoi je n’aurais la preuve de leur désir d’apaisement.
“Make no mistake, the beast inside is sleeping, not dead.”
Evelyn fut donc entrainée au sol par la charge violente de la louve blanche; à cause de la distraction apportée par Victor. Elle sentit les crocs de Kaia se refermer sur son épaule et grogna autant de colère que de douleur. Un méli-mélo, le mot est juste. La louve noire était tantôt au-dessus, tantôt en dessous, partageant avec l’autre louve coups de griffes et morsures. Et absolument rien d’autre n’avait d’importance; juste Kaia et l’odeur du sang. Tout le reste s’effaçait.
Ses crocs se refermèrent sur le vide, sa cible ayant subitement disparue, et, l’instant suivant, les crocs de Victor se refermèrent sur sa nuque. Elle fut projetée plus loin, surprise et un peu secouée par la stupide intervention de son Alpha. De tous les loups? De toutes les ruelles? Pourquoi diable fallait-il que ce soit lui, ici, à ce moment précis? Le Destin se moquait d’Evelyn.
D’ailleurs, de quoi Victor se mêlait-il? Ce n’était pas son combat. Pourquoi mettait-il son museau là où il n’était pas désiré? Il ne pouvait pas empêcher Evelyn de se battre; il ne pouvait pas empêcher Evelyn de régler cette histoire. Dans le sang, dans la mort; la sienne ou celle de l’autre. C’était un besoin primaire, la louve ressentait une rage puissante. Et peu importe la fureur de Victor, elle ne dépassait pas celle d’Evelyn en ce moment.
Un ordre : se soumettre, mettre fin au combat.
Et en Evelyn se livra alors un autre combat; d’instinct, elle désirait s’allonger sur le sol devant son Alpha, mais elle refusait de se montrer faible face à la louve blanche, et elle refusait de s’exposer de manière vulnérable, de s’exposer à la traîtrise de Kaia. ...Alors, elle focalisa son attention sur la louve blanche. Prête à bondir à la moindre occasion, à réagir à une attaque soudaine. Les poils sur le dos d’Evelyn étaient hérissés, signe qu’elle n’allait pas se soumettre dans l’immédiat.
Kaia se montrait menaçante mais n’attaquait pas. Oh, ce n’était qu’une question de temps, Evelyn la connaissait. …Enfin, non, elle ne la connaissait pas tellement. Elle la savait fourbe, arrogante, susceptible et idiote, c’était à peu près tout.
La louve avait tant désiré ce combat, et que cela se termine aussi rapidement lui laissait un goût amer en bouche. Elle désirait davantage. Le sang n’avait pas encore assez coulé. Elle grondait en regardant la louve blanche, souhaitait que Kaia commette l'erreur de les attaquer. ...Ou qu'elle fuit devant la puissance combinée des deux loups. Oui, qu'elle fuit et Evelyn se fera un plaisir de la pourchasser comme elle pourchasserait un lièvre effrayé.
Kaia avait réussi à plaquer la louve noire au sol, même si cela ne dura pas longtemps. Elles roulèrent un moment pendant que les crocs et les griffes s'enfonçaient dans les chaires. Ses crocs avaient réussi à se planter dans une épaule avant de revenir à la charge ailleurs...mais elle aussi, son propre sang coulait, tachant sa fourrure blanche. Néanmoins, elle ne s'en préoccupait pas, continuant de s’acharner sur sa rivale, tout en grognant.
Et puis soudainement, quelque chose se referma sur sa nuque. Elle n'eut pas le temps de faire grand chose, à peine un glapissement qu'elle volait. Décidément, elle devrait s'attacher des ailes dans le dos, ça pourrait lui être utile au vu du nombre de fois qu'elle faisait des vol planés... La louve atterrit lourdement au sol, grondant et secoua la tête, légèrement sonnée.
Pourtant, elle remarqua que la louve noire atterrissait elle aussi, à un ou deux mètres d'elle. Kaia se redressa légèrement, refusant d'apparaitre affaiblie devant son ennemi, alors même qu'un autre lycan se mêlait à la fête. Mais qui était-il à la fin, celui-là ? Et pourquoi intervenait-il ainsi ?
Elle le regarda s'approcher, puis se dresser face à elle, imposant, dominant même. Mais Kaia refusait de l'admettre. Il n'était pas son Alpha, il n'était rien pour elle. Furieuse, elle se releva entièrement sur ses deux pattes, se dressant face à cet inconnu. Malgré sa petite taille, le message était clair. Elle ne se laisserait pas faire. Elle ne laisserait pas un inconnu la dominer ainsi. Elle se battrait. Jusqu'à la mort s'il le fallait. Pourtant, elle ne bougea pas plus. Elle restait là où elle était, dressée de toute sa hauteur, grondant au point d'en montrer les crocs, usant de son propre statut d'Alpha face à l'autre loup. Il voulait se la jouer dominant ? Eh bien, il allait être servit.
Au final, elle ignorait presque la louve noire qui ne bougeait pas non plus. Elle devait d'abord s'occuper de ce type sorti de nul part avant de reprendre où elle en était avec sa rivale. Son corps était couvert de sang, aussi bien le sien que celui de son ennemie, mais elle ne s'en préoccupait pas. Ce n'était pas le moment. Ce n'était que de simples morsures. Il y avait plus important et il était là, face à elle à tenter d'imposer sa domination. Et elle, elle le défiait, du regard, de sa posture, attendant de voir ce qu'il allait faire. L'incitant presque à attaquer en premier, car elle ne le ferait pas elle-même. Elle était extrêmement méfiante face à ce loup.
A nouveau, je grondai fortement contre Evelyn. Était-elle en train de défier mon autorité. Oui et non à vrai dire. Elle ne me regardait même pas, tentait-elle d’oublier mon ordre ? Son attitude m’indiquait qu’elle ne se soumettrait pas aussi facilement que j’aurais pu l’espérer afin de mettre un terme au combat. Quant à l’autre… Mon regard se posa sur la petite louve blanche. Qui était-elle pour mettre Evelyn dans cet état ? Qu’avait-elle donc fait pour que la propre infirmière du clan déroge à l’une de nos principales règles de la sorte ? Les yeux plus en colère que jamais de voir ma meute et mes semblables possiblement mis en danger par deux petites sottes inconséquentes. La blanche, sembla à son tour résister, bien plus, même que la première. Dressée sur ses pattes, il semblait qu’elle veuille faire usage d’un certain pouvoir. Qui diable était-elle donc ? Crocs sortis, je me redressai davantage, imposant, se voulant dangereux, je grognai à quelques centimètres seulement du museau de la louve blanche. Je ne désirais pas attaquer. J’étais, de toutes les manières, contre toute forme de violence, n’en usant qu’en cas d’extrême nécessité. Ce n’était donc là pas plus qu’un jeu de pouvoir, de regard et de grognement que je ne comptais certainement pas perdre.
Penché vers l’impudente je claquai alors soudainement tant des crocs que de la patte avant droite sur le sol pour lui indiquer mon désir de la voir plier. Je n’abandonnerais pas. Jamais. Pourtant, dans mon regard, pouvait se lire un certain questionnement, un désir d’apaisement. A vrai dire, même en colère, mon regard ne portait jamais les marques sanguinaires de la rage. Non. Bien au contraire. Je restai, après tout, le même loup, désireux de paix et de la sérénité entre tous.
Un geste du museau, j’indiquai alors aux deux louves, sans cesser d’observer la blanche afin d’éviter tout risque d’attaque surprise, le groupement d’humain derrière moi. Qu’elles se rendent compte de leur bêtise, de leur spectacle absurde et même grotesque ! Et à nouveau je grognai, donnant un coup au sol. La blanche n’avait que deux solutions, et j’étais particulièrement patient. Elle s’inclinait afin que je puisse m’occuper du cas d’Evelyn, ou nous resterions bloqués là jusqu’à ce que, sûrement, les chasseurs n’arrivent, du moins espérais-je qu’elle avait conscience du risque qu’elle nous faisait prendre mais aussi qu’elle prenait. Si elle était un tant soit peu intelligente, peut être réagirait-elle alors.
“Make no mistake, the beast inside is sleeping, not dead.”
Cette immobilité allait rendre Evelyn cinglée. L’odeur du sang de la louve blanche attisait son envie de lui sauter à la gorge; son envie de lui ouvrir la gorge et de répandre ses boyaux dans la ruelle. …Mais ce serait une victoire de lâche – une victoire comme les aimait très certainement Kaia. …Et la louve savait que si elle commettait un tel acte, que si elle relançait les hostilités devant son Alpha, la colère de ce dernier se transformerait en lourde conséquence pour elle.
Finalement, il semblait bien qu’Evelyn n’aurait ni son plat de boulettes de viande, ni sa douce revanche, et qu’à la place elle aurait des remontrances de son Alpha. …Enfin, la journée n’était pas encore terminée, tout pouvait changer. Victor pourrait décider que la journée avait été assez longue, que les remontrances attendraient un autre jour. Victor pouvait encore décider de faire équipe avec Evelyn pour abattre la louve blanche.
La louve balançait son poids de droite à gauche. Avec l’inaction, sa cuisse droite et son épaule gauche commençaient à l’élancer de douleur; deux coups bien portés de son adversaire. Mais son sang qui tâchait son pelage et ses blessures qu’elle qualifiait de superficielles n’avaient aucune importance : elle avait elle-aussi blessé sa rivale, voilà tout ce qui comptait.
Son Alpha et sa rivale se faisaient face. Deux loups qui essayaient de se montrer plus dominant que l’autre. Un combat sans violence. Evelyn donna un coup de patte au sol. Elle était impatiente, désirait combattre, désirait que Victor les laissa tranquille. Son intervention inutile, cette distraction, aurait pu coûter cher à la louve.
Elle jeta un bref et rapide coup d’œil derrière Victor. L’attroupement d’humains ne l’intéressait pas. Seules les réactions de Kaia intéressaient Evelyn. Certes, un combat dans la forêt aurait été plus approprié, mais en termes de distance la ruelle avait été le plus près.
Face au loup inconnu, Kaia refusait de se soumettre. Elle était aussi droite et haute que possible avec sa petite taille et ne baissait pas le regard, le fixant dans celui du grand loup. Il se montrait autoritaire dans son comportement, grognant à quelques centimètres, claquant des mâchoires...Les signes étaient évidents, il voulait qu'elle se soumette. Et elle grondait en réponse. Hors de question de lui donner ce plaisir ! Elle n'avait pas chèrement acquis sa place dans cette ville pour se soumettre devant le premier lycan venu !
Mais pourtant, son regard n'indiquait pas un combat à venir. Son regard allait à l'encontre de ce que sa posture indiquait. Ce loup était troublant et Kaia avait du mal à saisir lequel message était le bon. Finalement, il indiqua d'un geste du museau quelque chose derrière elle. Kaia se pencha légèrement pour voir ce qu'il montrait. Ah. Une foule d'humains. Un grondement sourd monta dans sa gorge, une menace en direction des humains. Ces êtres pathétiques ! De quel droit se permettaient-ils d'observer ainsi ce qui ne les concernait pas ? Les loups leur étaient largement supérieurs, ils devraient plutôt s'enfuir ou s'agenouiller plutôt que de les fixer ainsi.
Néanmoins, elle secoua la tête, comprenant que ce n'était ni l'endroit ni le bon moment pour régler ses comptes avec la louve noire. Elle tourna la tête vers cette dernière et gronda à son encontre, cherchant à la traiter d'idiote. C'était elle qui avait tout fait pour avoir ce combat, désireuse de le faire ici même sans aucune protection alors que Kaia aurait été prête à quitter la ville...Bon en vrai, elle était ravie de pouvoir lui sauter dessus dès qu'elle avait pu. Elle revint ensuite sur l'inconnu du lot, croisant de nouveau son regard. Elle ne se soumettait pas mais d'un geste du museau et de la patte leur indiquait de la suivre. Loin d'ici, loin du regard de ces curieux. Elle adressa un nouveau grognement pour la louve noire, clairement menaçante. Qu'elle ne cherche pas à l'agresser, sinon cette fois-ci, elle ne s'arrêterait pas, même si un inconnu venait la sauver...
Elle recula alors, d'un pas ou deux puis se retourna, s'élançant à travers la ruelle. Elle brava la partie la plus mince du cercle des spectateurs, même si ceux-ci s'écartèrent aussitôt en la voyant arriver. Dommage, elle aurait bien aimé les bousculer et les faire tomber... Elle jetait de temps en temps un coup d’œil derrière elle, vérifiant si les deux loups la suivaient bien. Mais surtout, elle humait l'air à la recherche d'un endroit discret et sans humain. Elle avait surement couru plus d'une dizaine de minutes quand elle s'enfonça dans un bâtiment qui semblait être à l'abandon. L'endroit parfait pour une discussion entre lycan...ou pour finir une querelle, non ?
Pourtant, Kaia décida de s'attarder sur le regard de l'inconnu. Il ne semblait pas vouloir se battre. Elle espérait ne pas se tromper. Elle reprit forme humaine, ce qui serait plus simple pour discuter...et savoir qui il était. Elle s'installa sur une caisse qui trainait, croisant les jambes dans une attitude nonchalante. Sa nudité ne lui posait aucun problème alors même qu'elle attendait les deux autres, l'un de ses pieds battant tranquillement l'air. Un sourire légèrement narquois étirait ses lèvres en les voyant arriver.
- Alors, le sauveur de cette demoiselle en détresse va-t-il enfin se présenter ?
Elle ne quittait pas du regard l'intrus dans cette querelle, surement le plus grand danger à ses yeux. Pourtant, elle adressa quelques mots à la louve noire : - Comme d'habitude, tu es toujours aussi faible. A l'époque aussi, tu avais eu besoin que ta meute vienne te sauver le cul. Comme quoi, certaines choses ne changent jamais, n'est-ce pas ?
Elle était clairement moqueuse, misant sur le fait que le grand loup ne voulait pas qu'elles se tuent. Sinon, sous forme humaine, elle n'avait aucune chance. Mais en même temps, elle souhaitait réellement savoir qui il était.
Si Evelyn semblait n’avoir cure des humains présents derrière moi, j’entendis avec une certaine dose de mécontentement le grognement de la seconde louve. Que cherchait-elle donc à faire ? Effrayer ces pauvres humains qui n’avaient rien demandé et qui se trouvaient là, attroupés, par leur faute ? Grondant de nouveau, je fus néanmoins forcé de constater qu’elle se rendait compte de leur bêtise, à l’inverse d’Evelyn. Un coup d’œil à ma louve, et je lui intimais l’ordre de passer derrière moi alors que je suivais l’autre sur les talons. Dix minutes de courses tout au moins nous furent imposés pour trouver un bâtiment abandonné. Parfait. Laissant la louve blanche s’engouffrer dans celui-ci, je me stoppai net devant l’entrée, barrant le passage à mon infirmière pour me retourner vers elle, furieux. La fusillant du regard, je frappais par deux fois de la patte, signe de mon mécontentement, grondant fortement à quelques centimètres de son museau. Oh oui, j’étais en colère, bien plus qu’elle n’avait pu le voir jusque-là. Elle avait bravé l’une des règles les plus importantes à mon sens et pourquoi ? Pour se battre avec une autre ? J’espérais sincèrement pour elle qu’elle ait une très bonne raison d’agir de la sorte car dans le cas contraire, j’osais espérer qu’elle n’imaginait pas s’en sortir si facilement. Me détournant de la jeune femme, je m’engouffrai à mon tour dans le bâtiment, ralentissant le pas à hauteur de la louve blanche. Je dois avouer que la voir se retransformer fut un soulagement. Non que je ne fusse pas prêt à me battre, j’avais bien entendu envisagé ce scénario, mais cela était au moins une preuve d’apaisement, suffisamment importante pour que je me retransforme à mon tour. Le visage fermé, sévère, alors que je replaçais correctement la mèche censée masquer au mieux la partie brûlée de mon visage, je m’avançai devant la jeune femme désormais assise sur une caisse, sans aucune gêne de par ma nudité comme la sienne.
- Peut être serait-ce à son opposante de commencer les présentations. Dis-je. Mais soit. Victor Rosenbach. Alpha de la meute Mahiingan. Je fronçai les sourcils. Et puis-je savoir qui est assez inconséquente pour provoquer un combat au milieu d’une foule humaine ?
Mon ton était sans appel : je n’approuvais pas leur geste. Je le condamnais, même. Mais la louve semblait n’avoir cure de tout cela, profitant même de son retour en tant qu’humaine pour lancer une pique à Evelyn.
- Il n’était nul ton de lui « sauver le cul », pour reprendre votre expression, Miss. Mais les lois de mon clan sont particulièrement claires et nous ne supporterons aucunement les actes insensés et condamnables d’autres lycans.
Un rappel tout à fait clair envers Evelyn, sans pour autant la mettre en porte à-faux. De toute part, mes yeux la jaugeaient, non que je la jugeasse, je n’étais pas homme à cela, mais je tentais de savoir ce qu’il lui était passé par la tête. Par leur tête à vrai dire.
- Je suppose que vous connaissez tout aussi bien que moi la situation actuelle des créatures surnaturelles, continuai-je. Tout comme toi. Dis-je en jetant un coup d’œil à Evelyn. Alors j’ose au moins espérer que vous avez une raison valable pour vous donner une pâture à la Fédération et donner une nouvelle raison presque valable de nous chasser. Grondant un coup, je fronçai les sourcils. Oh bien entendu, nos règles ne sont pas valables pour vous, Miss. Mais je tiens compte de votre supposée intelligence et réflexion pour espérer que vous puissiez vous rendre compte de votre bêtise.
Peut-être étais-je moralisateur. Sûrement, à vrai dire, et je m’en rendais compte, mais que dire d’autre ? Ces petites idiotes se rendaient-elles au moins compte de ce qu’elles avaient faillis provoquer ?
“Make no mistake, the beast inside is sleeping, not dead.”
Devant les grondements furieux de son Alpha, Evelyn souhaitait disparaitre. …Ou non. Elle désirait que Victor disparaisse. Sa présence n’était nullement désirée. La louve baissa la tête, docile, soumisse. Une façade. Elle avait beaucoup de colère en elle, baisser la tête était une façon de masquer la tempête visible dans ses yeux. Avait-elle une bonne raison de se battre? Oui, puisque toutes les raisons étaient bonnes - mais peut-être pas aux yeux de Victor.
- Alors, le sauveur de cette demoiselle en détresse va-t-il enfin se présenter ?
Evelyn, encore sous sa forme lycane, gronda. Un avertissement. Demoiselle en détresse? Elle allait arracher un bras à Kaia, pour voir qui était réellement la demoiselle en détresse ici. Mais Victor reprit forme humaine et, à son instar, la louve également; dominant sa colère. Victor se présenta bien courtoisement, et termina sa présentation par ses mots :
- Et puis-je savoir qui est assez inconséquente pour provoquer un combat au milieu d’une foule humaine ?
Evelyn réagit rapidement à cette question. Autant prendre le taureau par les cornes. Assumer sa part de responsabilité pourrait - possiblement, mais il y avait peu de chance - apaiser Victor. Et elle n’allait pas se cacher derrière sa rivale pour éviter la colère de son Alpha.
- C’est moi. Je l’ai invité dans la ruelle, dit-elle avec aplomb en regardant Victor. Puis elle posa les yeux sur la louve blanche et lui répliqua : - Ne te méprend pas. En interrompant ce combat, c’est toi qu’il a sauvé. Tu devrais le remercier.
C’était un peu présomptueux, surtout considérant ses quelques blessures – dont elle attribuait certaines à l’intervention indésirable de son Alpha. Celle à l’épaule droite était assez profonde et le sang coulait sur la poitrine de la louve. Mais elle se tenait bien droite, quelque peu arrogante, et ce malgré ses petites blessures, dont celle à la jambe gauche. Et tout ce sang, le sien et celui de sa rivale, lui donnait un air quelque peu barbare.
Kaia avait une langue acérée. Toujours aussi faible, disait-elle. Certaines choses ne changent jamais, rajoutait-elle. Evelyn afficha alors un sourire amusée, car sur ce dernier point sa rivale avait raison. Et on avait qu’à poser les yeux sur Kaia pour le constater; toujours la même petite louve arrogante, susceptible et idiote. - Il n’était nul ton de lui « sauver le cul », pour reprendre votre expression, Miss. Mais les lois de mon clan sont particulièrement claires et nous ne supporterons aucunement les actes insensés et condamnables d’autres lycans.
Elle sentit le regard de Victor peser sur elle un instant. Elle savait pertinemment qu’elle allait goûter à la grande fureur de l’homme, une fois les lieux quittés. Mais pas tout de suite. Un petit sursis pour la louve.
Les lois. Il ne fallait pas juger Evelyn, c’était les lois qui étaient stupides et non elle. Et ce qui était passé par la tête de la louve était assez simple : de la colère et une envie irrépressible de faire couler le sang de la louve blanche. Bien sûr, un peu plus de trente années s’étaient écoulées depuis leur dernière rencontre, de l’eau avait coulé sous les ponts, mais Evelyn n’oubliait jamais un visage traître, et pardonnait rarement.
Victor allait devoir arrêter d’appeler Kaia "Miss"; elle était loin d’être une grande demoiselle. Victor le moralisateur. Pensait-il pouvoir les raisonner? …Enfin, peut-être Kaia, mais pas Evelyn. Un rire moqueur échappa à la louve. La "supposé intelligence" de Kaia. Sa grande "réflexion". Ah, elle était bonne, cella là!
- La raison la plus vieille au monde Victor. Ce petit bout de femme m’a jadis attaquée sournoisement, nous étions en train de régler nos comptes. Et nous n’avons d’ailleurs pas terminé, dit-elle et ses yeux brillèrent brièvement d’ambre à l’intention de Kaia.
Oui, Evelyn savait que tout ce qu’elle disait pourrait et serait retenu contre elle. Oui, elle savait qu’elle n’allait pas améliorer son sort. Oui, elle savait qu’elle creusait sa propre tombe.
Tranquillement assise sur sa caisse, Kaia croisa les jambes, non pas dans une idée de se cacher mais tout simplement pour être plus à l'aise. Le duo entra finalement, après quelques secondes à l'avoir laissé seul. Le mâle fut le premier à redevenir humain. Elle lui laissa le temps de se recoiffer, n'ayant pas vraiment le temps d’apercevoir la raison d'une telle application. Peut-être qu'il voulait juste être correcte alors qu'il était totalement nu.
Il prit alors la parole et se présenta. Un Alpha. Voila qui expliquait bien des choses. Finalement, la louve reprit forme humaine et annonça que c'était elle qui avait provoqué tout cette histoire et surtout le combat.
- Voila un bien geste noble que d'assumer ta provocation de tout à l'heure. Mais j'admets y avoir répondu, même si je pensais plutôt aller en forêt ou dans un parc. La prochaine fois, c'est ce qu'on fera. Et je peux t'assurer que tu comprendras vite que je n'ai pas besoin de secours...contrairement à toi. N'oublies pas que tu es celle, qui toujours, se fait sauver par sa meute ! Car je suppose qu'il est ton Alpha.
Kaia tourna ensuite la tête en direction du seul homme présent.
- Ainsi donc, c'est dans ces circonstances que je rencontre l'Alpha de la meute Mahiingan ? Je suis Kaia Steinn, Alpha du Cercle Barker.
Et s'il était au courant des agissements des loups dans la ville, autour de sa meute, il devrait donc savoir qu'elle ne l'était pas depuis si longtemps mais qu'elle avait vaincu son ancien Alpha dans un combat tout à fait loyal. Après tout, il était trop faible pour diriger le cercle et il en avait payé le prix. La conversation continua sur le même ton, le mâle se montrait moralisateur, la louve et elle continuaient à se lancer des piques. Elle gronda en entendant l'explication donnée à leur querelle. Elle saisit un morceau de placo, surement tombé du plafond et l'envoya droit sur la louve.
- Le petit bout de femme t'emmerde ! Tu n'as de cesse de m'insulter, même à l'époque et après tu oses me tourner le dos ! Mais je te promets qu'un jour, tu paieras toutes tes insultes et tes provocations pathétique louve !
Elle était passablement énervée et il faudrait être aveugle pour ne pas s'en rendre compte. Elle se tourna de nouveau vers Victor, son regard flambait, preuve de la rage qui l'habitait dès qu'on parlait de sa taille ou même de son physique.
- Il serait, tout de même bon, que vous appreniez à tenir vos loups ! Même si je vous l'accorde, vous n'avez pas de chance avec celle-ci, une faible et pathétique louve dans vos rangs. Néanmoins, vous avez raison sur un point, je ne suis pas de votre meute et je n'ai pas à respecter vos règles. Les miennes me suffisent largement. Et sachez que je maîtrise l'art du combat en centre-ville, ayant l'habitude de me battre contre les chasseurs. Après tout, ce n'est pas vous qui allez sauver les fesses des créatures surnaturelles de la ville.
Oui bon, elle s'était peut-être un peu trop emportée à cause de l'insulte de la louve. Mais au fond, avait-elle réellement tord ? Cette meute se voulait pacifique et ne défendait pas les créatures agressées par les chasseurs. Résultat, bon nombre se faisait massacrer. Et ça, Kaia ne pouvait l'admettre ! Alors oui, elle préférait se battre et tuer les chasseurs. La louve noire n'avait été qu'un fâcheux contretemps qu'elle avait pourtant estimé être du passé.
